Intervention de Francesca Pasquini

Réunion du mardi 28 novembre 2023 à 18h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrancesca Pasquini, rapporteure :

Je vous remercie de nous accueillir dans cette commission pour l'examen de cette proposition de loi cosignée par 166 députés de huit groupes politiques différents. Elle est le fruit d'un travail commencé il y a un an avec les associations de lutte contre le tabac et de protection de l'environnement. Le groupe Écologiste-NUPES se félicite d'avoir rapidement été rejoint dans ce combat par des députés engagés, comme le rapporteur Michel Lauzzana.

Notre objectif est simple : interdire les puffs, ces cigarettes électroniques jetables ou à usage unique, qui ne contiennent pas de tabac, mais peuvent contenir de la nicotine, une substance vénéneuse au double effet psychotrope et addictif. Pour éclairer nos débats, il me semble nécessaire d'être clair sur les produits visés par la proposition de loi. Elle ne s'attaque ni aux produits de vapotage rechargeables, qui servent souvent à sortir d'une consommation de tabac, ni aux nouvelles formes de délivrance nicotinique. Nous avons fait le choix de nous focaliser sur les cigarettes électroniques jetables – même si ce choix pose des questions juridiques, économiques et sanitaires – pour ne pas prendre le risque de fragiliser le texte et pour aboutir rapidement à une interdiction pure et simple.

Les puffs se sont développées de façon exponentielle et anarchique grâce à un marketing agressif et souvent illégal déployé par les industriels du tabac pour compenser le risque que les générations à venir ne fument plus. Apparue sur le marché français en 2021, la cigarette électronique jetable, avec son format compact, est prête à l'emploi, ce qui la rend plus pratique et discrète que les dispositifs rechargeables. Ces caractéristiques ont permis à des commerçants aussi divers que des magasins de décoration, des kiosques à journaux ou des moyennes et grandes surfaces d'en proposer à leurs clients. Les cigarettes électroniques jetables sont donc facilement accessibles.

De graves contournements de l'interdiction de vente aux mineurs sont constatés et ceux-ci en font un large usage : leur prix est dérisoire, les arômes fruités et sucrés sont attirants et elle passe inaperçue des parents grâce à la discrétion du dispositif. Leur consommation a quadruplé au cours de l'année dernière. Actuellement, au Royaume-Uni, huit cigarettes électroniques jetables finissent à la poubelle toutes les secondes, soit 5 millions chaque semaine. En France, 47 % des jeunes qui ont essayé un dispositif à usage unique ou jetable ont découvert la nicotine par son usage.

Les cigarettes électroniques jetables sont également une aberration environnementale. Le plastique et le lithium qui les composent ont un mode de production très consommateur d'eau et de pétrole, extrait à l'autre bout du monde dans des conditions déplorables. Elles sont aussi polluantes à la fin de leur cycle de vie car leurs composants ne disparaissent jamais de notre environnement. C'est d'autant plus préoccupant que, d'une part, les vendeurs de produits de vapotage ne nient pas que leur obligation légale de reprise des déchets électroniques et électroménagers – catégorie à laquelle appartiennent les puffs – est presque nulle et que, d'autre part, les éco-organismes se déclarent démunis face à des produits qui, même épuisés, sont extrêmement inflammables car encore dotés d'une charge d'ions dans leur pile.

Facilité d'usage, disponibilité du produit, publicité déguisée, cycle de vie extrêmement court : tous les éléments sont réunis pour qu'un scandale sanitaire et environnemental éclate. D'après une étude publiée il y a quelques semaines par l'Alliance contre le tabac, 73 % des jeunes de 13 à 16 ans avaient déjà entendu parler des cigarettes électroniques jetables et 15 % en avaient déjà utilisé.

L'interdiction totale est une mesure de santé publique à double titre : elle permettra de protéger à la fois la santé de nos concitoyens et l'environnement. La santé des personnes n'est pas indépendante de celle des écosystèmes. Nous nous devons d'agir face à ces aberrations sanitaires et environnementales. Je suis certaine que chacun ici partage notre combat et notre volonté. L'interdiction est une première étape nécessaire. J'espère que vous serez nombreux à nous rejoindre pour protéger la santé de nos concitoyens.

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