Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du mardi 19 mars 2024 à 15h00
Rénovation de l'habitat dégradé — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Dans tous les territoires, nos concitoyens voient avec inquiétude des immeubles s'abîmer, se lézarder, ou même s'effondrer. Partout, les copropriétaires sont exposés aux mêmes problèmes : difficultés de gestion, impayés de charges qui s'accumulent, travaux reportés. Ceux qui en ont les moyens désertent ces lieux de vie. Demeurent les plus fragiles, enfermés dans des logements devenus dangereux et dans une spirale de paupérisation. De telles situations sont inacceptables. Les pouvoirs publics ne peuvent agir que bien trop tard, une fois que l'immeuble est dans un état tel qu'il est nécessaire de le rénover intégralement ou de le rebâtir.

Le projet de loi permettra aux collectivités et aux opérateurs d'intervenir plus en amont et d'éviter ainsi des drames humains et sociaux. J'affirme d'emblée qu'il va dans le bon sens et que le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires y est favorable, car il approuve ses grandes lignes. Le texte permet de doter les collectivités de nouveaux outils : le groupe LIOT croit justement à l'intelligence des territoires et à la capacité d'action des élus locaux. Ce maillon essentiel pourra désormais intervenir en amont, autant que cela est possible, grâce à la nouvelle procédure créée à l'article 3, par laquelle des immeubles dont l'état est remédiable pourront être expropriés. Cette disposition permettra de remettre en état un bâtiment avant que la situation soit irrémédiable, et la destruction inéluctable. Cela relève du bon sens.

Autre instrument aux mains des collectivités, les opérations de restauration immobilière pourront être déclenchées sans attendre une dégradation trop importante, en prenant en considération les enjeux de rénovation énergétique.

De même, nous saluons la décision des sénateurs de permettre aux maires de déclencher un diagnostic structurel des immeubles en zone d'habitat dégradé.

Parmi les mesures allant dans le bon sens, citons également : le droit de préemption urbain renforcé pour les opérations programmées d'amélioration de l'habitat (Opah), pour les opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod) ainsi que pour les immeubles soumis à un plan de sauvegarde ; la création du régime de concession spécifique ; la possibilité de procéder à la scission ou à la subdivision des copropriétés.

Néanmoins, nous avons des doutes concernant le nouvel emprunt global collectif. S'il constituera un instrument utile pour les copropriétés qui se portent bien, il est à craindre qu'il ne puisse pas être utilisé par les copropriétés dégradées, raison pour laquelle nous avions plaidé pour une garantie publique. Le Gouvernement a fait un pas vers nous en élargissant le champ d'intervention du fonds de garantie de la rénovation énergétique ; reste à savoir quelle enveloppe sera destinée aux besoins des copropriétés car, sans moyens suffisants, le traitement des copropriétés dégradées restera une simple déclaration d'intention.

Nous sommes heureux que la navette parlementaire ait permis de durcir les sanctions contre les marchands de sommeil, qui sont des propriétaires voyous. De même, nous sommes satisfaits des quelques mesures prises en faveur de la rénovation des copropriétés en outre-mer.

Si nous saluons ces avancées, nous ne voulons pas passer sous silence les carences du texte : nous ne pourrons pas faire l'économie d'une loi qui traite de l'habitat dégradé dans les zones rurales. Face à l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN) et à l'interdiction de louer des passoires thermiques, l'élu rural que je suis éprouve quelque inquiétude. En effet, la tension est très forte dans les territoire ruraux ; les habitants peinent à trouver des logements locatifs, ce qui entraîne une perte de compétitivité et des troubles sociaux. Le problème des biens sans maître, en déshérence ou en état d'abandon manifeste doit donc être traité. Nous comprenons les contraintes imposées par la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets –loi « climat et résilience » –, qui a défini l'objectif de zéro artificialisation nette, mais nous devrons être aidés à aller plus loin.

Considérant que le projet de loi va dans le bon sens, les députés du groupe LIOT le voteront.

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