Intervention de Arnaud Gossement

Réunion du jeudi 11 avril 2024 à 10h00
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Arnaud Gossement, avocat :

Le sentiment que la décision est prise avant la concertation découle de la chronologie : l'approbation du contrat de concession, obtenue à la fin de l'année 2022, est intervenue avant l'autorisation environnementale, qui est l'étape clé. Je ne doute pas de la sincérité de ceux qui ont organisé les débats, laquelle transparaît dans les comptes rendus que j'ai pu lire ; en outre, je ne souhaite pas réduire la contestation à quelques personnes car nombreux sont ceux à être légitimement inquiets du changement climatique : je comprends l'anxiété des jeunes sur le sujet, laquelle percute ces projets et notre droit. La légalité d'un projet ne doit pas nous dispenser de réfléchir à la révolution que nous vivons actuellement dans ce domaine.

Oui, des décisions sont prises avant certaines concertations, non par mauvaise foi mais parce que la chronologie le commande. En prévoyant ces consultations en amont non du projet mais de la planification des besoins et du potentiel, le dialogue serait plus fécond. Les citoyens ne se déplacent pas pour participer aux enquêtes publiques sur les plans et les programmes et ne le font pas toujours pour les projets. Il y a lieu de rendre le débat sur la programmation plus attractif : on pourrait élaborer moins de plans mais les concevoir de manière plus panoramique ; il convient d'éviter le raisonnement en silos et la multitude des acteurs dans le schéma intégrateur dont je vous parlais.

Je ne propose pas que l'État procède à l'évaluation : sa réalisation doit rester du ressort du maître d'ouvrage mais de manière déconnectée. Une proposition, dont je ne suis pas à l'origine et qui est discutée depuis des années, vise à transférer le financement de l'évaluation du maître d'ouvrage vers un fonds, un éco-organisme ou une autorité administrative indépendante de l'État, ce dernier restant responsable de l'instruction du projet et de la décision. Le dispositif de l'éolien en mer s'approche d'un tel système ; on peut imaginer qu'une évaluation indépendante des besoins du territoire soit réalisée au stade de la planification par la puissance publique, puis que des personnes privées ou publiques lancent le projet. Il y aura toujours des contestations, mais la présence du maître d'ouvrage réduit le risque d'annulation devant le juge ; le juge administratif est très attentif à l'avis de l'autorité environnementale – si un préfet ne suit pas l'avis de cette dernière ou de ses services, le risque d'annulation est bien plus élevé. Il est possible d'accomplir de grands progrès sur l'évaluation environnementale, mais cela suppose de saisir vos collègues du Parlement européen, lequel s'apprête à être renouvelé.

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