Intervention de Pauline Leddet-Troadec

Réunion du jeudi 11 avril 2024 à 10h00
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Pauline Leddet-Troadec, avocate, présidente du Cercle interprofessionnel du droit de l'environnement :

En pratique – je le constate tous les jours – dès lors qu'un recours a été déposé, la majeure partie du temps, le porteur de projet ne construit pas, car il ne peut obtenir de financement bancaire et se trouve en situation d'insécurité juridique. J'ai plusieurs dossiers en cours dans lesquels le porteur de projet attend l'issue du contentieux pour lancer son projet. Le contentieux est donc une vraie arme des opposants pour gagner du temps.

Cela me ramène à la question de la médiation dans le cadre du référé. À titre personnel, je n'y suis pas favorable. Depuis que la médiation a été instaurée devant les tribunaux administratifs, leurs présidents en collent à tout-va ; du coup, les contentieux durent non plus dix-huit mois, mais deux ans ou deux ans et demi parce que la médiation fait perdre six mois. C'est un outil formidable pour faire perdre du temps à un projet, du moins quand celui-ci n'a pas encore démarré.

La médiation implique qu'il est possible de parvenir à une décision commune, à un compromis. Or, dans le cas de projets comme celui-là, fortement contestés, les opposants veulent l'arrêt pur et simple du projet, non son aménagement, tandis que le porteur de projet, lui, veut mener son projet à bien. J'ai un peu de mal à croire que l'on puisse entraîner tout ce petit monde dans une médiation qui fonctionne. En outre, dans le cadre d'un référé, c'est en trois semaines qu'il faudrait l'organiser : je trouve mon confrère très optimiste.

Pour en revenir aux projets qui se font alors qu'ils ont été déclarés illégaux, j'ose espérer que ce sont des exceptions. Pour être honnête, je ne connais pas très bien les faits dans les deux affaires citées. Quoi qu'il en soit, en vertu de la jurisprudence toute récente du Conseil d'État dont nous avons parlé, dans le cadre d'un référé, l'état d'avancement des travaux – dans le cas d'espèce, il était de 90 % – ne permet pas d'écarter la condition d'urgence requise pour les suspendre. Autrement dit, cette condition doit être examinée même s'il ne reste que 10 % à faire.

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