Intervention de Jean-Marc Offner

Réunion du mardi 16 avril 2024 à 9h30
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Jean-Marc Offner, urbaniste :

La métropolisation, que vous avez précédemment évoquée, me semble représenter le meilleur cadre de référence, et j'estime qu'il peut exister une métropolisation heureuse. Le concept, qui ne se réfère pas à une concentration plus importante, la hiérarchie urbaine découlant de l'existence même des villes, vise à traduire l'idée d'un fonctionnement croissant des territoires en réseaux, à la fois locaux et mondiaux. La métropolisation est en effet fille de la globalisation économique, mais pas seulement, et lorsqu'un étudiant albigeois part faire ses études à Toulouse et revient régulièrement chez lui, cela participe également de la métropolisation. Lorsqu'Angoulême décide de lier son destin à celui de Bordeaux et que des échanges naissent dans les secteurs de la bande dessinée ou du jeu vidéo, il s'agit également d'un processus de métropolisation. Le bassin de vie du quotidien devient ainsi un réseau de vie plus élargi, y compris pour des motifs liés aux loisirs, à la santé ou à la culture, qui ne sont pas de l'ordre du motif quotidien. L'idée qui découle de ce concept de métropolisation est celle de l'émergence d'une interdépendance, et non d'une dépendance, en l'occurrence qu'Albi ou Castres ne dépendent pas de Toulouse, mais que des Toulousains se rendent également à Albi et à Castres. Il est nécessaire que les échanges se produisent dans les deux sens, afin que l'on n'assiste pas à une périurbanisation qui pourrait être problématique du point de vue de la compacité de nos territoires. Les urbanistes rêvent, depuis toujours, à des configurations polycentriques, dans lesquelles les centres sont affirmés et possèdent des configurations spécifiques. Il est complexe de répondre à des questions liées aux infrastructures sans qu'un projet de métropolisation n'existe. Si l'expression de métropolisation heureuse peut prêter à rire, l'interdépendance au sein des territoires est toujours une vertu, l'autarcie et l'entre-soi n'étant pas souhaitables. Cette interdépendance doit néanmoins être structurée, et imaginée en accord avec les dynamiques locales. Quelles sont les ressources d'Albi, au sens économique, culturelle, de formation, comparées à celles de Castres ? Lorsque les universités décident, par exemple, de délocaliser une première année d'étude d'enseignement supérieur, elles ne le font pas systématiquement à Bordeaux, mais parfois à Angoulême. Les interdépendances sont ainsi pensées de façon positive entre une métropole et ses villes alliées.

Si nous sommes globalement conscients des vertus de la réduction du nombre d'infrastructures et de projets d'investissement, notamment au regard de nos engagements liés à la décarbonation, certains investissements d'infrastructures restent utiles, voire nécessaires. L'élément central me semble être le projet de territoire et, en l'occurrence, le projet d'un système territorial articulant Toulouse et les six, sept ou huit villes moyennes qui l'entourent. Ce n'est qu'à partir de là que l'utilité de l'infrastructure nouvelle pourra être déterminée.

Quant à la décision de construire une autoroute au lieu d'élargir la route nationale, l'action publique est malheureusement tributaire de certains dispositifs de financement. Il serait probablement souhaitable d'inventer un financement grâce auquel les autoroutes serviraient également à financer les routes dès lors que les usagers sont aussi des contribuables, afin que l'intérêt collectif national puisse également profiter de ces financements.

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