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La commission examine, pour avis, l'article 1er du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (n° 1346) (Mme Perrine Goulet, rapporteure pour avis)

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Notre commission a décidé de se saisir pour avis de l'article 1er du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, ainsi que du rapport annexé à cet article. Le texte sera examiné au fond par la commission des lois à compter de demain matin.

Dix-sept amendements ont été jugés irrecevables, seize parce qu'ils étaient en dehors du champ de la saisine pour avis, un parce qu'il méconnaissait les exigences de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf).

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L'article 1er du projet d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, dont nous sommes saisis pour avis, définit la trajectoire budgétaire de la mission Justice, à l'exclusion du compte d'affectation spéciale Pensions. Les crédits de cette mission, qui s'élevaient à 8,7 milliards d'euros en 2022, devraient progresser de 21 % et atteindre 10,7 milliards d'euros en 2027. En cumulé, ce sont 7,5 milliards d'euros supplémentaires qui seront alloués au service public de la justice par rapport à 2022. Cette progression est inédite : entre 2007 et 2012, 2 milliards d'euros supplémentaires avaient été alloués au ministère de la justice ; idem entre 2012 et 2017.

Le projet de loi s'inscrit dans la continuité de la précédente période de programmation, qui, quoique sous-exécutée à ses débuts, a fait l'objet d'un important rattrapage en fin de période. Les crédits de la mission Justice ont ainsi progressé de 8 % en 2021, en 2022 et en 2023.

L'essentiel de la hausse du budget du ministère devrait être réalisé en début de programmation. La dotation de la mission Justice augmentera de 500 millions d'euros en 2024 puis de 600 millions d'euros en 2026 avant de stagner. Selon le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), cette trajectoire s'explique à double titre. D'une part, les recrutements du ministère devraient être concentrés en début de période. Le rythme des créations d'emplois s'élèverait ainsi à 1 900 en moyenne en 2024 et 2025, contre 1 600 en 2026 et 2027. D'autre part, la majorité des investissements immobiliers et numériques du ministère ont été lancés entre les années 2018 et 2022 et devraient atteindre un pic en 2025.

L'article 1er du projet de loi définit à grand trait le schéma d'emplois prévisionnel de la mission Justice. Le texte déposé par le Gouvernement prévoyait la création de 10 000 emplois, dont 1 500 de magistrats et 1 500 de greffiers. Ces objectifs de recrutements sont particulièrement ambitieux, car ils représentent environ 10 % des effectifs actuels du ministère. À l'initiative des rapporteures du Sénat, ce schéma d'emplois a été modifié sur trois points, mais je proposerai un amendement visant à revenir à la version initiale.

La programmation que nous examinons appelle plusieurs commentaires.

Les besoins financiers du ministère ont été définis à partir des constats et recommandations formulés par le comité des états généraux de la justice. J'espère que nous tomberons d'accord pour considérer que les moyens supplémentaires que le Gouvernement entend allouer au service public de la justice sont non seulement nécessaires, mais aussi à la hauteur des enjeux.

Les crédits alloués au ministère serviront à financer ses orientations stratégiques, détaillées dans le rapport annexé. Elles visent avant tout à réduire les délais de jugement, renforcer l'attractivité des métiers du ministère, du côté judiciaire comme du côté pénitentiaire, accélérer sa transformation numérique et offrir des conditions dignes de détention. À l'initiative du Gouvernement, le rapport annexé a également été enrichi d'une partie portant sur l'institutionnalisation des pôles spécialisés en matière de lutte contre les violences intrafamiliales au sein des tribunaux.

Je partage ces ambitions. Je proposerai toutefois d'en préciser certaines par voie d'amendement, notamment afin d'assurer une protection plus effective des intérêts des enfants.

Deux risques principaux d'exécution peuvent toutefois être identifiés. Le premier, également souligné par le HCFP, porte sur les difficultés de recrutement que rencontre l'ensemble de la fonction publique, et plus particulièrement le ministère de la justice. Le déficit d'attractivité des métiers de la justice pourrait ainsi conduire à une sous-exécution du schéma d'emplois, ce qui remettrait en cause les objectifs détaillés dans le rapport annexé. Toutefois, de nombreuses mesures sont prises pour pallier ces difficultés, notamment la revalorisation de la rémunération des magistrats et des greffiers, ainsi que la requalification des personnels de surveillance pénitentiaire en catégorie B.

Le second risque concerne le contexte inflationniste, qui pourrait conduire à des surconsommations de crédits s'agissant des dépenses immobilières de la mission. Il nous faut être attentifs aux effets produits par la hausse des prix.

Par ailleurs, je regrette que les dispositions de l'article 1er ne soient pas suffisamment précises. J'estime que la programmation du ministère devrait être ventilée en fonction des différents programmes de la mission, afin que nous puissions nous prononcer sur la répartition des moyens qui lui seront alloués. De même, en dehors des recrutements de magistrats, de greffiers et de conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation (CPIP), nous ne disposons pas beaucoup d'informations sur la répartition des 10 000 emplois qui seront créés en cinq ans.

Le projet de loi avait initialement pour objectif d'offrir au ministère de la flexibilité pour ajuster l'allocation des moyens au plus près des besoins. Je pense néanmoins qu'à l'instar de ce qui avait été retenu dans le cadre de la loi de programmation pour 2018-2022, des précisions auraient pu au moins être apportées dans le rapport annexé. J'espère les obtenir pour la semaine prochaine.

Je vous propose d'adopter l'article 1er et, par voie de conséquence, d'approuver le rapport annexé.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Ce projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice pour 2023-2027, couplé d'un volet organique examiné en commission des lois, matérialise l'engagement fort du Président de la République en vue de rendre la justice plus proche des citoyens, plus accessible et plus efficace, afin de tourner définitivement la page du « délabrement de la justice ». Il résulte d'une concertation très large, lancée à l'occasion des états généraux de la justice.

L'article 1er que nous examinons pour avis propose d'entériner une hausse inédite des crédits alloués à la mission Justice, qui atteindront près de 11 milliards d'euros en 2027. Sur l'ensemble du quinquennat, les crédits augmenteront de près de 7,5 milliards d'euros.

Cette hausse massive vise quatre objectifs. Premièrement, le recrutement de 10 000 personnels supplémentaires, dont 1 500 magistrats et autant de greffiers. Deuxièmement, l'entretien, la rénovation et la construction d'immobilier judiciaire et pénitentiaire, comportant la construction de places supplémentaires de prison. Troisièmement, la modernisation des outils numériques du ministère. Enfin, la revalorisation des salaires et des carrières des agents du ministère, annoncée par le garde des sceaux à l'École nationale d'administration pénitentiaire (ENAP) d'Agen, dans ma circonscription.

Ces objectifs permettront à terme de répondre aux demandes exprimées lors des états généraux de la justice et par nos concitoyens dans nos circonscriptions. C'est pourquoi les députés du groupe Renaissance voteront en faveur de ce texte et appellent à la responsabilité des autres groupes pour qu'ils fassent de même.

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Je suis prêt à souscrire à une partie de votre argumentation, madame la rapporteure pour avis, mais je trouve votre conclusion problématique. Vous le notez vous-même : nous ne disposons d'aucun détail. On nous dit que les crédits augmenteront de 7,5 milliards, un chiffre presque rond, mais pour faire quoi ? Quels programmes, quelles actions en bénéficieront ? J'imaginais qu'à la commission des finances, on s'intéressait davantage à ces questions qu'à la commission des lois ! J'ai interpellé le ministre sur le sujet lors de son audition la semaine dernière et je n'ai eu aucune espèce de réponse. Pour m'être battu ardemment en commission des lois pour obtenir, pour le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), un détail similaire à celui que vous réclamez, j'imagine que tant que vous ne l'aurez pas obtenu, vous ne voterez pas pour cette programmation budgétaire… Ce n'est pas sérieux – or, à vous en croire, vous êtes les représentants du sérieux dans cette auguste assemblée.

De surcroît, l'essentiel de la programmation devrait servir à construire de nouvelles places de prison. Mon groupe y est opposé, mais vous qui y êtes favorables, vous devriez demander des détails. Le tableau budgétaire tient en une seule ligne – ils ne se sont pas foulés ! Quant au rapport annexé, il est extrêmement vague.

Je vous invite donc à voter contre l'article 1er afin que le ministre nous fournisse les détails demandés avant le vote en première lecture à l'Assemblée. Il est quand même étrange que les sénateurs n'aient pas eu besoin de ces éléments pour se prononcer…

Quoi qu'il en soit, il faudrait plus de crédits pour atteindre l'objectif, qui n'est pas complètement dingue, d'être au niveau de la moyenne européenne. On est loin du compte.

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Effectivement, le texte que nous examinons n'est de toute évidence pas un texte budgétaire… L'article 1er est pour le moins lacunaire. Seuls sont mentionnés les crédits de paiement ; nous ne savons rien des autorisations d'engagement. Or, si l'on veut évaluer une politique ministérielle, il faut bien travailler sur les deux, d'autant plus qu'il s'agit là d'investissements immobiliers. Il s'agit plutôt d'un article de communication gouvernementale.

Quand on y regarde de plus près, on s'aperçoit qu'on peut douter de tout ce qui est indiqué, y compris du point de vue quantitatif. Dans sa dernière note, la contrôleuse budgétaire et comptable ministérielle (CBCM) formule d'ailleurs plusieurs alertes. Elle signale que certains accroissements budgétaires sont en réalité liés à l'inflation et à l'augmentation du coût d'investissements à venir. On est donc en droit de se demander à quoi correspondent exactement les hausses inscrites. On en vient même à douter de la sincérité d'un tel tableau.

Je suis, pour ma part, extrêmement réservé sur cet article, qui concerne la commission des lois plutôt que celle des finances. Ce n'est pas sérieux. Nous devrions le rejeter.

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Avec les états généraux de la justice, lancés chez moi, à Poitiers, dans la Vienne, en octobre 2021, un constat clair a été posé : notre justice est complexe, lente, parfois illisible. Le texte dont nous sommes saisis pour avis vise à répondre aux préoccupations des 73 % de Français qui pensaient, en 2022, que la justice fonctionnait mal.

L'article 1er fixe une trajectoire à la hauteur de cette ambition. La progression de 21,3 % des crédits à l'horizon 2027 portera les efforts de la majorité à une augmentation de 60 % du budget de la justice en dix ans. Il s'agit d'un effort historique contre la surpopulation carcérale, pour la diminution des délais de traitement des affaires, en particulier en matière pénale, pour une meilleure justice et pour une meilleure réinsertion des personnes placées sous main de justice. Évidemment, notre système judiciaire ne serait rien sans les professionnels qui le font vivre au quotidien ; leur nombre sera ainsi augmenté progressivement d'ici à 2027 dans toutes les professions : au total, 10 000 personnes supplémentaires, dont 1 500 magistrats, 1 800 greffiers et 600 conseillers d'insertion et de probation. Nous souhaiterions néanmoins une meilleure ventilation et lisibilité des différentes lignes budgétaires.

Je remercie la rapporteure pour avis qui, conformément à son engagement sans faille pour les droits des enfants, a mis l'accent sur la présence de l'avocat auprès de l'enfant en assistance éducative. Le groupe Démocrate votera bien évidemment en faveur de l'article 1er et du rapport annexé.

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De 2023 à 2027, les crédits progresseront de 21 % – à comparer aux 32 % de la précédente période de programmation. Nous resterons vigilants concernant leur mise en œuvre parce que nous ne connaissons que trop bien la propension du Gouvernement à ouvrir beaucoup de crédits, en mettant en avant sa générosité, puis à ne pas les dépenser, à les annuler ou à les reporter, en se félicitant de sa bonne gestion.

Le Gouvernement prévoit la création de 10 000 emplois, dont 1 500 de magistrats et autant de greffiers, ainsi qu'un nombre indéterminé d'assistants de magistrat, de personnels pour la justice de proximité, de personnels pénitentiaires et de conseillers de probation et d'insertion. Si nous saluons ces créations de postes, rappelons que nous les réclamons depuis longtemps. Surtout, sans revalorisation et sans amélioration de l'attractivité des métiers, vous pouvez ouvrir des centaines de milliers de postes, ça n'engage pas à grand-chose…

Nous saluons l'institutionnalisation des pôles de lutte contre les violences intrafamiliales, mesure que nous défendions de longue date.

Néanmoins, si cet article 1er est alléchant, nous ne sommes pas dupes. Il s'agit d'un appât. Nous n'ignorons pas ce que contient le reste du texte en matière de perquisitions de nuit ou d'activation à distance des appareils électroniques à des fins de surveillance. C'est pourquoi nous serons extrêmement vigilants.

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Le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice prévoit un renforcement sans précédent des moyens financiers du ministère. Le budget de la justice s'élèvera à 10,8 milliards d'euros d'ici à quatre ans, soit une hausse de plus de 20 % au cours du quinquennat. Cette augmentation substantielle s'ajoute à celle de plus de 30 % enregistrée au cours de la précédente législature – pour mémoire, le budget de la justice a atteint 9,6 milliards en 2023, grâce à trois hausses successives de 8 % en 2021, 2022 et 2023.

Ces chiffres témoignent de l'investissement massif en faveur d'une justice qui fut malheureusement le parent pauvre des politiques publiques durant trop d'années. Le retard à rattraper est colossal. Cela prendra du temps mais nous nous donnons avec ce texte les moyens d'y parvenir.

L'accroissement des crédits alloués à la justice permettra de renforcer notamment les moyens humains dont nous manquons, avec la création en cinq ans de près de 10 000 emplois, dont 1 500 de magistrats – autant qu'au cours des vingt dernières années –, 1 500 de greffiers, ainsi que le recrutement de nouveaux attachés de justice et de surveillants pénitentiaires adjoints, et cela alors que cette activité souffre d'un cruel déficit d'attractivité. Les crédits supplémentaires permettront également de financer la création de 15 000 places de prison.

Toutes ces mesures vont dans le bon sens et sont attendues par nos concitoyens. Les députés du groupe Horizons et apparentés soutiendront le projet de loi.

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Le constat formulé lors des états généraux de la justice montre que l'institution judiciaire est au bord de la rupture. Dans l'introduction du rapport Sauvé, il était noté qu'elle se portait mal. Tous les professionnels qui concourent au quotidien à son fonctionnement font part de leur profond malaise. Les justiciables ne lui accordent qu'un crédit limité. L'institution paraît grippée. Pour beaucoup, elle serait en lambeaux.

Voilà un lourd défi politique à relever, en raison de « décennies de politiques publiques défaillantes », pour reprendre les termes du comité des états généraux de la justice. Face à cette crise, 3 000 magistrats, greffiers et auditeurs de justice dénonçaient, dans une tribune publiée en novembre 2021, l'approche gestionnaire de la justice et soulignaient la discordance entre la volonté de rendre une justice de qualité et la réalité du quotidien. Le 14 février, j'avais moi-même interpellé le garde des sceaux au moyen d'une question écrite sur la situation très dégradée du tribunal judiciaire de Toulouse, du point de vue tant des effectifs que des moyens. Je n'ai pas reçu de réponse à ce jour. Ce qui m'a été rapporté par les magistrats et par les greffiers, c'est que le tribunal est désormais contraint de prioriser les contentieux, d'appliquer un traitement différencié entre les justiciables, d'abandonner certaines de ses missions et de reporter des audiences faute de magistrats. La paralysie contrainte de certains services et les délais de traitement des dossiers confinent au déni de justice dans la mesure où ils sont incompatibles avec les principes du droit au procès équitable et de l'accès aux juges tels que définis par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le présent texte prévoit un renforcement des moyens de la justice, mais ceux-ci restent largement en dessous de la moyenne européenne, les nombreuses années de sous-budgétisation n'étant pas totalement rattrapées. L'article 1er prévoit la création nette de 9 395 équivalents temps plein (ETP) d'ici à 2027, dont 1 500 magistrats, 1 800 greffiers et 600 conseillers de probation et d'insertion. Nous pensons nécessaire de sanctuariser l'augmentation des moyens des programmes Justice judiciaire et Protection judiciaire de la jeunesse, qui nécessitent des moyens humains, et pas uniquement ceux du programme Administration pénitentiaire, à travers la création de places en détention et la protection des murs de prison. En matière de justice, ce qui compte, c'est la prévention.

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Cela a été dit, les moyens par habitant que l'État français accorde à sa justice sont, grosso modo, moitié moindre de ce qu'ils sont dans les autres grandes démocraties. Il est d'ailleurs étonnant que, dans ces conditions, notre justice ne se soit pas complètement effondrée ! Pourtant, elle fonctionne encore, en dépit de délais de jugement extrêmement longs.

Ce texte va donc dans le bon sens, même si nous émettons beaucoup de réserves à son sujet. Plusieurs collègues, y compris de la minorité présidentielle, ont évoqué le problème des recrutements et de la gestion du corps judiciaire : ce n'est pas tout d'ouvrir des postes, encore faut-il les pourvoir. L'École nationale de la magistrature (ENM) a des capacités de formation qui ne sont pas illimitées.

Autre problème : les prisons. Notre collègue Hetzel a récemment remis un rapport sur la planification de la construction des prisons : on voit bien que, du fait de nos procédures, c'est toujours plus long qu'on ne croit. Vu la surpopulation carcérale, certains magistrats préfèrent ne pas prononcer de peines privatives de liberté, dont quelque 10 % ne sont pas exécutées faute de place. On ridiculise la magistrature.

Il reste donc beaucoup à faire. Il est toutefois notable que les efforts seront réalisés au cours des premières années – alors qu'en général, on commence plutôt petitement.

Pour ces raisons, notre groupe votera en faveur de ce texte.

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Notre justice est malade. Des criminels sont en liberté parce qu'elle n'a pas les moyens de faire convenablement son travail. Hier, à Villers-Cotterêts, dans ma circonscription, se tenait le procès d'un homme qui avait agressé violemment un couple. Ils étaient plusieurs à les avoir roués de coups – la femme s'est retrouvée avec le bras cassé. Un seul d'entre eux a été interpellé. Bien que multirécidiviste, il n'a écopé que de quatorze mois de prison, dont huit avec sursis. Il va effectuer sa peine sous bracelet électronique.

De qui a-t-on besoin ? De magistrats ou de bijoutiers ? Si c'est pour donner des bracelets à tout le monde, inutile de créer des places en prison !

Le couple a été obligé de déménager à 25 kilomètres de son domicile par peur des représailles. Les délinquants et les criminels agissent en toute impunité, ils reviennent sur le terrain de leurs forfaits parce que la justice n'est pas capable de faire son travail dans de bonnes conditions, parce qu'on manque de prisons et de magistrats.

Vous proposez la création de 1 500 postes de magistrat supplémentaires, mais le chiffrage est trop imprécis. Nous n'avons connaissance que des crédits de paiement, pas des autorisations d'engagement. Nous ne connaissons pas l'impact de l'inflation. Il faudrait que la commission des finances en sache davantage sur ces points. Nous voterons contre le texte.

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Trois réactions rapides à ce qui vient d'être dit.

Premièrement, il s'agit d'un projet de loi de programmation du ministère de la justice, et en aucun cas d'un projet de loi de finances. Il n'a pas à entrer dans le même niveau de détails ; il fixe un cadre, une cible et des objectifs, en laissant beaucoup de liberté aux acteurs de la justice pour programmer les embauches et les investissements immobiliers. Évidemment, seule l'autorisation annuelle fera foi.

Deuxièmement, je vous confirme, monsieur Bernalicis, que nous sommes la majorité du sérieux budgétaire. Nous maîtrisons la trajectoire des dépenses publiques, ce qui ne nous empêche pas de fixer des priorités – et la justice en est une. C'est pourquoi nous aurons augmenté ses crédits de quelque 60 % entre 2017 et 2027 ; nous avons déjà fait plus de la moitié du chemin.

Troisièmement, j'invite les collègues qui sont venus à cette réunion « les mains dans les poches » à lire en détail les travaux réalisés dans le cadre du Printemps de l'évaluation. Nous avons eu en particulier une discussion extrêmement détaillée avec le ministre sur les 15 000 nouvelles places de prison.

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Voici les réponses que le ministère m'a données. S'il n'y a pas plus de précisions, c'est tout simplement parce qu'il s'agit de programmation, et que, notamment pour l'immobilier, en particulier celui destiné à l'administration pénitentiaire, il peut y avoir des retards. Et si l'immobilier prend du retard, on ne va pas recruter tout de suite. Un encadrement année par année risquerait d'être trop contraignant.

Toutefois, comme la commission des finances a besoin d'un minimum d'informations, je soutiendrai l'amendement de Mme Untermaier visant à demander un rapport d'exécution annuel, en précisant que ce rapport devra être rendu avant le 30 avril, afin que nous puissions suivre la mise en œuvre de la loi de programmation dans le cadre du Printemps de l'évaluation.

La commission en vient à l'examen de l'article 1er du projet de loi dont elle s'est saisie pour avis.

TITRE IER OBJECTIFS ET MOYENS DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE

Article 1er : Programmation financière et approbation du rapport annexé

Amendement CF29 de Mme Andrée Taurinya.

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Quitte à avoir un article absolument pas détaillé et qui n'engage à rien, autant le supprimer ! Cela laissera encore plus de liberté au ministre pour faire tout ce qu'il veut dans les projets annuels de performances (PAP).

Plus sérieusement, le détail, nous avons réussi à l'obtenir pour le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur. Si on ne l'a pas, on ne peut pas faire de suivi ! Cela nous éviterait de nous retrouver dans la même situation que pour la précédente loi de programmation : dès la première année, on avait observé un décrochement par rapport aux engagements pris.

Connaître la ventilation des crédits est une exigence. L'augmentation va-t-elle être au seul bénéfice de l'administration pénitentiaire, pour la construction de places de prison, ou en restera-t-il un peu pour les tribunaux ? Quid de l'aide juridictionnelle ? On parle vaguement d'une revalorisation des unités de valeur (UV), mais rien de plus.

J'imaginais que la commission des finances ferait preuve d'un peu plus de rigueur.

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L'amendement vise à supprimer l'alinéa 1, c'est-à-dire le rapport annexé. Or vous réclamez parallèlement plus d'informations concernant la ventilation des crédits par programmes et par actions. Si l'on supprime le rapport annexé, nous ne disposerons plus d'aucun élément. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

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Le Gouvernement nous présente un texte brouillon, imprécis, inachevé. Qui donc vient les mains dans les poches, monsieur le rapporteur général ?

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Il s'agit d'un projet de loi de programmation, qui fixe un cadre budgétaire. Sur la durée, il risque d'y avoir des ajustements importants, notamment en matière immobilière. En revanche, d'autres mesures sont précisées, par exemple le nombre de magistrats et de greffiers qui seront embauchés pour faire mieux fonctionner la justice, ou l'élargissement et la simplification des voies de recrutement des magistrats. Supprimer le rapport annexé qui comprend toutes ces précisions me paraît contreproductif.

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Monsieur Bernalicis, la critique portant sur le sérieux budgétaire peut éventuellement être appliquée au Gouvernement, mais ne préjugez pas de ce que va dire la commission des finances, je vous prie.

La commission rejette l'amendement CF29.

Amendements CF3 de M. Philippe Schreck, CF31 de Mme Andrée Taurinya, CF32 et CF36 de M. Ugo Bernalicis, CF35 de Mme Andrée Taurinya, CF34 de M. Ugo Bernalicis et CF33 de Mme Andrée Taurinya (discussion commune).

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Nous demandons, dans la même logique, la suppression des alinéas 2 à 5.

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L'amendement CF31 vise à augmenter les crédits destinés au placement à l'extérieur, qui est à la fois un aménagement de peine et une mesure alternative à l'incarcération. Ce dispositif, qui a fait ses preuves en matière de prévention de la récidive, objectif que nous devons toutes et tous partager, me semble-t-il, repose essentiellement sur des associations, comptant des bénévoles mais aussi des salariés, qui ont besoin d'une visibilité et de moyens pour assurer leur mission de service public, dans l'intérêt de la justice et du pays tout entier.

L'amendement suivant, qui tend aussi à augmenter les crédits, est centré sur le prix de journée dans le cadre du placement à l'extérieur. Le ministère s'est engagé à ce sujet, mais nous voulons nous assurer que la programmation budgétaire correspondante est bien prévue.

L'amendement CF36 a pour objet d'augmenter la ligne budgétaire servant à financer l'aide juridictionnelle (AJ), pour que les avocats bénéficient d'une meilleure rémunération, grâce à l'augmentation du montant des UV, et dans l'intérêt des justiciables. Pour toucher l'aide juridictionnelle à 100 %, ces derniers doivent avoir un revenu inférieur au seuil de pauvreté ; si on gagne simplement moins que le SMIC, le taux de prise en charge n'est que de 50 %. Nous devons être mesure de relever les seuils.

L'amendement CF35 concerne la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Le texte est particulièrement silencieux en la matière, hormis pour ce qui est de la volonté de continuer à construire des centres éducatifs fermés, alors que ces derniers n'ont pas fait leurs preuves et qu'il s'agissait déjà d'une promesse du précédent plan de programmation. Je pensais il y a deux ans que la justice était réparée, car j'avais entendu le ministre l'expliquer à la radio, mais ce n'est finalement pas complètement le cas !

L'amendement CF34 a un écho dans l'actualité, à travers le travail mené par le parquet national financier (PNF) en matière de lutte contre la délinquance économique et financière. Les rapports successifs ont montré qu'il y avait un angle mort, du point de vue des moyens dont disposent tant le ministère de la justice, du côté du PNF, que le ministère de l'intérieur – on l'a vu avec la Lopmi, rien n'a progressé de ce côté. Nous espérons que le nombre de magistrats affectés au PNF correspondra à ce qui était prévu, dans l'étude d'impact, au moment de sa création – il ne devrait pas y avoir plus d'une douzaine d'affaires par magistrat, alors qu'on est plutôt autour d'une quarantaine et que les affaires traitées sont extrêmement complexes. Si on est un partisan de la lutte contre la corruption, il faut s'en donner les moyens, ce qui ne représente pas grand-chose sur 7,5 milliards d'euros.

Enfin, l'amendement CF33 correspond budgétairement au transfert pur et simple de la police judiciaire du ministère de l'intérieur à celui de la justice, de sorte que la séparation des pouvoirs soit garantie et que les magistrats puissent avoir à leur disposition les enquêteurs dont ils ont besoin, au lieu d'être soumis à des impératifs venant de la hiérarchie du ministère de l'intérieur et de son ministre. En théorie, la politique pénale est conduite par le garde des sceaux ; encore faudrait-il qu'il en ait les moyens.

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C'est un amendement d'appel que vous avez défendu, monsieur Dessigny. Vous n'êtes pas contre les alinéas que vous proposez de supprimer, puisque vous souhaitez les replacer ailleurs, par un autre amendement.

Monsieur Bernalicis, je crois que vous vous êtes trompé s'agissant de votre premier amendement : il vise en réalité à recruter 13 000 magistrats en cinq ans. Cela reviendrait à plus que doubler les chiffres – nous avons actuellement 8 636 magistrats –, ce qui n'est pas forcément ce qui est attendu, je l'ai constaté sur le terrain, même si une hausse est souhaitée. Par ailleurs, l'École nationale de la magistrature n'aurait pas la capacité de former autant de magistrats en aussi peu de temps. Avis, donc, défavorable.

Même avis en ce qui concerne l'amendement relatif au placement à l'extérieur, dont vous proposez de multiplier par quatre l'enveloppe. Je ne vois pas comment les associations pourraient suivre.

Le budget de l'accès au droit et à la justice, objet de l'amendement CF36, augmentera de 40,9 millions d'euros entre 2023 et 2025, comme l'indique le PAP publié cette année. Nous avons déjà toutes les informations pour cette période – la seule différence étant que le PAP présente les crédits de la mission en intégrant le CAS Pensions. Comme il y aura déjà une augmentation, je suis également défavorable à cet amendement.

Pour ce qui est de la prise en charge des mineurs délinquants, je pense, contrairement à vous, que nous avons besoin des centres éducatifs fermés, de même que de la prise en charge en milieu ouvert – il ne faut pas les opposer. Même avis défavorable.

En dernier lieu, les effectifs du parquet national financier augmentent continuellement. Alors qu'il était doté de dix magistrats en 2014, il en compte dorénavant dix-neuf, et un vingtième sera nommé en septembre. De plus, l'activité du PNF ne repose pas que sur des magistrats : sept assistants spécialisés, un juriste assistant et un assistant de justice leur apportent leur concours, et il y a également quatorze personnels de greffe. Le PNF monte en charge. Je suis donc défavorable à votre amendement.

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Je tiens à souligner la contradiction dans laquelle se trouvent le Rassemblement national et la France insoumise, qui appellent manifestement de leurs vœux un renforcement des moyens de la justice tout en s'apprêtant à s'opposer à ce texte. On peut avoir des divergences sur les moyens qu'il faudrait renforcer et sur le rythme à suivre, mais je ne comprends pas pourquoi vous vous opposez à ce texte.

J'ajoute que la précédente loi de programmation de la justice a été respectée, ce qui est un gage de confiance. Elle prévoyait 38,3 milliards d'euros de crédits, et l'exécution s'élève à 38,4 milliards – il y a même eu un excédent de 100 millions d'euros.

Qu'ont fait nos collègues socialistes entre 2012 et 2017 pour augmenter les moyens de la justice ? Il est beaucoup trop facile de déplorer les conséquences dont on chérit les causes.

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Vous avez peut-être raté, cher collègue, l'examen du rapport annuel de performances (RAP) de la justice pour 2022 : il pointait notamment une sous-exécution de 1 151 équivalents temps plein travaillé.

Le nombre de 13 000 magistrats supplémentaires est celui qu'un des syndicats concernés considère comme correspondant à la situation idéale, compte tenu du volume de contentieux, pour que chacun puisse faire son travail. Je suis d'accord avec vous, l'ENM n'est pas en mesure d'accueillir autant de magistrats à l'instant « t », mais ce n'est pas davantage vrai pour les 1 500 magistrats supplémentaires prévus par le Gouvernement. Vous n'avez pas creusé cette question. Le reste du projet de loi ordinaire et le projet de loi organique concernent d'ailleurs des magistrats à titre temporaire, des magistrats honoraires et des voies de recrutement parallèles. Il ne s'agit pas de recrutements de magistrats dans le cadre de l'ENM, avec une formation de trente et un mois pour les auditeurs de justice, comme c'est le cas aujourd'hui. C'est bien dommage : j'aurais aimé qu'il y ait une vraie programmation, mais les projets de loi sont plutôt taiseux sur ce point.

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J'ai posé la question. On forme d'habitude entre 180 et 230 magistrats par an. La volonté actuelle est d'aller au moins jusqu'à 230, voire d'en former 100 de plus. On sait que c'est tenable : on peut former jusqu'à 350 magistrats par an. La trajectoire visant à créer 1 500 emplois de magistrats sur cinq ans correspond donc à ce qui est absorbable par l'ENM.

La commission rejette successivement les amendements CF3, CF31, CF32, CF36, CF35, CF34 et CF33.

Amendements CF62 de Mme Perrine Goulet et CF37 de M. Charles de Courson (discussion commune).

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Mon amendement vise à rétablir la rédaction initiale de l'alinéa 4, qui fixait un objectif plancher de 1 500 magistrats et de 1 500 greffiers supplémentaires, y compris 605 équivalents temps plein recrutés au titre de la justice de proximité.

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Tout le monde sait que les lois de programmation ont pour limite le vote des lois de finances successives. Il n'est pas rare, pour le dire gentiment, que l'État n'atteigne pas les objectifs qu'il se fixe en loi de finances ou en loi de programmation. Mon amendement est donc un peu symbolique : c'est une précision rédactionnelle visant à s'assurer que l'objectif de recrutement est un plancher.

Je souligne aussi que le recrutement de 1 500 magistrats sur les cinq ans qui viennent représente 300 personnes à former par an. Notre rapporteure pour avis a dit que c'était limite, compte tenu des capacités de l'ENM.

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Votre amendement va dans le même sens que le mien, auquel je vous invite à vous rallier : il s'agira d'un plancher.

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Je me range à votre avis, pour vous faire plaisir, mais vous insérez par votre amendement, si je peux me permettre de le faire remarquer, des précisions qui figurent déjà à l'alinéa 53 du rapport annexé.

L'amendement CF37 est retiré.

La commission adopte l'amendement CF62 (CL956).

Amendement CF11 de Mme Cécile Untermaier.

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Cet amendement vise à créer un comité de suivi parlementaire, comptant des représentants de tous les groupes, au sujet de la mise en œuvre de la loi de programmation.

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Même si cette idée paraît intéressante, j'y vois quelques inconvénients. Un comité de suivi peut être organisé sans intervention du législateur. Ensuite, les autres lois de programmation que nous avons adoptées ces derniers temps ne prévoient pas de tels comités. Le ministre aura, bien entendu, l'occasion d'informer le Parlement de la mise en œuvre de la loi chaque année, lorsque la commission des lois et la commission des finances examineront le projet de loi de finances. Je vous propose donc de retirer cet amendement ; à défaut, avis défavorable.

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Je ne suis pas très favorable, moi non plus, à cet amendement. En multipliant les structures, surtout pour ce qui relève du travail parlementaire, en particulier celui des commissions, la nôtre comme celle des lois, on risque en réalité de passer sous silence la question de la bonne application ou non de la future loi de programmation. L'enfer est toujours pavé de bonnes intentions. La tendance doit, désormais, être de rationaliser au maximum les structures : nous ne pouvons plus nous permettre le luxe, en matière de temps comme en matière de moyens, de les multiplier pour nous donner bonne conscience.

La commission rejette l'amendement CF11.

Amendement CF5 de M. Philippe Schreck.

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Nous demandons au Gouvernement de remettre chaque année, concomitamment au dépôt du projet de loi de finances, un rapport présentant l'impact de l'inflation sur les crédits proposés. Nous suivrons ainsi une préconisation du Haut Conseil des finances publiques.

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Nous devrons effectivement être attentifs aux effets de l'inflation sur la loi d'orientation et de programmation, mais nous disposerons déjà de rapports annuels qui permettront d'être informés sur ce sujet. Celui que proposez serait redondant avec ce qui nous est fourni chaque année, notamment dans le RAP, et avec le travail mené par notre rapporteur spécial pour la mission Justice. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

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J'appelle l'attention de nos collègues : dans un des tableaux figurant dans le rapport annexé, il est prévu entre 2025 et 2026 une augmentation de seulement de 10 millions d'euros. On passerait, en effet, de 10,681 milliards d'euros à 10,691 milliards, alors que nous avons connu des augmentations de 7 % ou 8 %. J'espère donc, pour le sérieux de vos prévisions, qu'il n'y aura ni inflation, ni augmentation de la valeur du point d'indice, ni perturbation en général. J'ai l'impression qu'on a cherché à faire en sorte d'arriver à 7,5 milliards d'euros de plus, pile, compte tenu de ce qui a déjà été engagé, pour des raisons de communication, comme l'a dit le collègue Hetzel.

La commission rejette l'amendement CF5.

Amendement CF27 de M. Jocelyn Dessigny.

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Cet amendement s'inscrit également dans la continuité des recommandations du Haut Conseil des finances publiques. Il serait utile que le Parlement sache ce que prévoit le Gouvernement dans l'hypothèse d'un contexte durablement inflationniste, qui aurait une incidence forte et directe sur la présente loi de programmation en ce que cela nécessiterait d'importants crédits supplémentaires.

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Nous avons déjà tous ces éléments dans les documents budgétaires annuels : ce serait redondant. Je vous propose donc de retirer cet amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.

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Comme l'a dit M. Bernalicis, la construction de la trajectoire budgétaire conduit à s'interroger. Il y a, certes, des objectifs à court terme et d'autres à moyen terme, mais aussi beaucoup aussi de marketing politique. Cette hausse de simplement 10 millions d'euros entre 2025 et 2026 ne tiendra pas, on le sait déjà. Vous voulez afficher de très forts recrutements dans les premières années tout en restant dans les clous des 3 % de déficit, pour Bruxelles, d'ici à la fin du quinquennat. Tous les commissaires des finances que nous sommes mesurent l'incohérence de la trajectoire prévue et l'impossibilité de la suivre. Tout cela est marqué du sceau de la communication politique et manque un peu de sérieux du point de vue de la justice comme du point de vue financier.

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Je l'ai signalé au début de cette réunion, il y a quelque chose d'étrange dans cette programmation budgétaire : la hausse des crédits serait de 10 millions d'euros en 2026 et de 57 millions en 2027 ; or je crois me souvenir que dans le projet de loi de programmation des finances publiques qui a été rejeté on espérait revenir à une inflation de 2 % ou 2,5 %, ce qui représenterait en l'espèce 250 millions d'euros.

Bref, c'est un peu bizarre : on ferait des efforts considérables en 2023, avec une augmentation de 717 millions, qui a déjà été votée, en 2024, à hauteur de 502 millions, et en 2025 – la hausse serait alors de 600 millions –, puis les augmentations plongeraient, les montants passant à seulement 10 millions puis 57 millions. Mais notre rapporteure pour avis aura peut-être des explications à nous donner…

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Une grande partie des crédits prévus pour 2024 et 2025 sont liés au schéma immobilier : de gros investissements auront alors lieu, mais ils ne se reproduiront pas les années suivantes. Par ailleurs, je peux vous rassurer, les effectifs continueront bien à progresser au-delà de l'année 2025.

La commission rejette l'amendement CF27.

Amendement CF10 de Mme Cécile Untermaier et sous-amendement CF63 de Mme Perrine Goulet.

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L'amendement demande un rapport du Gouvernement au sujet de la mise en œuvre de la loi de programmation. J'ai cru comprendre tout à l'heure que Mme la rapporteure pour avis y était favorable, et je l'en remercie.

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Pour que ce rapport soit efficace et qu'il arrive au bon moment, je propose de préciser qu'il doit être remis au plus tard le 30 avril, ce qui correspondra au Printemps de l'évaluation et permettra donc de faire un véritable suivi. Sans date butoir, il est toujours compliqué de réclamer un rapport. Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement, j'émets un avis favorable.

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Je pensais qu'on pouvait avoir ce genre de détails dans les rapports annuels de performances. Dès lors, pourquoi demander un rapport supplémentaire ? Je ne fais que reprendre votre argumentaire concernant l'amendement précédent, madame la rapporteure pour avis. On n'y comprend plus rien à la fin : quelle logique suivez-vous ? Cela dit, je suis pour qu'on ait un maximum d'informations – un rapport supplémentaire m'irait donc très bien.

La commission adopte successivement le sous-amendement CF63 et l'amendement CF10 sous-amendé (CL957).

Amendement CF28 de M. Jocelyn Dessigny.

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Cet amendement s'inscrit aussi dans le prolongement des recommandations du Haut Conseil des finances publiques. Au vu des difficultés de recrutement qui affectent la fonction publique, dans l'ensemble des métiers et du territoire, ce qui fait peser un risque sur l'exécution du schéma d'emplois prévisionnel, le Parlement a besoin de connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre. Tel est le sens de cet amendement.

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La remise d'un rapport dès la promulgation de la loi ne me paraît pas forcément une solution pertinente. Par ailleurs, le rapport annexé comporte une batterie de nouvelles mesures pour rendre plus attractifs ces emplois. La revalorisation prévue pour les magistrats au mois d'octobre de cette année devrait également y concourir. Votre demande me paraît donc déjà satisfaite, et vous pourrez demander davantage d'éléments au garde des sceaux en séance. Je vous propose de retirer cet amendement ; sinon, avis défavorable.

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Quelques éléments sont en effet prévus, mais ce n'est pas simplement grâce à une amélioration de l'attractivité que l'on pourra recruter rapidement des magistrats. Bien d'autres mesures doivent être prises, en ce qui concerne les formations à ouvrir et les conditions de travail, qui sont le principal facteur en fonction duquel les candidats se dirigent vers un poste plutôt qu'un autre. Si on n'améliore pas les conditions de travail et si on n'introduit pas davantage de cohérence dans le système judiciaire français, je ne vois pas comment on réussira à recruter de nouveaux magistrats.

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Il me semble que le rapport annexé apporte des réponses. Grâce à la multiplication des voies de recrutement, on aura besoin de formations plus courtes, puisqu'il s'agira souvent de gens qui travaillent déjà au sein de la justice, avec les magistrats. Cela permettra aussi d'assurer un vrai déroulement de carrière pour tous ces personnels qui étaient bloqués jusque-là, ce qui contribuera à assurer l'attractivité des métiers – c'est nécessaire si on veut recruter un peu plus. L'existence d'une voie de recrutement permettant de progresser dans sa carrière jusqu'à devenir magistrat sera un facteur puissant en matière d'attractivité.

La commission rejette l'amendement CF28.

Amendement CF22 de Mme Cécile Untermaier.

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Le rapport de la mission d'information sur la mise en œuvre du code de la justice pénale des mineurs a mis en évidence une réduction rapide des délais de jugement et une accélération de la prise en charge des mineurs délinquants dans le cadre de la césure du procès pénal. Il nous semble intéressant d'ajouter ce point au rapport annexé.

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Vous avez raison de rappeler la réduction des délais de jugement des mineurs à la suite de l'entrée en vigueur du nouveau code. Cet amendement issu des travaux menés par Mme Untermaier et M. Terlier me semble bienvenu. Avis favorable.

La commission adopte l'amendement CF22 (CL958).

Amendement CF15 de Mme Cécile Untermaier.

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Cet amendement demande au Gouvernement de lancer une réflexion sur le métier et la fonction de greffier, en envisageant notamment un repositionnement en catégorie A.

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J'appelle votre attention sur le fait que le comité des états généraux n'a pas retenu cette proposition de requalification en catégorie A. En revanche, le comité a mis en avant, dans son rapport, un écart de 13 % en matière de rémunération par rapport aux autres métiers de catégorie B de la fonction publique. Plusieurs mesures ont été prises pour les greffiers : celles-ci, d'un montant 21 millions d'euros en 2022 puis de 7 millions en 2023, permettront d'augmenter leur rémunération de 12 %. Le garde des sceaux a également annoncé une négociation sur les grilles salariales en 2023. Je vous propose d'attendre de voir les résultats que cela produira avant d'adopter un tel amendement. Par conséquent, demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

L'amendement CF15 est retiré.

Amendement CF23 de Mme Cécile Untermaier.

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Je suis favorable à cet amendement visant à préciser que la formation des personnels de la PJJ porte sur la prise en charge de tous les mineurs, et pas uniquement les mineurs non accompagnés (MNA).

La commission adopte l'amendement CF23 (CL959).

Amendement CF55 de Mme Perrine Goulet.

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En vue de favoriser une meilleure prise en compte des droits de l'enfant par la justice, notamment dans le cadre des nombreuses procédures en cours, je vous propose de préciser qu'il y aura, à l'École nationale de la magistrature, des modules relatifs à l'intérêt supérieur de l'enfant.

La commission adopte l'amendement CF55 (CL960).

Amendements CF38 et CF39 de M. Charles de Courson.

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Le premier de ces amendements demande une augmentation de la place des stages outre-mer, où on a du mal à recruter, au sein de la formation initiale. En 2022, vingt-deux stages ont été effectués dans ces territoires.

Le second amendement concerne la petite enfance : dans l'intérêt de l'attractivité des métiers de la justice, il faut qu'on s'occupe des enfants du personnel, quel qu'il soit, magistrats, greffiers…

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Votre premier amendement est, selon moi, satisfait par l'alinéa 90 du rapport annexé, relatif à « la construction de parcours professionnels ministériels, interministériels, voire interfonctions publiques pour les agents qui souhaitent faire toute ou une partie de leur carrière dans un territoire ultramarin ». Je vous propose donc de retirer cet amendement. J'ajoute, pour votre information, que vingt-cinq stages outre-mer ont été proposés aux auditeurs de justice en 2022 – l'outre-mer n'est pas oublié.

S'agissant de l'action sociale, je vous proposerai tout à l'heure de nous assurer qu'elle est menée partout, et pas spécifiquement en Île-de-France ou dans les grandes agglomérations, comme le précise actuellement le rapport annexé. Nous en avons besoin. Je vous invite donc à retirer aussi cet amendement.

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Je suis d'accord pour retirer le second. S'agissant du premier, l'alinéa 90 parle de « parcours professionnels ». Cela inclut-il ce qu'on fait à l'École nationale de la magistrature ? Si vous me le confirmez, je retirerai également cet amendement.

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Oui. Quand on est auditeur, on est déjà engagé dans un parcours professionnel, à l'image des stagiaires dans la fonction publique.

Les amendements CF38 et CF39 sont retirés.

* *

Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mardi 20 juin 2023 à 14 heures

Présents. - M. David Amiel, Mme Christine Arrighi, M. Manuel Bompard, M. Mickaël Bouloux, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, M. Jocelyn Dessigny, M. Fabien Di Filippo, M. Benjamin Dirx, Mme Sophie Errante, Mme Félicie Gérard, Mme Perrine Goulet, M. Patrick Hetzel, M. Daniel Labaronne, M. Emmanuel Lacresse, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, Mme Constance Le Grip, M. Pascal Lecamp, M. Mathieu Lefèvre, Mme Patricia Lemoine, Mme Lise Magnier, M. Benoit Mournet, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Xavier Roseren

Excusés. - M. Christian Baptiste, M. Karim Ben Cheikh, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Joël Giraud, Mme Karine Lebon, M. Jean-Paul Mattei, M. Charles Sitzenstuhl

Assistaient également à la réunion. - M. Ugo Bernalicis, Mme Andrée Taurinya