Commission d'enquête relative à l'identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif ayant délégation de service public

Réunion du vendredi 13 octobre 2023 à 14h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • FFF
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La réunion

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La séance est ouverte à quatorze heures.

La commission auditionne Mme Mathilde Mandelli, M. Pierre Barthélemy, M. Tom Dufieu, M. Ronan Evain, et M. Kilian Valentin, membres du Bureau de l'Association nationale des supporters (ANS)

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Nous avons le plaisir d'accueillir madame Mathilde Mandelli et messieurs Ronan Evain, Pierre Barthélemy et Kilian Valentin, élus au Bureau de l'Association nationale des Supporters (ANS).

Je vous souhaite la bienvenue et vous remercie de votre disponibilité pour répondre à nos questions. Nous avons entamé les travaux de cette commission d'enquête sur l'identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du monde sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif, le 20 juillet 2023.

L'Assemblée nationale a décidé de sa création, à la suite de très nombreuses révélations publiques de sportives et sportifs, et de diverses affaires judiciaires ayant trait à la gestion de certaines fédérations.

Nos travaux se déclinent donc autour de trois axes : les violences physiques, sexuelles ou psychologiques dans le sport, les discriminations sexuelles et raciales, et les problématiques liées à la gouvernance financière des organismes de gouvernance du monde sportif bénéficiant d'une délégation de service public.

L'Association nationale des Supporters se présente comme ayant vocation à rassembler l'ensemble des associations de supporters autour notamment des questions relatives à l'animation des tribunes, à la gestion des accès au stade et au développement d'un dialogue intelligent et constructif avec toutes les parties prenantes. Elle est ouverte à l'ensemble des associations de supporters déclarées en préfecture et adhérentes à sa charte, qui mentionne la lutte contre les comportements violents et discriminatoires. L'ANS est, de fait, une association mono-disciplinaire, ne fédérant que les supporters de football.

Avant d'approfondir nos échanges, pourriez-vous brièvement nous présenter l'objet et le fonctionnement de l'ANS, ainsi que les relations qu'elle entretient avec les différents acteurs de la gouvernance sportive ?

De plus, pourriez-vous partager votre vision de l'évolution des actes de violence et des discriminations dans le football ?

Estimez-vous que le cadre existant pour prévenir, identifier et sanctionner ces actes est adapté, ou avez-vous des recommandations à formuler dans ce domaine ?

Pour adhérer à l'ANS, les associations de supporters doivent s'engager à respecter sa charte, laquelle proscrit notamment les comportements violents, à caractère raciste ou discriminatoire, sous peine d'exclusion. Pourriez-vous préciser les actions mises en œuvre par l'ANS pour faire respecter cette règle ?

Je rappelle que cette audition est ouverte à la presse et retransmise en direct sur le site de l'Assemblée nationale.

L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, impose aux personnes entendues par une commission d'enquête de prêter serment, de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire chacun à votre tour : « Je le jure ».

(Mme Mathilde Mandelli, M. Pierre Barthélemy, M. Ronan Evain, et M. Kilian Valentin prêtent successivement serment.)

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Mathilde Mandelli, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Mon intervention portera sur les sujets soulevés par votre commission, à savoir les violences, le harcèlement et les discriminations dans les stades.

Notre principale observation concerne les discriminations d'ordre « infrastructurel », en particulier à l'égard des femmes dans les stades de football en France. Les conditions d'accueil des femmes dans certains stades sont souvent déplorables, notamment pour les clubs à partir de la ligue 2 mais surtout dans les clubs dépendant de la Fédération française de football (FFF), à partir du niveau national et des divisions inférieures.

Il peut arriver que les femmes n'aient pas accès à des toilettes dans les stades ou que les portes de ces lieux ne ferment pas à clé, ce qui peut créer des situations inconfortables et exposer à des violences. De plus, les toilettes peuvent manquer d'éclairage ou de produits d'hygiène élémentaires.

Le football, à ce niveau, est discriminant, car les femmes ne sont pas accueillies dans des conditions acceptables.

Un autre point de préoccupation concerne le manque de stadiers féminins dans les enceintes sportives, qui peut rendre l'accueil des femmes plus compliqué. Par exemple, le temps d'attente pour les palpations de sécurité peut apparaître nettement plus long pour les femmes. Cette situation est également problématique lorsque des hommes accompagnent des enfants, et que les petites filles doivent attendre un long moment avant de pouvoir se faire palper par les personnels de la sécurité.

Concernant la collecte d'information sur la discrimination dans les tribunes, nous constatons une absence de base de données. Des travaux visant à combler cette lacune devraient être entrepris. En revanche, il y a un vrai problème d'infrastructures et de conditions d'accueil.

En outre, nous pourrions également évoquer les horaires des matchs dans les stades, qui ne sont pas toujours adaptés aux contraintes des vies de famille, notamment pour les femmes.

En conclusion, une série de facteurs entravent la présence des femmes dans les enceintes sportives. Ces facteurs constituent des formes de discrimination.

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Ma contribution à cette commission d'enquête se focalisera davantage sur la comparaison avec les pratiques observées en Europe, étant donné que je suis également directeur général de l'association Football Supporter Europe (FSE), dont l'ANS est membre. Notre association représente les supporters dans les 55 nations de la zone de l'Union européenne des associations de football (UEFA).

Concernant la gouvernance du football en France, il est frappant de constater l'incapacité de la Fédération française de football (FFF) à aligner ses pratiques sur un certain nombre de standards européens, que ce soit en matière de responsabilité sociale, de dialogue avec les parties prenantes, y compris les supporters, de prévention du racisme et des discriminations, ou de lutte contre les violences de genre.

Cette tendance à l'isolement et à l'isolationnisme ne fait que croître. Or, la FFF joue un rôle essentiel, en tant que fédération la plus riche d'Europe et deuxième fédération la plus importante en nombre de participants.

Le prétexte couramment avancé pour justifier le manque de travail sur ces questions est celui du budget. Or, l'engagement de fédérations telles que celles de San Marino, des îles Féroé ou du Kosovo dépasse largement celui de la FFF en matière de responsabilité sociale. En outre, en matière de relations avec les supporters, ces fédérations disposent de personnel dédié et d'une politique à court, moyen et long termes. De plus, ces fédérations entretiennent un dialogue permanent avec les représentants des supporters. Toutes ces composantes font cruellement défaut dans le paysage actuel du football français.

Si nous devions, à l'avenir, discuter d'une problématique spécifique avec la FFF, ou signaler un incident ou une source d'inquiétude, nous serions confrontés à une absence de point de contact. L'argument du manque de ressources semble difficilement justifiable, compte tenu des revenus conséquents, notamment commerciaux, de la FFF.

En conclusion, la Fédération française de football accuse un retard colossal par rapport aux normes européennes et aux pratiques de ses voisins, au sein de la zone UEFA. Elle ne remplit pas à nos yeux ses responsabilités sociales.

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Disposez-vous d'études ou de documents de comparaison avec les autres clubs européens sur les éléments mis en place dans ce domaine et les moyens alloués dans les différents clubs ou les fédérations ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

La situation des clubs est relativement favorable, grâce à la loi du 10 mai 2016 qui exige la nomination d'un référent supporter au sein des clubs de football. La FFF n'avait pas souhaité travailler sur cette question. Il a donc fallu attendre l'adoption de cette loi pour que la Fédération prenne en compte cette exigence.

À l'heure actuelle, la situation au sein des clubs est donc très satisfaisante et plutôt positive au sein de la Ligue de football professionnel (LFP) qui dispose de son côté de deux personnes dédiées à la gestion de l'expérience en stade et des relations avec les supporters.

Nous pourrions vous présenter une étude comparative établissant la liste des fédérations européennes disposant de personnels spécifiquement affectés aux relations avec les supporters, et de celles qui n'en ont pas. Actuellement, environ trois quarts des 55 fédérations nationales européennes ayant du personnel ont au moins un point de contact dédié dans leur équipe pour traiter ces questions, ce qui n'est pas le cas de la FFF.

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Pouvez-vous apporter des précisions sur les relations que vous entretenez avec la FFF ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Nos relations avec la FFF sont inexistantes. Nous n'avons pas de point de contact. La dernière personne clairement identifiée comme point de contact au sein de la FFF a quitté l'organisation il y a environ 18 mois. Cette personne travaillait dans le domaine des relations internationales.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Il s'agissait de monsieur Idrissi, qui était particulièrement impliqué sur les sujets liés aux supporters. Cette personne, qui a probablement réorienté sa carrière dans le cadre de la restructuration de la Fédération, n'a malheureusement pas été remplacée.

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Par conséquent, en cas d'incidents ou d'événements survenant lors des matchs de football, aucun travail n'est réalisé avec la Fédération pour prévenir d'éventuels futurs débordements lors des prochains matchs ?

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Nos contacts avec la Fédération française de football sont inexistants depuis de nombreux mois. Vous évoquez la prévention des incidents. Les derniers contacts avaient eu lieu avec monsieur Idrissy.

À titre de comparaison, nous avons pu avoir des échanges constructifs avec la Ligue de football professionnel qui a notamment mis en place des mesures concernant l'organisation des matchs, la programmation des rencontres, et même le tarif des places pour les supporters visiteurs, plafonné à 5 euros en Ligue 2 et à 10 euros en Ligue 1.

En revanche, la FFF n'a jamais répondu à nos sollicitations au cours des deux dernières années. Nous avons envoyé des courriels pour entamer des discussions au sujet du championnat national, mais nous attendons toujours des réponses de la part du directeur des compétitions de la Fédération.

Nos contacts sont inexistants au sujet des compétitions, y compris la coupe de France et les championnats amateurs.

Au sujet de la programmation des matchs, différents clubs nous indiquent depuis environ 18 mois que la Fédération ne répond pas à leurs demandes, notamment liées à des reports de matchs. Il semble que de nombreuses décisions soient prises de manière officieuse. Les clubs ne reçoivent pas non plus de réponse de la Fédération française de football.

Sur la question de la professionnalisation du championnat s'agissant de l'accueil des supporters, la Fédération n'a entrepris aucun travail dans ce domaine, malgré les sollicitations que nous avons faites en 2021 et 2022. Nos interactions se sont interrompues par la suite, notamment après le départ de monsieur Idrissy.

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Pourriez-vous nous transmettre les sollicitations que vous avez faites à la FFF, qui sont restées sans réponse (courriels, prises de contact, etc.) ? Par ailleurs, entretenez-vous des relations avec d'autres acteurs du mouvement sportif ? Je fais notamment référence au ministère des Sports, à l'Agence nationale du sport (ANS) ou encore au Comité national olympique et sportif français (CNOSF).

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

En effet, le ministère des Sports, le ministère de l'Intérieur, le ministère de la Justice, la LFP et le CNOSF siègent à l'instance nationale du supportérisme (INS). Nous sommes satisfaits du niveau de coopération avec le ministère des Sports. Des opportunités d'amélioration existeront toujours, mais nous sommes effectivement engagés dans une coopération particulièrement structurée, avec des canaux de communication clairement définis.

Je crois que la FFF ne siège plus aux réunions plénières de l'INS depuis au moins un an.

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

La FFF est uniquement présente aux réunions plénières.

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Non, ce n'est plus le cas désormais.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

La loi de 2016 a créé l'INS, rassemblant toutes les parties prenantes sous l'égide du ministère des Sports. Cette instance organise des réunions plénières, permettant de réaliser des bilans et de prendre des décisions, ainsi que des groupes de travail très réguliers sur des sujets cruciaux, dont la lutte contre les discriminations qui constitue l'un des fils rouges de cette instance.

La LFP est très présente pour le football professionnel. D'autres ligues de sports collectifs sont également impliquées, ainsi que les ministères concernés. En revanche, la Fédération n'a jamais été présente de manière significative. Elle assiste parfois aux réunions plénières, mais ne prend jamais la parole. La FFF est intervenue une seule fois depuis la création de cette instance en 2016 pour dire que tout allait bien… C'est assez problématique.

Un autre événement est survenu lors de la finale de la Coupe de France qui s'est déroulée en mai dernier. Des rumeurs sans fondement avaient évoqué l'intention des supporters de Nantes d'envahir la pelouse. La Fédération avait alors pris unilatéralement la décision d'installer des grilles en bas des tribunes, une pratique abandonnée depuis les années quatre-vingt en raison des risques qu'elle présente. En cas d'attentat, d'incendie ou de mouvements de foule, des personnes peuvent se retrouver écrasées contre les grilles. Ce type de situation a déjà provoqué la mort de dizaines de personnes dans les années 1980. Nous avions donc contacté la Fédération pour lui demander de reconsidérer cette décision, mais nous n'avions reçu aucune réponse. Nous avions dû saisir la justice, et la Fédération ne s'est même pas défendue.

Nous nous sommes donc retrouvés dans une situation alarmante, à la suite d'une décision non fondée, sans avoir eu d'interlocuteur pour discuter et réfléchir à la situation. De plus, des journalistes nous ont informés que la Fédération était préoccupée par sa décision, car normalement, un mécanisme permettant l'ouverture d'une grille sur trois existe, afin d'éviter les accidents en cas de forte pression ou de mouvement de foule. Or, la Fédération ne savait pas si ce mécanisme fonctionnait. Ces exemples illustrent clairement l'absence de dialogue et de visibilité qui nous préoccupe grandement.

En outre, la FFF a systématiquement quitté toutes les initiatives dans lesquelles nous avons tenté de l'impliquer, avec notamment l'INS, mais également la Fondation Nivel. Cette fondation, créée par la Fédération allemande de football et la Fédération française de football, vise à améliorer les relations entre les clubs, les supporters, les instances sportives et les forces de l'ordre, afin d'avancer collectivement. Ce dispositif a permis de renforcer de manière significative le dialogue structurel entre l'ANS, le ministère de l'Intérieur et la Ligue. Cependant, la Fédération française de football a quitté du jour au lendemain ce véhicule de travail essentiel.

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Avez-vous signalé au ministère des Sports ces difficultés de travail avec la FFF ? D'autres personnes ont-elles été alertées de cette situation ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

À ma connaissance, le ministère des Sports est informé des difficultés auxquelles nous faisons face. Par ailleurs, ces difficultés ne concernent pas seulement les supporters de clubs que l'ANS représente, mais également les supporters de l'équipe nationale.

En fin de compte, la FFF aborde les relations avec les supporters principalement sous deux angles : un prisme marketing, avec l'objectif de maximiser les revenus liés au merchandising et aux billets des matchs, et un point de vue sécuritaire. Elle semble rejeter toute forme de responsabilité sociale dans sa relation avec les supporters.

De plus, la Fédération ne semble pas disposée à se conformer aux normes et aux standards internationaux qui imposent aux organisateurs de compétitions de maintenir une coopération efficace avec leurs « clients », à savoir les supporters.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

La situation est même pire que cela. Les supporters sont perçus comme une charge, voire des ennemis par la Fédération.

La loi de 2016 a créé le référent supporter pour les clubs de football professionnel. Il s'agit d'un salarié du club dédié au dialogue avec les supporters. Cette mesure a considérablement transformé les dynamiques au sein du football professionnel. Les relations conflictuelles ont été remplacées par des relations productives de travail. Or, la Fédération refuse non seulement d'entendre les appels des clubs de national 1, 2 et 3 pour mettre en place ce dispositif, mais elle refuse également de le faire avec l'Association des supporters de l'équipe de France.

L'association « Irrésistibles Français », de taille désormais importante, est relativement unique en Europe et anime les matchs de l'équipe de France. Or, les membres de cette association ne parviennent pas à avoir un interlocuteur au sein de la Fédération. Ainsi, ces supporters, lorsqu'ils se déplacent, doivent souvent effectuer eux-mêmes le travail que la Fédération devrait prendre en charge. Cela inclut la prise de contact avec les autorités locales et la Fédération du pays hôte, et la gestion de la billetterie. Personne à la Fédération n'est présent pour les assister.

Cette vision du supporter comme une charge, voire un ennemi, se reflète également dans la politique disciplinaire de la FFF. La commission de discipline, qu'il s'agisse de la Ligue ou de la FFF – la Ligue en première instance et la FFF en appel pour les clubs professionnels et la FFF en première instance et en appel pour les clubs amateurs – a pour mission de sanctionner les manquements réglementaires des clubs, et seulement des clubs. Or, ces commissions de discipline détournent complètement cet objectif, en infligeant des sanctions aux supporters au travers des clubs. Il s'agit des fameuses « sanctions collectives ».

En cas d'incident dans un stade, il incombe normalement à la justice de sanctionner le supporter fautif, tandis que la Fédération et sa commission de discipline doivent sanctionner le club, à hauteur de ses manquements en matière de sécurité.

Les commissions de discipline prennent désormais la décision d'épargner les clubs et de sanctionner les supporters en fermant toute la tribune. Cela signifie qu'en cas de mauvais comportement de quelques personnes, par exemple en cas de chant raciste, tous les supporters sont sanctionnés. Ces sanctions collectives constituent un détournement grave de la mission disciplinaire des commissions, et reposent sur des présomptions paternalistes selon lesquelles les supporters sont inaptes à vivre en collectivité, et qu'ils sont stupides et dépourvus d'intelligence collective et de culture.

Cette vision du supporter comme adversaire de la Fédération va encore plus loin. Les préfectures ont la possibilité, lorsqu'une personne présente un risque de troubles à l'ordre public lors d'une rencontre, d'imposer une interdiction administrative de stade en attendant le procès. Cette mesure n'est pas une sanction, mais une mesure préventive et de sécurité. La Fédération reçoit logiquement la liste de ces interdictions administratives.

Or, la FFF, de manière illégale, croise ce fichier avec le fichier des licenciés. La Fédération peut ainsi identifier une personne interdite de stade qui est également licenciée, comme joueur amateur ou éducateur au sein d'un club, et décider de suspendre sa licence sur ce motif.

Or, l'interdiction administrative de stade ne constitue pas une condamnation judiciaire. La culpabilité de la personne n'est donc pas encore établie. Lorsque nous tentons de discuter de ces questions avec la Fédération, nous n'obtenons aucune réponse. Seules des informations provenant de tiers ou de journalistes sont disponibles. La Fédération, en agissant de la sorte, sait qu'elle est infraction pénale, mais n'en aurait rien à faire.

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Avez-vous des exemples précis à nous communiquer dans ce domaine, ainsi que des échanges que vous auriez pu avoir avec la Fédération sur ces croisements de fichiers et ces suspensions de licences ? Nous devons pouvoir nous référer à des cas précis, si nous souhaitons éventuellement interroger la FFF sur ces sujets.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Nous avons en notre possession les décisions disciplinaires officielles, qu'il s'agisse des suspensions de licences ou des sanctions collectives. Ces documents comportent des messages clairs, indiquant que l'objectif n'est pas de sanctionner le club, mais bien les supporters de manière générale et indifférenciée.

La Fédération est consciente de se trouver dans une situation d'illégalité, mais ne semble pas vouloir remédier à cette situation. Ces informations proviennent d'échanges verbaux que nous avons eus avec des représentants de la Fédération. Je rappelle que nous avons prêté serment en début d'audition. Nous assumons donc nos propos.

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Nous avons été contactés par plusieurs clubs, notamment au niveau du championnat national, qui étaient perplexes face à la manière dont certains supporters ont été sanctionnés. Ces clubs de football au niveau national pourraient vous fournir des informations plus précises à ce sujet.

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N'hésitez pas à nous transmettre le nom de ces clubs et toutes les informations que vous jugerez utiles pour notre commission.

Au sein de l'écosystème du mouvement sportif, avez-vous eu l'occasion de travailler avec des associations telles que SOS Racisme ou avec la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH).

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Sur la question de la lutte contre l'homophobie, nous travaillons avec des associations qui collaborent avec la LFP, car elles interviennent au sein des clubs. Nous avons établi une relation de travail constructive avec certaines d'entre elles.

Cependant, l'écosystème est complexe, avec de nombreux acteurs, parfois concurrents. Nous sommes amenés à choisir les organisations avec lesquelles nous collaborons, en fonction de leur implication dans le monde du sport, que ce soit en raison de leur mission ou de leur partenariat avec la LFP.

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Pouvez-vous nous préciser le nom des associations avec lesquelles vous travaillez ?

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Les associations partenaires de la Ligue sont Foot Ensemble, PanamBoyz & Girlz United et SOS Homophobie.

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Nous ne disposons pas en France d'une organisation spécifiquement dédiée aux supporters LGBT+. Cependant, nous nous appuyons sur l'expertise des organisations similaires présentes en Europe, avec lesquelles nous collaborons. Nous bénéficions ainsi de leur expérience dans ce domaine.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Un groupe de travail dédié à la lutte contre les discriminations existe au sein de l'INS. En 2021, nous avons rédigé un rapport (trois documents de plusieurs dizaines de pages) couvrant tous les types de discriminations qui se produisent dans les stades, que ce soit l'homophobie, l'antisémitisme, le sexisme ou encore le racisme.

En outre, nous entretenons des contacts réguliers avec la Ligue et le cabinet du ministère des Sports. À chaque fois qu'il y a une actualité sur ce sujet, nous nous réunissons avec les responsables de la Ligue et du ministère des Sports, afin de chercher des solutions et des avancées concrètes.

Nous disposons donc de nombreux interlocuteurs et d'une réelle capacité à faire progresser les sujets liés à la lutte contre les discriminations dans les stades. Toutefois, nous n'avons aucun contact avec la FFF sur ces questions. Cette dernière a souvent affirmé publiquement que ces problématiques n'existent pas dans le football.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Ce groupe de travail est composé de tous les membres de l'INS, qui sont nommés par arrêté ministériel. Ce groupe comporte également dix associations de supporters agréées, dont l'ANS. Il intègre des représentants des ministères de la Justice, des Sports, de l'Intérieur, des Transports, ainsi que les ligues professionnelles, et des personnalités qualifiées (sociologues, universitaires, historiens, experts en sécurité des manifestations sportives), des représentants des élus, dont une sénatrice et un député ainsi que des représentants de l'Association des maires de France (AMF) et de l'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES).

Environ 35 personnes et entités sont donc présentes et peuvent ainsi intervenir librement au sein des groupes de travail qui se mettent en place au cours de l'année.

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Mathilde Mandelli, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Je souhaite ajouter quelques éléments à propos du rapport élaboré dans le cadre de l'INS. Un cabinet externe a été mandaté pour conduire des auditions auprès de nombreuses personnes. Il s'agit d'un travail en profondeur auquel l'INS a activement contribué. Nous avons également consacré un temps important à l'examen de ces documents, ce qui nous a permis de proposer une étude complète sur les discriminations.

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Ce rapport date de 2021. Il a été rédigé par le cabinet Mouvens. Par ailleurs, pour compléter, la Ligue de football organise des ateliers avec les référents supporters des différents clubs. Elle les invite à rencontrer régulièrement les associations partenaires, afin de recueillir leurs retours et avancer dans le domaine de la lutte contre les discriminations. La Ligue de football professionnel le fait. La Fédération française de football ne fait pas ce travail sur la lutte contre les discriminations.

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Avez-vous déjà eu l'occasion de travailler avec la DILCRAH et SOS Racisme ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

La DILCRAH a participé à plusieurs réunions au ministère des Sports, principalement sur la lutte contre l'homophobie. En revanche, à ma connaissance, nous n'avons pas établi de contact avec SOS Racisme. Par le passé, la LICRA disposait d'une commission sport avec laquelle nous étions en relation, mais je ne peux confirmer si cette collaboration perdure. Les personnes qui étaient membres de cette commission ne sont plus actives.

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Quel est l'objectif des réunions organisées au ministère des Sports, avec la participation d'autres associations ou structures ? À quelle fréquence vous réunissez-vous dans ce cadre ?

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

En ce qui concerne la fréquence, cela dépend des groupes de travail. Il n'y a pas eu de réunion depuis un certain temps, mais elles devraient reprendre la semaine prochaine. Par ailleurs, les thèmes abordés dépendent à la fois de l'actualité et des sujets que certains membres de l'INS souhaitent aborder. En règle générale, ces réunions ont lieu une fois par mois.

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À quand remonte la dernière réunion de travail ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Il existe des réunions plénières, ainsi que des réunions de groupe de travail. Les plénières ont lieu au moins deux fois par an. La dernière réunion s'est déroulée fin juin ou début juillet, et la prochaine est prévue au mois de décembre. Ces réunions plénières rassemblent la ministre et le haut encadrement des organisations représentées. Par exemple, le directeur général de la Ligue participe généralement à ces réunions. Quant aux réunions de groupe de travail, leur fréquence dépend davantage de notre disponibilité (étant donné que nous sommes des bénévoles dans ce contexte), ainsi que de l'actualité. Une réunion par an est généralement organisée en moyenne.

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Lors de l'audition de SOS Racisme, les membres de cette association ont fait part de leur participation à une réunion au ministère des Sports, dédiée au sujet de la lutte contre la discrimination, et notamment sur la question de l'homophobie. Au cours de cette réunion, des échanges et des discussions ont eu lieu concernant les termes qui étaient parfois utilisés dans les stades. Ils nous ont informés qu'à cette occasion, il leur avait été affirmé que le mot « enculé » n'était pas considéré comme homophobe.

Étiez-vous présents lors de ces discussions et partagez-vous la même opinion, à savoir que ce terme n'est pas homophobe ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Il n'y a aucun débat sur la nature homophobe du terme en question. La question est de savoir comment et dans quel cadre il est utilisé au sein des stades. Je m'étonne que l'on nous oppose cette position qui n'a jamais été la nôtre.

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Les membres de SOS Racisme n'ont pas affirmé que vous étiez les auteurs de ces propos. Dans le cadre de la discussion, un débat a eu lieu autour de ce mot et certaines parties semblent avoir estimé que cette insulte n'était pas homophone. Pouvez-vous préciser votre pensée lorsque vous évoquez la question du « contexte » pour l'utilisation de ce mot ?

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

En 2019, lors d'une période marquée par la récurrence de certains propos de cette nature à l'échelle nationale, une réunion au ministère des Sports avait été organisée.

Lors de cette réunion, un débat s'était engagé, portant notamment sur la réaction adéquate à adopter et les sanctions pouvant être appliquées. Un débat juridique avait eu lieu, notamment avec le ministère de la Justice. Ce dernier avait rappelé la nécessité, en droit, de réunir un élément intentionnel et un élément matériel pour qu'une infraction pénale soit constituée. Or, l'utilisation du terme « enculé » à des fins injurieuses, sans connotation homophobe, à destination d'une personne qui n'est pas homosexuelle, ne constitue pas, d'un point de vue juridique, un acte homophobe. Cette insulte avait d'ailleurs été adressée à la Ligue.

Néanmoins, il avait été rappelé que même si juridiquement ces termes ne constituaient pas une infraction, l'utilisation de ce mot pouvait potentiellement blesser et exclure certaines personnes. Le débat avait donc porté sur cette dichotomie. L'utilisation de ce mot, dans ce cadre, ne peut pas engendrer de peine pénale au titre de propos homophobes. Pour autant, d'un point de vue moral, philosophique et humain, ce terme présente réellement une connotation homophobe.

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Des éléments sont-ils mis en place, en matière d'information et de prévention, auprès des clubs de supporters, par exemple, sur ce volet ?

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

La Ligue propose des ateliers avec diverses associations dont elle est partenaire. Ces associations sollicitent les clubs pour organiser des rencontres et faire de la prévention dans les centres de formation, avec les éducateurs, les jeunes, les clubs de supporters, les présidents et dirigeants de différents clubs. Les clubs de supporters sont associés à chaque fois et la LFP nous en informe. Ces travaux de sensibilisation et de prévention sont menés au niveau professionnel, en Ligue 1 et 2. Cette démarche de sensibilisation et de formation n'est pas mise en œuvre par la FFF dans les divisions inférieures et amateures.

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Les clubs amateurs, y compris ceux des championnats semi-professionnels, ne bénéficient pas du même niveau de sensibilisation.

Si un incident de nature homophobe survient au sein d'un club amateur, le président de ce club ne saura pas vers qui se tourner pour mettre en place une action de prévention.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Ce débat complexe soulève de nombreuses questions. L'objectif à définir est essentiel : s'agit-il de pallier temporairement les problèmes ou de créer un environnement où toute personne LGBT+ se sente à l'aise au stade ?

Il semble que les interlocuteurs choisissent le plus souvent la première option, visant à calmer les réactions médiatiques et politiques, en cachant les chants. Des avancées ont certes eu lieu dans ce domaine, avec des groupes de supporters qui ont modifié ou mis fin à leurs chants, avec des communications publiques à ce sujet.

En revanche, une étape plus globale, sociétale et humaine, que la Ligue essaie de mettre en place, manque. La mise en œuvre de cette approche rencontre des réticences. Néanmoins, les ateliers menés par la Ligue apparaissent nettement plus efficaces que des sanctions collectives qui ne font que renforcer les réactions hostiles, ce qui est contre-productif. Ils suscitent de véritables prises de conscience. Ils sont autrement plus efficaces que des sanctions collectives qui entraînent des réactions grégaires d'opposition et sont complètement contre-productives.

Il faut s'appuyer sur le diptyque qui consiste à mettre en place une sensibilisation, avec un dialogue sincère, suivi de sanctions individuelles si nécessaire. Une personne, informée et sensibilisée, qui persiste volontairement dans des comportements homophobes ou racistes dans un stade, doit en répondre devant la justice.

Néanmoins, il n'existe pas de solution miracle. On ne peut tout résoudre dans l'instant médiatique. Les améliorations ne peuvent être progressives et il faut l'accepter.

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Qui a la charge du signalement à la justice, lorsqu'une difficulté apparaît avec un ou plusieurs supporters qui réitèrent à plusieurs reprises des propos homophobes ou racistes ? Quelles sont les procédures mises en œuvre dans ce type de situation ? Par ailleurs, connaissez-vous la cellule Signal-sports ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Sur l'identification des comportements à caractère discriminatoire dans les stades, nous disposons désormais de systèmes de vidéosurveillance avancés dans les stades, ce qui permet une identification plus précise et rapide des individus impliqués. Les outils sont disponibles pour permettre une réponse individualisée, ce qui constitue une avancée significative par rapport à une époque où la sanction collective était la seule option. Il fallait avancer au bulldozer et punir 5 000 personnes pour les actions de quelques-uns.

Nous disposons désormais de moyens d'identification avancés. Cela a été récemment illustré lors d'un incident à Montpellier, où un pétard a été lancé sur un joueur. La personne a été identifiée rapidement et interpellée. Idem à Nancy, pour des faits de racisme. Les personnes responsables ont été identifiées, sorties de tribune et remises aux forces de l'ordre en quelques minutes. Il ne semble pas possible de faire mieux et plus rapide en matière d'identification.

Pourtant, au lieu de réviser la réglementation disciplinaire pour s'adapter à cette nouvelle réalité de la vidéosurveillance, nous avons empilé les réponses disciplinaires. Une sanction individuelle est prononcée à l'encontre d'une personne coupable de comportements discriminatoires. Mais on va venir ajouter une sanction collective. Cette démarche peut complexifier la réponse, car elle est susceptible de décourager les spectateurs dans leur démarche de signalement de tels comportements, de peur de subir également des sanctions. Cela rend la mobilisation du public plus difficile.

Par ailleurs, je ne connaissais pas la cellule de signalement que vous venez de mentionner.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

J'ai pris connaissance de l'existence de cette cellule dans un article récent du journal L'Équipe, qui évoquait le travail de cette commission et la polémique suscitée par une autre plateforme...

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Vous êtes nombreux à découvrir cette cellule grâce aux travaux de cette commission d'enquête. Cet outil est proposé par le ministère des Sports. Cette cellule de signalement est méconnue. De plus, son périmètre ne semble pas clairement défini. Les questions de racisme, de discrimination et d'homophobie ne semblent pas forcément relever de son champ de compétences. Un travail pourrait être entrepris par la suite pour clarifier cette question.

La charte, que les associations de supporters doivent signer, proscrit les comportements violents, à caractère raciste ou discriminatoire. Comment veillez-vous à l'application de cette charte ?

Nous n'avons pas réussi à déterminer si l'association des supporters du club de Nîmes Olympique « Gladiators Nîmes 1991 » est toujours affiliée à l'ANS. L'an dernier, le club avait signalé plusieurs incidents, notamment des provocations et des injures à caractère raciste et homophobe, ce qui avait poussé son président, Rani Assaf (par ailleurs contesté par d'autres clubs de supporters) à déposer une plainte. Cette association est-elle toujours adhérente de votre structure ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Oui, les « Gladiators Nîmes 1991 » sont toujours membres de l'ANS. Les différentes procédures engagées contre le président Rani Assaf font suite à une importante problématique liée à un conflit local complexe et opaque. Les « Gladiators Nîmes 1991 » décrivent des méthodes de Rani Assaf parfois arbitraires et illégales, s'agissant de l'accès au stade. Les « Gladiators Nîmes » sont entrés sur le stade alors que M. Assaf leur avait interdit l'accès au stade dans des conditions arbitraires et illégales.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Une association peut être exclue uniquement en cas de condamnation judiciaire. Dans le cas contraire, la présomption d'innocence doit être respectée. À notre connaissance, aucune enquête n'a été entreprise à Nîmes, en raison d'un contexte particulier, marqué par l'action de Rani Assaf. Ce président, en toute illégalité, a exclu l'accès au stade à cette association de supporters, en raison de contestations à l'encontre de sa politique sportive, relativement critiquable par ailleurs. Une plainte pénale est en cours de la part de cette association de supporters pour discrimination.

De plus, la CNIL a été saisie il y a deux ans, en raison de l'édition de trombinoscopes recensant les supporters interdits. Il demandait ainsi au personnel du stade d'interdire l'entrée à certains supporters, en utilisant ce trombinoscope. Le passe sanitaire avait également été utilisé comme outil d'exclusion de supporters durant la crise Covid.

Il semble difficile d'accorder une crédibilité totale aux déclarations de monsieur Assaf, étant donné que ces événements s'inscrivent dans un différend ancien qui se trouvait déjà devant les tribunaux. Néanmoins, nous appliquerions la charte sans réserve si une condamnation pénale venait à être prononcée. Un groupe a déjà dû quitter l'association en raison de plusieurs incidents violents, il y a de cela quatre ou cinq ans. Nous n'éprouvons aucune difficulté à faire respecter cette charte.

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Ce point relève de la liberté d'association. Nous ne sommes pas en mesure de vous fournir cette information.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Nous vous communiquerons cette information après accord de l'association en question.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Des violences graves en groupe.

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Comment appréhendez-vous l'évolution des cas de discrimination, de racisme et d'homophobie dans le monde du football ?

Nous avons eu l'opportunité d'entendre le témoignage de plusieurs sportifs, athlètes, et même de personnes impliquées dans la réalisation de documentaires. Nous avons eu l'occasion de visionner le documentaire intitulé Je ne suis pas un singe, qui apporte un éclairage significatif sur les difficultés rencontrées par certains sportifs, notamment dans les stades de France.

Quelle est votre perception de cette problématique ? Je vous interroge à ce sujet, car au moment où nous avons voté un texte relatif aux Jeux olympiques et paralympiques, des rapports ont fait état d'une réduction substantielle des condamnations au titre des atteintes à la sécurité des manifestations sportives, entre 2019 et 2021. Or, les sportifs reçus dans le cadre de cette commission ont le sentiment que les phénomènes de discrimination sont en augmentation. Quel est votre point de vue à ce sujet ?

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Cette question est particulièrement complexe. Il faut se garder de tout jugement basé uniquement sur des perceptions. Il est indéniable que la société dans son ensemble est nettement plus sensibilisée à ces questions de nos jours. Les joueurs et les organisations de supporters sont également bien plus conscients de ces enjeux.

Par ailleurs, les stades français étaient nettement plus politisés il y a 20 ou 25 ans. Les expressions racistes (cris de singe, chants racistes, etc.) étaient malheureusement monnaie courante dans de nombreux clubs français à l'époque, mais elles ont depuis complètement disparu.

En mettant de côté les chants homophobes, nous pouvons affirmer que les chants et actes racistes en tribunes sont aujourd'hui devenus rares. Un incident comme celui de Nancy, par exemple, est assez isolé. Les tribunes ne sont plus remplies de milliers de supporters qui entonnent des chants racistes. Nous avons indéniablement progressé de ce point de vue.

Toutefois, nos attentes, ainsi que celles de l'ensemble des parties prenantes, sont devenues bien plus élevées. Les saisons 2019-2021 ont également connu une réduction des incidents, en raison notamment de la situation sanitaire liée à la Covid.

Néanmoins, nous entendons de nombreuses voix dans le monde du sport évoquant une augmentation du nombre d'incidents, notamment d'intrusions sur les terrains, au cours des deux dernières saisons. Malheureusement, je n'ai pas de chiffres précis à ce sujet.

Certains pays européens, dont le Royaume-Uni, qui tiennent des statistiques exhaustives à ce sujet, indiquent une tendance à la baisse du nombre d'incidents.

En l'absence de données statistiques précises, je suis dans l'incapacité de fournir une réponse autre que mon ressenti personnel.

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Nous avons discuté abondamment du football, mais des situations similaires se produisent également dans d'autres disciplines sportives. Avez-vous des informations ou des impressions sur ce qui se passe ailleurs, dans d'autres sports ?

Nous savons que le racisme, la discrimination et l'homophobie peuvent également surgir dans d'autres domaines, y compris lors de compétitions. Existe-t-il d'autres structures similaires à la vôtre qui s'occupent de ces problématiques ? Si oui, êtes-vous en contact avec elles ?

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

En dehors du domaine professionnel et semi-professionnel, le rugby amateur se heurte aux mêmes problématiques. Nous comptons au sein de l'INS un membre de la Fédération française des supporters de rugby (FFSR). Cette personne est particulièrement active sur les questions de discrimination et de racisme dans le rugby semi-professionnel et amateur.

Du point de vue de la prévention et de la pédagogie, des mesures similaires à celles mises en œuvre dans les divisions professionnelles font également défaut au sein de ces catégories amateurs.

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Pensez-vous que les préoccupations de la Fédération française de Rugby (FFR) sont semblables à celles de la FFF dans ce domaine, ou estimez-vous que la FFF constitue un cas particulier dans le monde des fédérations sportives ?

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Nous pouvons observer la réaction du président de la FFR à la suite de l'incident à caractère raciste survenu dans le rugby amateur il y a quelques jours. Sa réponse a été immédiate, marquée par une conférence de presse résolue et sans équivoque.

En comparaison, Noël Le Graët semblait trouver insultante la simple évocation de la possible existence de comportements racistes dans le football français. Il est donc manifeste qu'il existe au moins une différence notable dans les réactions face à des faits avérés.

Il a une vingtaine d'années, le joueur de rugby du stade toulousain, Yves Donguy avait été la cible de cris et de comportements racistes. À cette époque, la FFR avait réagi de manière particulièrement ferme à cet incident.

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Avez-vous des propositions à formuler, afin d'améliorer le travail de prévention dans ce domaine ? Les clubs amateurs, le volet des sanctions et la vidéosurveillance sont des sujets qui ont été évoqués au cours de nos échanges. Avez-vous d'autres idées à proposer à cette commission d'enquête pour réduire, voire éliminer les incidents qui perturbent les moments festifs et sportifs ?

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Le travail mené par la Ligue de football professionnel, notamment avec les référents supporters qu'elle a mis en place il y a quelques années et formés, est notable. Des ajustements ont été nécessaires au moment de la mise en place du dispositif. À présent, nous pouvons clairement observer les efforts déployés par la Ligue en matière de dialogue avec les supporters, de prévention et de collaboration sur certains sujets. La Fédération française de football devrait prendre exemple sur ce modèle.

Nous n'avons plus eu de contact avec la FFF depuis 18 mois. Auparavant, les interactions étaient complexes et laborieuses, mais nous avions un interlocuteur qui pouvait transmettre les informations. Des temps d'échanges et des réunions existaient périodiquement. Depuis 18 mois, le dialogue est rompu.

Il semblerait judicieux que la Fédération mette en place un système similaire à celui de la Ligue, en instaurant des référents supporters au sein des clubs semi-professionnels, voire dans certains clubs amateurs qui en ont la capacité. Il s'agirait d'organiser la prévention et le dialogue avec les dirigeants, les équipes de jeunes, et les clubs de supporters, à l'instar de ce que fait la Ligue.

Tous ces efforts réalisés dans les centres de formation et auprès des équipes de jeunes en matière de lutte contre les discriminations n'étaient pas présents en 2019. Nous avions le sentiment que la responsabilité de résoudre les problèmes de discrimination reposait principalement sur les supporters. En revanche, l'efficacité globale de la démarche a été améliorée lorsque la Ligue a inclus les centres de formation, les dirigeants et les clubs.

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Mathilde Mandelli, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Deux points méritent une attention particulière, avec tout d'abord, la question de l'exemplarité des instances sportives françaises.

Dans le cadre de votre commission, vous prenez probablement connaissance de choses qui peuvent être problématiques au sein des instances du football français, liées non pas au racisme ou à l'homophobie, mais aux discriminations envers les femmes. Il existe manifestement un problème d'exemplarité des fédérations sportives. Quelle image renvoient-elles ?

Le deuxième point important renvoie à l'équilibre entre les sanctions et la prévention. Les sanctions collectives doivent prendre fin. Une femme qui dénonce un comportement discriminatoire dans un stade subira également les sanctions collectives, si par exemple la tribune est fermée en raison de cet incident. Les personnes doivent donc être sanctionnées individuellement, conformément à la loi. L'équilibre doit être parfaitement respecté, afin que les sanctions et les mesures de prévention soient clairement comprises et acceptées.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

On voit toute l'importance de la sensibilisation. En 2019, la réaction se limitait principalement à des sanctions, ce qui avait, par provocation, décuplé ces phénomènes.

Depuis qu'on a introduit la sensibilisation, nous observons l'émergence de bonnes pratiques. Par exemple, lors du match entre Rennes et Nantes, une spectatrice a signalé avoir subi des attouchements dans la tribune. Immédiatement, le groupe de supporters et le club ont réagi, et tous les moyens ont été mis à disposition de la justice pour identifier la personne responsable de ces actes.

À Nancy hier, l'entraîneur du Raid Star a rapporté avoir entendu des cris de singe provenant d'un ou deux supporters contre ses joueurs. Cela a entraîné une réaction immédiate, avec une réunion de crise des présidents des deux clubs et une implication de la police et du procureur. L'importance de ces sujets est désormais comprise grâce au travail de sensibilisation.

Des exemples liés à l'homophobie peuvent également être cités. À la mi-temps d'un match, un joueur de l'équipe de Metz a utilisé un terme inapproprié, à connotation homophobe. Or, ce joueur n'avait aucune intention homophobe. Néanmoins, le club, qui a fait des ateliers avec la Ligue, a rapidement compris la problématique et a demandé au joueur de s'adresser à la télévision pour s'excuser à la fin du match. Ces réactions rapides et automatiques sont devenues possibles grâce à la sensibilisation sur ces questions. Le travail de pédagogie a permis des changements significatifs par rapport au passé, notamment en matière d'agressions sexuelles, de racisme et d'homophobie.

Nous constatons que tout le travail de sensibilisation réoriente les comportements. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il désamorce complètement la situation, car ces mesures sont souvent prises après un incident, mais elles permettent de trouver la réponse la plus efficace a posteriori. L'objectif est désormais de prévenir ces comportements a priori, grâce à la sensibilisation.

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

L'homophobie et les violences de genre constituent les principaux problèmes dans nos stades. Le racisme de groupe est de son côté résiduel. La question centrale réside dans la nécessité d'une approche globale pour traiter ces problèmes. Se contenter d'éliminer les chants ne résoudra pas les problèmes et ne rendra pas nos stades plus accueillants pour tous. Nous devons admettre que nos stades peuvent être hostiles envers les personnes LGBT et toute personne s'écartant de la norme « hétérogenrée ». Pour cela, un travail en profondeur est nécessaire.

La formation des stadiers et l'accessibilité à des installations sanitaires appropriées sont également des éléments essentiels pour rendre nos stades plus accessibles. Les organisations de supporters sont disposées à contribuer dans ce domaine, mais la responsabilité ne peut pas reposer uniquement sur nos épaules. Tous les acteurs du sport français doivent se mobiliser sur ces sujets.

La question des infrastructures est d'une importance fondamentale. Il est inadmissible que des stades ne disposent pas de toilettes convenables, éclairées et dotées de portes fermant à clé. Ces problèmes de premier plan ne sont malheureusement pas traités.

La deuxième problématique concerne la question du signalement et du soutien que peuvent obtenir les individus isolés, les responsables de groupes de supporters et les dirigeants de clubs de football amateurs s'ils ont besoin d'engager des actions de prévention ou d'effectuer un signalement. Aujourd'hui il n'existe aucun point d'entrée clairement identifié au sein de la FFF. Si de tels points de contact existent, nous ne disposons pas de cette information.

Le sujet des sanctions a déjà été abordé. Il est impératif de lever ce tabou. Le rapport Houlié-Buffet, qui traite de cette question, n'a malheureusement pas été suivi d'effet de la part du gouvernement ou des instances sportives. Nous ne comprenons pas pourquoi la question des sanctions constitue un obstacle et un tabou. Nous devons pouvoir discuter des sanctions et analyser leur impact, afin de leur donner du sens. Il s'agit clairement d'un mur qui entrave notre progression.

Enfin, il convient de souligner la responsabilité majeure des instances sportives en ce qui concerne le développement d'une politique des droits humains. D'un côté, nous constatons l'implication d'acteurs, y compris des entités étatiques, issus de pays où la question des droits de l'homme pose des problèmes majeurs, investissant dans le sport français. En parallèle, les instances sportives françaises organisent des matchs dans des pays qui, de manière manifeste, sont hostiles envers les personnes LGBT. Je fais référence à la décision annoncée par la LFP et la FFF de délocaliser la finale de la Supercoupe du Trophée des Champions en Arabie Saoudite.

Or, les instances sportives françaises n'ont pas encore adopté de politiques claires en matière de droits de l'homme, et ne sont pas capables d'évaluer les risques associés à de telles compétitions et de mener une politique préventive.

Le football français doit impérativement combler son retard sur ces questions et établir des politiques solides en matière de droits humains.

La même exigence s'applique à la question de la diversité. Dans les grandes fédérations sportives européennes, il est devenu la norme d'avoir un référent diversité clairement identifié. Cette personne peut même être une figure publique, capable d'interagir avec les clubs et de s'exprimer dans les médias. Je ne suis pas sûr que ce rôle existe actuellement à la FFF. À ma connaissance, ce n'est pas le cas. Ce sujet fait partie des pistes à explorer. La FFF doit pouvoir se doter d'un référent diversité clairement identifié.

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Nous notons l'ensemble de vos propositions. N'hésitez pas à nous faire parvenir tous les documents que vous jurez utiles à notre commission.

Votre structure fonctionne-t-elle grâce à des subventions ?

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Notre structure bénéficie des cotisations annuelles des clubs de supporters.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

L'ANS avait également participé, il y a quelques années, à un programme Erasmus+ de l'Union européenne, sur la mise en place du référent supporter. Nous avions obtenu un budget qui servait à payer les frais et les salaires des personnes affectées. Or, étant tous bénévoles, nous avons eu le droit de garder le budget affecté aux salaires pour financer les travaux de l'association. Nous avons donc suffisamment de ressources financières pour ne pas avoir à en demander à autrui, ce qui nous permet de garder notre indépendance.

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En règle générale, qui a la charge du signalement lorsqu'un incident raciste ou homophobe survient ?

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Kilian Valentin, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Avec la vidéosurveillance, le club repère l'incident et dépose plainte contre X. Dans le cas de l'incident récent de Nancy, le club a prononcé une interdiction commerciale de stade. Cette interdiction directe intervient avant la prise en charge du dossier par la justice.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Un représentant du parquet se trouve généralement au PC sécurité du stade, aux côtés d'un représentant de la police et du directeur de la sécurité du club. Ces trois personnes sont déjà en mesure d'identifier les fauteurs de trouble grâce à la vidéosurveillance. Le procureur et la police peuvent ainsi lancer une enquête et une procédure. Le club peut de son côté déposer plainte et la Ligue l'encourage dans cette démarche.

Par ailleurs, la DILCRAH a annoncé sa volonté d'effectuer des articles 40 à chaque incident identifié. Une multiplicité d'acteurs peut donc intervenir dans ces situations. En outre, des associations de lutte contre les discriminations peuvent également effectuer des signalements.

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Le club n'est visiblement pas obligé de porter plainte si une organisation est mise en place.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

Le club porte plainte davantage par conscience morale, car il n'est juridiquement pas victime.

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Il semble que les joueurs noirs, victimes de comportements racistes, ne bénéficient pas réellement d'un accompagnement pour le dépôt de plainte. De plus, les faits ont tendance à être minimisés. Des propositions pourraient être formulées dans ce domaine, afin que les personnes victimes de racisme puissent bénéficier d'un accompagnement systématique pour les démarches juridiques.

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Ronan Evain, membre du Bureau de l'Association nationale des supporters

Les joueurs sur le terrain doivent pouvoir exercer leur métier dans un environnement sûr. Je ne connais pas réellement la responsabilité du club, en tant qu'employeur, dans ce cadre.

Je pense que la responsabilité repose également sur les syndicats de joueurs, qui doivent offrir un accompagnement adapté, de la même façon que les organisations de supporters accompagnent leurs membres lorsqu'ils ont besoin d'un soutien juridique.

Néanmoins, je ne me sens pas réellement légitime à m'exprimer sur la responsabilité des clubs ou des organisateurs de compétition.

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Pierre Barthélemy, membre du bureau de l'Association nationale des supporters

En Italie, un joueur avait été victime de comportements racistes. Or, ces coéquipiers lui avaient demandé de reprendre le match, afin de ne pas pénaliser leur équipe. Heureusement, ce type de situation n'existe pas en France. Nous ne pouvons pas nous permettre de vivre de telles situations.

La réaction des clubs sur les deux derniers incidents (Nancy et Dijon il y a quelques années) a été particulièrement rapide et forte.

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Merci pour votre participation à cette commission.

La commission auditionne M. Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES).

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Nous avons le plaisir d'accueillir monsieur Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES).

Monsieur, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie de votre disponibilité pour répondre à nos questions.

Nous avons entamé les travaux de cette commission d'enquête sur l'identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du monde sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif, le 20 juillet dernier.

L'Assemblée nationale a décidé de sa création, à la suite de très nombreuses révélations publiques de sportives et sportifs, et de diverses affaires judiciaires ayant trait à la gestion de certaines fédérations.

Nos travaux se déclinent donc autour de trois axes, les violences physiques, sexuelles ou psychologiques dans le sport, les discriminations sexuelles et raciales et les problématiques liées à la gouvernance financière des organismes de gouvernance du monde sportif bénéficiant d'une délégation de service public.

Je rappelle que cette audition est ouverte à la presse et qu'elle est retransmise en direct sur le site de l'Assemblée nationale.

L'association nationale des élus en charge du sport regroupe des maires et des élus municipaux en charge du sport. L'ANDES est un interlocuteur régulier des pouvoirs publics sur les politiques publiques, sportives et un lieu d'échange de bonnes pratiques destinées aux communes et intercommunalités.

Nous souhaitons connaître les constats et préconisations de votre association sur les sujets qui intéressent notre commission.

Le cadre existant pour prévenir, détecter et sanctionner les violences sexistes et sexuelles, les actes de racisme, les discriminations et les atteintes à la probité vous semble-t-il adapté ou doit-il être renforcé ?

Plus généralement, quelle appréciation portez-vous sur la gouvernance du secteur ?

La loi du deux mars 2022, visant à démocratiser le sport en France, a prévu que l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements, les associations, les fédérations sportives et les entreprises veillent à prévenir et à lutter contre toute forme de violence et de discrimination, dans le cadre des activités physiques et sportives.

Pouvez-vous nous présenter les différents leviers d'action des communes et des intercommunalités et nous présenter les actions conduites en ce sens ?

Avant de vous laisser la parole et d'entamer nos échanges, je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, impose aux personnes entendues par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire « je le jure ».

(M. Patrick Appéré prête serment.)

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Je suis adjoint au maire de la ville de Brest et, depuis 2020, président de l'ANDES. L'ANDES est une belle histoire autour du rugby. Des adjoints aux sports se sont retrouvés et ont décidé de joindre leurs forces pour peser auprès de la fédération, afin que le rugby français ne devienne pas comme le football français.

De cette petite association est née l'ANDES au niveau national. Aujourd'hui, près de 8 000 communes rayonnent autour de l'ANDES. Nous faisons partie, avec les bénévoles, des acteurs qui agissent au plus près des terrains de sport, des clubs et des associations sportives. Nous disposons d'abord d'une expertise de terrain. Nous avons pris connaissance de l'arrivée de ces problématiques dans les communes. Ces délits provoquent avant tout de la sidération et de l'écœurement. Il est nécessaire, dans un premier temps, de repérer dans quel contexte ces problématiques apparaissent.

Les communes que nous représentons représentent 82 % des financements du sport. Seulement 0,2 % du budget de l'État est consacré au sport. Des débats sur le budget ont actuellement lieu à l'Assemblée nationale et nous avons formulé une série de propositions, afin de faire évoluer cette situation.

Les budgets ont augmenté avec les Jeux olympiques, qui représentent un moment extrêmement important pour le sport français. Néanmoins, ces budgets sont toujours loin d'être à la hauteur des enjeux pour la suite, y compris pour l'héritage. Nous avons ainsi saisi un certain nombre de députés à ce sujet.

Par ailleurs, un autre élément concerne le bénévolat. 3,5 millions de personnes sont bénévoles dans le monde du sport en France. Nous craignons que la situation devienne compliquée après 2024. L'âge moyen des bénévoles s'accroît et un grand nombre d'entre eux décidera probablement d'arrêter son activité après les Jeux olympiques. Le renouvellement au sein des fédérations sera certainement compliqué, notamment au regard du statut précaire du bénévolat en France. En outre, la réforme des retraites complique un peu plus la situation.

Trouver des bénévoles dans les clubs et l'événementiel s'avère relativement simple, avec les parents et les sportifs amateurs. En revanche, la situation du bénévolat se complexifie dans les deuxièmes niveaux, les comités départementaux, les ligues ou les fédérations. De nouvelles contraintes apparaissent, avec des déplacements ou le traitement de sujets qui peuvent paraître plus ennuyeux. Faute de trouver des bénévoles pour réaliser ces missions, un certain « entre-soi » finit par s'installer, même si les personnes présentes réalisent un travail de grande qualité. Or, la démocratie a tendance à moins bien se porter lorsque « l'entre-soi » apparaît. L'omerta s'installe : « c'est entre nous et on n'a pas à le dire aux autres ».

Ces sujets apparaissent, car de notre point de vue la réflexion n'a pas été menée à son terme concernant le financement du sport ou le statut des bénévoles. Ces questions devront réellement être traitées si nous voulons que la situation puisse évoluer, avec un renouvellement et l'apparition de la parité au sein des équipes.

L'ANDES a très rapidement décidé de mettre en place une commission qui s'attaque à des problématiques variées, dont la citoyenneté, le bénévolat et les questions liées aux violences dans les stades ou dans d'autres contextes.

À Brest, la lutte contre les violences ne se limite pas uniquement au domaine sportif, mais est abordée de manière plus globale. Une « maison des victimes » a par exemple été créée. Il s'agit d'un lieu de ressources, de discussion, de signalement et de facilitation du dialogue entre les personnes. Ce lieu permet aux victimes de s'exprimer avec précision et confiance, en particulier sur les violences conjugales, mais aussi les violences dans le sport.

Il faut que les choses soient dites et il est essentiel de favoriser les signalements. Cependant, un travail de sensibilisation solide doit être mené pour atteindre cet objectif.

L'association qui revient souvent est bien entendu Colosse aux pieds d'argile. Pour y avoir recours il faut être très structuré et avoir un peu d'argent aussi. Ce n'est pas une association gratuite. L'ANDES travaille avec eux et on monte des programmes et des projets de sensibilisation autour de l'ensemble des questions relatives aux violences dans le sport.

La sensibilisation comprend également l'organisation de conférences entre les acteurs impliqués. L'Office des sports et les ligues organisent régulièrement des conférences pour rappeler les droits et devoirs de chacun.

Le secteur sportif souffre actuellement d'une situation financière difficile. 82 % du budget provient des communes, ainsi que 80 % des équipements. En outre, entre 25 % et 29 % des équipements ont plus de 50 ans, et nous devons composer avec ces contraintes.

Nous devons profiter de ces Jeux olympiques pour améliorer considérablement le secteur sportif, en mettant en place un plan Marshall. Actuellement, la ministre réalise un travail de qualité et les choses évoluent. Néanmoins, d'énormes progrès doivent encore être effectués, alors que le sport représente seulement 0,2 % du budget de l'État. Cette situation ne peut pas perdurer. Des installations sportives de mauvaise qualité sont un problème. Nous avons besoin d'infrastructures en excellent état, répondant aux normes écologiques et permettant d'accueillir des activités dans des conditions optimales.

Nous constatons également que des clubs refusent l'inscription d'enfants, car ils ne disposent pas de l'encadrement nécessaire.

La deuxième question qui se pose est la manière dont nous finançons l'emploi dans le domaine du sport. Les intermittents du spectacle jouent un rôle majeur dans le développement de la culture. Ce statut a le mérite d'exister. Dans le domaine sportif, nous ne disposons de rien de similaire. Il peut y avoir çà et là des emplois aidés, mais ces contrats prennent fin un ou deux ans plus tard, faute de moyens nécessaires pour les préserver. La situation des clubs est donc compliquée.

L'objectif de l'ANDES est donc de trouver les meilleures solutions pour améliorer la situation de nos clubs et permettre un fonctionnement à peu près normal.

Nous œuvrons sur trois axes : la sensibilisation, la prévention (avec l'organisation de conférences) et le signalement (le procureur doit être prévenu lorsque les faits sont avérés, avec notamment l'emploi de l'article 40).

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Connaissez-vous la cellule Signal-sports du ministère des Sports ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Oui, bien sûr. Nous utilisons beaucoup ce dispositif. Cependant, nous sommes agacés par la manière dont les réseaux sociaux traitent ces affaires. Signal-sports manque de publicité. La promotion de ce bel outil devrait être renforcée. Nos communes communiquent à ce sujet, mais cet outil mériterait une meilleure visibilité. Ce dispositif reste malheureusement trop méconnu.

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Connaissez-vous le périmètre des sujets traités par cette cellule ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Cette cellule s'intéresse au sujet des violences dans le sport et dans les stades.

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Pouvez-vous apporter des précisions sur le type de violences pris en compte par cette cellule ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Les violences sexuelles et physiques.

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Tout cela semble manquer de clarté pour un grand nombre d'acteurs. Vous êtes l'une des rares personnes au sein de ces auditions qui connaissent cette cellule. Ce constat confirme probablement le manque de publicité de l'outil que vous venez d'évoquer.

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

La commission mise en place, lors de l'avant-dernier congrès, nous a permis de prendre conscience de ce sujet.

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Savez-vous si les questions de racisme, de discrimination et d'homophobie intègrent le périmètre de cette cellule ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Oui, bien sûr. Ces sujets font très certainement partie de ce travail.

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Je vous pose cette question, car ce n'est pas clair. Pour la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH), ces questions ne font pas partie du périmètre de la cellule. Les informations du site internet à ce sujet manquent également de clarté. Néanmoins, certaines associations ont utilisé cette cellule pour signaler des incidents homophobes qui ont visiblement été traités.

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Il faut que ces questions fassent partie du périmètre de cet outil sans quoi il y a un problème. L'ensemble des sujets doit pouvoir être traité par cette cellule, au risque de rencontrer des difficultés de fonctionnement.

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Pouvez-vous apporter des précisions sur les personnes qui peuvent saisir la cellule Signal-sports ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Probablement les victimes ou les personnes concernées par ces problématiques, ainsi que les élus et les clubs.

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Les collectivités territoriales apparaissent comme les premiers acteurs du sport français, avec des engagements en faveur des installations sportives. Le bloc communal possède et entretient 70 % des équipements. Ces collectivités supportent également des charges d'investissement et de fonctionnement particulièrement importantes, estimées à 12 milliards d'euros chaque année. Ce rôle a été reconnu à sa juste valeur dans la gouvernance de l'Agence nationale du sport (ANS), puisque le collège des collectivités comprend autant de membres que ceux de l'État et du mouvement sportif. Il en est de même au sein du conseil d'administration, où les collectivités territoriales détiennent 30 % des droits de vote.

Quatre ans après la mise en place de ce nouvel opérateur de l'État. Quel bilan tirez-vous de l'action de l'ANS ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

La situation sous l'ancien système, avec le Centre national pour le développement du sport (CNDS), était scandaleuse. Il existait un face-à-face entre le mouvement sportif et l'État. Or, les collectivités territoriales, qui supportent une charge financière significative dans ce domaine, n'étaient pas présentes. Cette situation ne pouvait pas perdurer.

Nous avons demandé, dans un premier temps, à participer au CNDS, ou à disposer au minimum d'une voix consultative. De nombreuses négociations ont été nécessaires pour que la voix des collectivités soit prise en compte dans ce cadre.

La mise en place de l'ANS et de la nouvelle gouvernance n'est pas totalement satisfaisante. L'organisation reste « descendante ». L'État a gardé la main, même au niveau des régions. Les Délégations régionales académiques à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (DRAJES) et les préfets gardent la gestion des dossiers.

Nous ne sommes pas réellement satisfaits de cette évolution. L'ANS fonctionne correctement au niveau national, avec la gestion du sport de haut niveau qui relève des prérogatives de l'État.

Nous assumons nos responsabilités à l'ANDES, avec la prise de présidences de conférences régionales et des présidences de commissions des financeurs. Néanmoins, le poids de l'ANDES dans les discussions n'est toujours pas pris en compte à sa juste valeur.

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Le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) est présent au sein du conseil d'administration de l'ANS. L'objectif initial de l'ANS, avec cette participation, était de pouvoir bénéficier de financements supplémentaires. Avez-vous relevé des différences en ce sens depuis la mise en place de cette agence ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Non, je n'ai pas relevé de différences notables. Le MEDEF occupe pour le moment la place qui est la sienne, au regard de ce que ce mouvement représente, avec des entreprises qui travaillent dans le domaine sportif. Des financements de partenariat dans les grands clubs se mettent en place pour des raisons d'image. L'euro « public » sert totalement le bien commun. En revanche, l'euro « d'entreprise » sert principalement l'entreprise elle-même. Les questions de défiscalisation doivent également être prises en considération.

De son côté, la place de l'ANDES au sein de l'ANS résulte de notre désignation par l'Association des maires de France (AMF) au sein de son quota. L'ANDES aurait préféré être présente pour ce qu'elle est réellement, ce qui n'est pas le cas.

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Les conférences régionales du sport sont désormais installées en métropole. La plupart des projets sportifs territoriaux (PST) ont été adoptés. Cependant, à notre connaissance, aucun contrat pluriannuel d'orientation et de financement n'a été signé à ce jour. Pouvez-vous nous le confirmer ?

Par ailleurs, au vu des projets sportifs territoriaux adoptés, des engagements ambitieux sur le plan local, suivis de financements réels, peuvent-ils être espérés ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Pour l'instant, des PST ont été réalisés dans l'ensemble des régions. Les projets ont souvent été montés par des cabinets qui ont pris en compte la spécificité des territoires, en repérant des éléments intéressants, mais en enfonçant aussi des portes ouvertes et en relevant également des évidences. On sait qu'à Brest il y a la mer et donc probablement un peu de voile…On n'a pas besoin d'un rapport de 15 pages pour nous l'expliquer.

Les maires, les présidents de région et les présidents de Conseil départemental sont élus sur des programmes qui englobent généralement des sujets sportifs. La question qui se pose, à mon sens, est plus pragmatique. Il s'agit de passer en revue chaque plan pluriannuel d'investissement (PPI), afin de déterminer les projets d'investissement prévus pour les six prochaines années et de regarder comment les financer.

Le PST de Bretagne résulte d'un travail de qualité de la part du cabinet. Néanmoins, ce type de document ne répond pas réellement aux attentes et aux questions posées par les principaux intéressés. C'est un beau document de 300 pages, bien agrafé qui prend déjà la poussière. Nous avons davantage besoin de savoir ce que nous pouvons réaliser collectivement et de quels moyens nous disposons, tout en détectant les endroits où des carences apparaissent. S'il y a dans la région un endroit où 30 000 habitants n'ont pas de piscine, cela vaut peut-être la peine qu'on regarde tous ensemble ce qu'on peut y faire.

Ce travail nous permettrait de mettre en place des stratégies et d'être à la hauteur des enjeux. Actuellement, l'organisation est en place et les réunions se tiennent, mais des problèmes de quorum risquent rapidement d'apparaître si la situation n'évolue pas.

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La loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France a modifié l'article L. 100-2 du Code du sport, qui dispose désormais que l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements, les associations, fédérations et entreprises, veillent à prévenir et à lutter contre toute forme de violence et de discrimination dans le cadre des activités physiques et sportives.

Quels leviers sont mis en place dans la ville de Brest, en lien avec les clubs et les fédérations, pour travailler sur le volet des violences sexistes et sexuelles, de la discrimination et du racisme ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

En début d'année, avec le district de football, nous avons souhaité réunir les huit adjoints au maire de la métropole de Brest (qui représentent environ 230 000 habitants) et l'ensemble des clubs de foot des environs. L'objectif était de créer un début de saison permettant une sensibilisation sur les comportements déplacés et violents.

Un travail de qualité a été mené et un plan a été élaboré. Des panneaux de sensibilisation ont été installés dans certains lieux, notamment les vestiaires. Nous avons également alerté les clubs, afin qu'ils fassent preuve de pédagogie sur le respect des règles et des valeurs du sport.

Malheureusement, un incident s'est produit il y a seulement quelques jours dans l'un des stades du département. Il est donc nécessaire de s'occuper quotidiennement de ces questions et de remettre sans arrêt l'ouvrage sur le métier.

Nous sommes néanmoins fiers du travail que nous avons accompli, permettant une prise de conscience des élus, des présidents de clubs et des entraîneurs présents.

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Des personnes auditionnées dans le cadre de cette commission ont mentionné la ville de Lyon qui vient de conditionner les subventions aux clubs de son territoire au suivi de formations de lutte contre les violences sexuelles et sexistes.

Ce type de dispositif pourrait-il être décliné à l'échelle du pays, au niveau du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) ou d'autres structures ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Nous le faisons dans nos communes. À Brest, nous le faisons avec les clubs conventionnés. Avec une convention, un article de cette dernière fixera forcément les éléments importants à mettre en œuvre. Un rapport doit être élaboré par le bénéficiaire dans ce cadre. Un risque de non-paiement ou de remboursement de la subvention existe en cas d'absence de démarches dans ce domaine.

Néanmoins, la question de la mise en œuvre de ces dispositifs reste compliquée, avec la présence de bénévoles. Un bénévole est une personne qui accepte d'offrir du temps pour apporter son aide. Or, un bénévole finira par renoncer si des contraintes trop lourdes apparaissent. Nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux sur la question de l'emploi dans le sport. Cette question devra un jour être traitée.

À Brest, 70 % des clubs sont uniquement composés de bénévoles. Ce constat est dramatique pour le sport français. Les bénévoles réalisent un travail exceptionnel, mais la résilience a ses limites. Le nombre de bénévoles risque de chuter après les Jeux olympiques et paralympiques de 2024, et ces personnes ne seront probablement pas remplacées. La question du statut doit être posée, en prenant notamment le monde de la culture comme exemple.

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La mise en place des contrôles d'honorabilité a été évoquée au cours de certaines auditions dans le cadre de cette commission. Avez-vous des retours de la part des clubs à ce sujet ? Des difficultés semblent apparaître dans ce domaine.

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

La principale remontée est l'assurance pour les parents. Le contrôle d'honorabilité permet de rassurer les parents qui confient leurs enfants à des clubs. Néanmoins, certaines personnes bénévoles, qui réalisent un travail depuis des dizaines d'années, peuvent se sentir blessées face à une telle demande. Un dialogue et de la pédagogie peuvent s'avérer nécessaires dans certains cas, mais ces difficultés sont relativement simples à résoudre. Ces contrats permettent de sécuriser les pratiques.

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Pensez-vous que les clubs et les fédérations rencontrent des difficultés à mettre en place ce contrôle d'honorabilité ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Des discussions à ce sujet sont probablement nécessaires, afin de faire comprendre le dispositif. Ces contrôles ne doivent pas être considérés comme des reproches, mais simplement comme un outil pour améliorer collectivement la situation et l'image des clubs.

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Tous les clubs mettent-ils en place ce contrôle d'honorabilité ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Nous n'avons pas vérifié. Je ne peux pas répondre à cette question. Je ne dispose pas d'élément de contrôle à ce sujet. Nous ne nous sommes pas posé cette question avec les autres élus.

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À votre connaissance, les questions de prévention et de formation dans la lutte contre les violences et discriminations, dans le cadre des activités sportives, sont-elles bien prises en compte dans les projets sportifs territoriaux ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Oui, certainement. Ces questions apparaissent comme des problématiques majeures. Par exemple, un club de gymnastique a décidé de proposer des tenues particulières pour leurs gymnastes, afin de les protéger.

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Je note comme point d'alerte, évoqué au cours de cet entretien, la question du financement par l'État.

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Avec la crise énergétique, les collectivités s'attaquent à leurs équipements les plus énergivores, avec les écoles, mais également les gymnases ou les piscines. Or, le budget du sport, utilisé en partie pour isoler les équipements, ne sera pas suffisant pour améliorer par ailleurs les conditions des sportifs et faire en sorte que le sport se développe.

La construction d'un gymnase nécessite, pour un conseil municipal, de trouver 15 millions d'euros. Sans effet de levier, le projet ne peut pas fonctionner.

Un véritable plan Marshall doit être mis en place sur les équipements.

Par ailleurs, la question de l'emploi à l'intérieur du sport est essentielle. Des centaines d'enfants n'ont pas accès au sport, car les clubs n'ont pas les ressources humaines nécessaires pour les encadrer.

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Je prends également note de la question du statut des bénévoles et de l'emploi. Avez-vous d'autres préconisations à formuler dans le cadre de cette commission d'enquête ?

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Patrick Appéré, président de l'Association nationale des élus en charge du sport

Il est nécessaire d'agir sans relâche sur ces questions pour espérer être efficace. La mise en place de cette commission est une bonne idée. Ce genre d'initiative est importante, ainsi qu'une prise de conscience pour répondre aux trois axes : sensibilisation, prévention et signalement. Des efforts constants sont nécessaires pour améliorer la situation de manière durable.

La séance s'achève à quinze heures quarante-neuf.

Membres présents ou excusés

Présente. – Mme Sabrina Sebaihi

Excusée. – Mme Béatrice Bellamy