Commission des affaires sociales

Réunion du mercredi 10 avril 2024 à 9h30

La réunion

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La réunion commence à neuf heures trente.

La commission examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à améliorer le repérage et l'accompagnement des personnes présentant des troubles du neuro-développement et à favoriser le répit des proches aidants (n° 2118) (M. Paul Christophe, rapporteur).

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Cette proposition de loi nous est transmise par nos collègues sénatrices Jocelyne Guidez, qui en est l'auteur, et Anne-Sophie Romagny, sa rapporteure, après un passage fructueux au Sénat puisqu'elle a fait l'objet d'une adoption unanime en première lecture le 25 janvier dernier.

Pour la petite histoire, c'est la troisième fois que mon parcours législatif et celui de Jocelyne Guidez se croisent. Elle fut rapporteure de l'une de mes trois propositions de loi adoptées par le Sénat – celle de 2017 visant à étendre le dispositif de dons de jours de repos non pris aux aidants familiaux – et j'ai eu en 2018 l'honneur d'être le rapporteur de sa proposition de loi visant à favoriser la reconnaissance des proches aidants. Ces deux textes qui nous ont liés par le passé ont connu l'heureux destin d'être adoptés à l'unanimité des deux chambres, preuve, s'il en fallait, que le travail parlementaire est à l'œuvre.

Je ne peux que souhaiter une issue aussi favorable à la présente proposition de loi, issue d'un travail entrepris de longue date, en collaboration avec le milieu associatif. Elle s'inscrit dans la droite ligne des textes précédemment cités, qui visaient tous à reconnaître le rôle essentiel des aidants et à améliorer le quotidien des familles. Je forme donc le vœu que nos débats de ce jour transcendent les clivages partisans et politiques qui parfois nous séparent.

Il me suffit de me retourner sur le travail réalisé par notre commission pour être convaincu que nous en sommes capables. Comment ne pas citer les noms de Pierre Dharréville, Annie Vidal, Thibault Bazin, Brigitte Bourguignon, parmi tant d'autres ? Nous n'avons pas à rougir du travail collectif mené sur la question des aidants. Qu'il s'agisse des nombreuses propositions de loi déposées à l'Assemblée nationale et au Sénat, du rapport sur les proches aidants remis par le Conseil national consultatif des personnes handicapées, du déploiement de la stratégie Agir pour les aidants 2023-2027 ou des travaux menés par le comité interministériel du handicap, toutes ces investigations de fond nous permettent d'avoir désormais une connaissance précise et précieuse de la situation des aidants et de leurs proches.

La présente proposition de loi s'articule autour de trois titres, visant respectivement à améliorer les conditions de scolarisation des enfants présentant des troubles du neuro-développement (TND), à en établir un diagnostic précoce et à soutenir les proches aidants dans leur ensemble.

Le dispositif proposé à l'article 1er prévoit que, au plus tard le 1er septembre 2027, chaque circonscription académique métropolitaine et académie d'outre-mer, pour l'enseignement primaire – et non chaque canton comme proposé initialement – et chaque département, pour l'enseignement secondaire, dispose d'au moins un dispositif dédié à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves présentant un TND. Le nombre de dispositifs dédiés augmente, ce qui témoigne d'un effort continu pour améliorer la prise en charge de ces élèves. À la rentrée 2023, 515 unités associant des professionnels du secteur médico-social étaient implantées dans des écoles et des établissements ordinaires sur tout le territoire.

L'article 1er est plus ambitieux que notre trajectoire actuelle. La stratégie nationale 2023-2027 pour les TND prévoit de créer 380 dispositifs adaptés supplémentaires. L'article 1er propose une augmentation substantielle du nombre de créations de dispositifs prévues, afin de favoriser l'inclusion de ces élèves.

Toujours afin de défendre la qualité de la prise en charge de ces enfants, l'article 2 tend à renforcer la formation des équipes pédagogiques sur l'accueil et l'éducation des élèves en situation de handicap, en l'étendant aux enjeux spécifiques des TND.

L'article 3 visait à favoriser la formation des professionnels de santé sur les TND. Il prévoyait ainsi que les orientations pluriannuelles prioritaires de développement professionnel continu des médecins, psychiatres et autres professionnels intervenant auprès des mineurs comprennent des questions liées au handicap et aux TND. Il a été supprimé par le Sénat au motif que l'arrêté ministériel fixant ces orientations pour la période 2023-2027 satisfaisait déjà l'objectif poursuivi par cet article.

Je me range à la position de nos collègues sénateurs. Le parcours de formation des professionnels de santé est adéquat ; il importe désormais de mieux le faire connaître et d'en favoriser l'accès à tous les professionnels susceptibles de participer au repérage et à l'orientation des enfants présentant un TND.

L'article 4 prévoit une simplification des démarches auprès des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), afin de résorber un point de blocage dans l'accès aux droits et un motif d'insatisfaction récurrent des familles. Il prévoit aussi que la notification des aides scolaires et les démarches associées se fassent à l'échelle du cycle pédagogique, soit pour trois ans, et non un ou deux comme c'est encore le cas dans certaines MDPH. Cette bonne pratique, d'ores et déjà adoptée dans certains départements, doit être généralisée afin de mettre un terme à une surcharge administrative superflue.

L'article prévoit également que les professionnels de santé intervenant dans le parcours de bilan, de diagnostic et d'intervention des enfants soient informés des délais nécessaires aux commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées pour se prononcer sur les mesures propres à assurer leur inclusion scolaire.

Le titre II se concentre sur le repérage des TND. À l'heure actuelle, aucun des vingt examens médicaux obligatoires pour tout enfant n'est spécifiquement dédié au repérage des TND. Pourtant, ces troubles concerneraient un enfant sur six dans notre société. Cette forte prévalence et son augmentation au cours du temps devraient nous conduire à adopter une approche globale de cet enjeu de santé publique, à même d'assurer un repérage auprès de tous les enfants, qu'ils présentent ou non des facteurs de risque.

C'est pourquoi l'article 6 prévoit la création de deux examens médicaux obligatoires dédiés au repérage – et non au diagnostic – des TND. Ils sont fixés aux 18 mois et aux 6 ans de l'enfant, qui sont des âges clés, auxquels se manifestent souvent les premiers signes des TND.

L'article 5 précise que le service de repérage, de diagnostic et d'intervention précoce créé par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 s'appuie non seulement sur les examens obligatoires de l'enfant, dont ceux introduits à l'article 6, mais également sur d'éventuels examens complémentaires justifiés par la naissance prématurée de l'enfant ou tout autre facteur de risque identifié.

L'article 7, unique article du titre III, vise à pérenniser le dispositif du « relayage », que je ne vous ferai pas l'offense de détailler puisque nous en avons prolongé l'expérimentation à deux reprises. Depuis l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, la direction générale de la cohésion sociale a réalisé une évaluation très favorable de ce dispositif, justifiant sa pérennisation.

Ces articles constituent de réelles avancées, certes sans épuiser le sujet. J'espère que nous aurons une belle majorité pour envoyer un signal positif aux familles, dans la continuité du travail rigoureux réalisé précédemment par cette commission. Je remercie chacun pour son travail, à commencer par Ingrid Dordain, qui a participé à toutes les auditions à mes côtés.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Cette proposition de loi s'inscrit pleinement dans la stratégie nationale 2023-2027 pour les TND, dévoilée en novembre dernier. Elle met l'accent sur l'amélioration des conditions de scolarisation et sur l'établissement d'un repérage précoce, deux axes cruciaux pour assurer un accompagnement adapté et efficient en vue d'une inclusion pleine et réussie dans la société.

L'inclusion scolaire, et plus généralement dans la société, exige que les aidants bénéficient de solutions de répit. Les familles ont besoin de souffler et de retrouver une vie sociale et professionnelle pour faire face aux multiples difficultés qu'elles rencontrent et accompagner et soutenir leurs enfants.

Dans son article 7, la proposition de loi s'attache à cette question essentielle du soutien aux aidants, en prévoyant la pérennisation de dispositifs de répit, tels que le relayage et les séjours aidants-aidés, qui offrent aux proches un répit pouvant aller jusqu'à six jours, permettant de soulager leur épuisement, de prévenir des maltraitances, de retrouver un nouveau lien, de s'autoriser à souffler et de se reconnecter avec la fratrie.

Cette première pierre à l'édifice améliorera le repérage et l'accompagnement des personnes présentant des TND et favorisera le répit des proches aidants. Si la proposition de loi manque clairement d'ambition, elle est un premier pas dans le monde des TND. L'inclusion n'est pas circonscrite au milieu scolaire : elle doit également être portée et accompagnée dans la cité tout entière. À titre d'exemple, le relayage pourrait être élargi à des accompagnements extrascolaires, au sein de clubs sportifs et dans le milieu professionnel. Nous pourrions également envisager d'élargir le champ du répit à des séjours en faveur des aidants et des aidés seuls. Nous ne devons laisser personne sur le bord de la route.

Le groupe Renaissance se prononce en faveur de cette proposition de loi au caractère consensuel et impératif, qui s'inscrit dans la stratégie nationale 2023-2027 pour les TND.

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À la lecture du titre de la proposition de loi, nous nous sommes tous réjouis, sans doute, de penser que nous pourrions avancer sur la question du repérage et de l'accompagnement des TND et du répit des proches aidants. Autant dire qu'à la lecture du texte, ma joie est vite retombée. Nous ne sommes certainement pas les seuls, puisque lors de son examen en séance publique au Sénat, six amendements seulement ont été déposés.

Ce texte étant issu d'un groupe de la majorité, nous pensions sincèrement qu'il serait ambitieux. Mais chaque petite avancée est bonne à prendre et, heureusement, il y en a dans ce texte. C'est pourquoi nous le voterons.

Certains articles en revanche, de bon sens en apparence, ne semblent pas aboutis. Ils ne tiennent pas compte des tristes réalités dans lesquels ils entendent s'appliquer. Tel est notamment le cas de l'article 6. Dans un monde idéal, il ne poserait pas de problème, mais il ne vous a pas échappé que nous sommes dans un contexte de déserts médicaux. Rendre obligatoires deux examens risque de retarder les rendez-vous des familles qui pensent déjà avoir repéré des signes de TND chez leurs enfants. Les délais d'attente constituent un frein à la formulation d'un diagnostic. Il s'agit de l'un des gros écueils de cette proposition de loi.

Je regrette aussi l'absence de dispositions relatives à l'attractivité des métiers du soin et du secteur médico-social. Infirmières et médecins scolaires, accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), psychologues, pédiatres, moniteurs-éducateurs, psychomotriciens, orthophonistes : rien ne peut se faire sans eux. Nous insistons sur la nécessité de revaloriser ces métiers. Les bonnes idées sont louables mais il y a malheureusement un contexte défavorable qui, selon nous, entravera l'application du texte.

Par ailleurs, après la joie qui fut la mienne en voyant qu'un texte proposait une solution de répit pour les aidants, quelle ne fut pas ma déception de constater qu'il ne s'agissait pas de la création de nouvelles structures de répit, mais de la pérennisation d'une expérimentation reposant sur les professionnels médico-sociaux, sans concertation suffisante ni financement pérenne.

Enfin, je saisis l'occasion qui m'est offerte – mes amendements à ce sujet étant toujours considérés comme des cavaliers législatifs – de rappeler qu'il est urgent de permettre un droit de visite sans préavis des parlementaires dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS), notamment dans les instituts médico-éducatifs. Souvenez-vous, chers collègues : je vous ai offert l'occasion d'adopter cette disposition !

Je ne vous rappellerai pas les horreurs du documentaire Scandales et défaillances de l'État : les dossiers noirs du handicap, diffusé dans l'émission Zone interdite, et me contente de dire qu'il est temps d'assumer notre rôle de lanceur d'alerte, afin que nos lois soient aussi cohérentes que possible.

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Nous sommes réunis ce matin pour poser une question qui a souvent été renvoyée au domaine de l'intime mais qui est éminemment politique : celle de la façon d'accompagner les personnes concernées et celles qui les aident. Les enfants souffrant d'un TND peuvent avoir un trouble du spectre autistique, un trouble de l'attention ou un trouble spécifique du langage. Ces pathologies vont ensemble plutôt que séparément.

Le texte nous est présenté comme visant deux objectifs : améliorer le repérage et l'accompagnement des concernés ; améliorer le quotidien des familles. Il ne s'agit pas uniquement d'une résolution de notre part : le Comité européen des droits sociaux a conclu que la France agissait en violation de ses engagements, notamment de la charte sociale européenne, en organisant des modalités de ségrégation des enfants en situation de handicap.

Le premier point de vigilance est le suivant : l'inclusion des enfants présentant ces difficultés ne peut être réalisée à moyens constants. Les insérer dans des classes surchargées de trente, trente-quatre, trente-six élèves, c'est leur faire une violence.

Par ailleurs, nous ne devons pas transformer les aidantes et les aidants ni les personnes qui les accompagnent en travailleurs et en travailleuses gratuits ou précaires, privés de statut. Tel est le risque du cadre dans lequel s'inscrit le texte – je sais que la position personnelle du rapporteur peut être différente – qui nous inspire de fortes réserves.

En somme, monsieur le rapporteur, vous souhaitez obliger le Gouvernement à tenir sa parole s'agissant de la stratégie nationale 2023-2027 pour les TND. Il serait bon qu'il la tienne – ce serait même une première. Nous y sommes favorables, et disposés à l'accompagner.

De quoi dépendra notre vote ? D'abord des conclusions des discussions que nous aurons sur le statut des personnes qui accompagnent. Nous défendons le statut d'AESH. Vous proposez, pour votre part, plusieurs dérogations au droit du travail qui nous semblent exposer les travailleuses et les travailleurs chargés de l'accompagnement à des risques professionnels.

Notre vote dépendra ensuite de la date des premiers examens de repérage. Il nous semble qu'ils gagneraient à être réalisés avant l'inscription à l'école, afin de faire du moment scolaire celui de l'expression des conclusions du repérage.

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Il est de notre devoir de garantir la scolarisation des enfants présentant un TND. Certains dispositifs favorisent leur inclusion, mais ils ne sont pas assez nombreux. L'article 1er y remédiera en partie, grâce à la création d'au moins un dispositif dédié à la scolarisation en milieu ordinaire par circonscription académique, avec l'appui de professionnels du secteur médico-social.

Les TND et l'accompagnement des personnes qui en sont atteintes nécessitent un réel supplément d'énergie. La complexité des procédures constitue une charge administrative insupportable. C'est pourquoi l'article 2 veut renforcer la formation des équipes pédagogiques. L'article 4 consacre, lui, la nécessité de notifier les aides scolaires pour la durée d'un cycle pédagogique, soit trois ans, et non un an comme le font certaines MDPH.

Les deux examens médicaux obligatoires de repérage des TND, fixés à 18 mois et à 6 ans, sont intégralement pris en charge par l'assurance maladie. Cette disposition est essentielle : le repérage précoce des troubles est décisif pour réduire les pertes de chance et améliorer l'efficacité de la prise en charge. La stratégie nationale affichée par le Gouvernement semble témoigner que celui-ci a pris toute la mesure de l'importance du sujet. Nous y serons attentifs.

Si cette proposition de loi ne peut pas tout résoudre, elle exploite les outils législatifs en notre pouvoir pour faciliter grandement la vie des familles concernées. Elle permettra de simplifier les parcours et favorisera le répit des proches aidants. Le groupe Les Républicains la soutient.

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Le groupe Horizons et apparentés est largement conscient de la nécessité de tout mettre en œuvre pour assurer un accompagnement et un soutien efficace et digne des personnes présentant des TND, favoriser leur inclusion et permettre à chacun de vivre le plus normalement possible.

Nous partageons donc l'ambition du texte, qui vise à renforcer l'accompagnement en milieu scolaire ordinaire en garantissant un accueil adapté des élèves présentant des TND de manière égale sur tout le territoire, et à mieux former les enseignants et personnels de l'éducation nationale à ces enjeux. Afin de ne pas oublier l'importance de la prévention, nous serons attentifs à l'agencement des deux nouveaux examens de détection précoce prévus, étant donné que le parcours existant, qui comprend vingt examens de la naissance à l'âge de 20 ans, est déjà très lourd et que les médecins formés à ces pratiques manquent.

Le Président de la République a rappelé la semaine dernière, lors de sa visite d'une maison de l'autisme dont il avait annoncé la création en 2020, que le Gouvernement et la majorité poursuivent la mise en œuvre de la stratégie nationale 2023-2027 pour les TND. Celle-ci s'articule autour de six engagements et de quatre-vingt-une mesures concrètes, pour un budget de 680 millions d'euros. Elle vise notamment à intensifier la recherche, à avancer l'âge de repérage et des diagnostics, à adapter la scolarité et à sensibiliser la société aux TND.

Le groupe Horizons et apparentés votera la proposition de loi.

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Cette proposition de loi de la sénatrice Jocelyne Guidez a été adoptée à l'unanimité par le Sénat.

Beaucoup a été fait par ce gouvernement, depuis plusieurs années. Je sais notre rapporteur, Paul Christophe, très attentif à l'inclusion en milieu scolaire des enfants souffrant de certaines difficultés dans les meilleures conditions. J'aimerais que nous ayons une pensée pour les parents, auxquels nous proposons un autre avenir que celui auquel ils étaient destinés. Aux enfants hyperactifs comme à ceux qui souffrent de troubles du spectre autistique, de troubles de l'attention ou de tout autre TND, il faut offrir une possibilité d'ouverture en milieu scolaire.

Le texte vise non seulement à améliorer l'accompagnement et la scolarité des enfants, mais aussi leurs conditions de scolarisation. Il donne les moyens d'établir un diagnostic précoce – plus il l'est, plus la thérapeutique est adaptée – et il soutient les aidants. Si l'on parle couramment d'aidants pour nos aînés, d'autres accompagnent des enfants : les parents sont souvent obligés de modifier leur vie professionnelle pour leur offrir la disponibilité, l'amour et l'accompagnement dont ils ont besoin.

S'agissant de la stratégie nationale 2023-2027 pour les TND, je me contenterai de rappeler que les engagements 3 « Avancer l'âge du repérage et des diagnostics et intensifier les interventions précoces », 4 « Adapter la scolarité de la maternelle à l'enseignement supérieur » et 5 « Accompagner les adolescents et les adultes » sont l'illustration d'une prise de conscience.

Nous soutiendrons bien sûr cette proposition de loi. Sur cette question, le Parlement a démontré son efficacité et sa vision réelle des choses.

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En France, une personne sur six présente un TND. La détection de ces troubles est pourtant largement perfectible : aucun des vingt examens de santé obligatoires pour les enfants n'est dédié à leur repérage. De ce point de vue, la proposition de loi que nous examinons semble bienvenue. La création des examens à 18 mois et à 6 ans permettra notamment une détection améliorée des TND et un accompagnement plus adapté des enfants.

Toutefois, les dispositifs afférents, tels que les unités localisées pour l'inclusion scolaire et les unités d'enseignement maternelle autisme devront être consolidés. Ils sont loin d'être en nombre suffisant et ne permettent pas de répondre à la naissance d'environ 7 000 enfants autistes chaque année. La formation des personnels devra aussi être renforcée.

Nos principales interrogations portent sur l'article 7. De toute évidence, des solutions de répit pour les proches aidants doivent être trouvées. Toutefois, nous nous interrogeons sur la généralisation d'une expérimentation dont aucun bilan n'a été dressé et transmis à la représentation nationale, alors même que le Gouvernement s'y était engagé.

La seule évaluation a été communiquée par la rapporteure du texte lors de son examen au Sénat. Si les retours figurant dans son rapport sont globalement positifs, des lacunes ont été identifiées en matière de fatigue des intervenants et d'application des régimes d'équivalence entre heures de travail et heures de présence. Nous nous interrogeons sur les risques induits par cette entorse au droit du travail. Nous regrettons que notre amendement visant à décaler de neuf mois la généralisation de l'expérimentation en vue de procéder à une évaluation correcte ait été déclaré irrecevable. Des marges d'amélioration sont possibles. Nous aurions aimé légiférer en étant pleinement éclairés.

En dépit de ces interrogations, le groupe Socialistes et apparentés se prononcera favorablement sur cette proposition de loi.

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Monsieur le rapporteur, vous avez conclu votre présentation en disant qu'il fallait envoyer un signal positif aux familles. Sans doute, nous l'enverrons, mais les familles ne peuvent s'en contenter. Elles ont besoin de moyens. Nous appelons l'attention sur le caractère insuffisant de la proposition de loi en matière de création de places permettant de scolariser en milieu ordinaire des élèves présentant un TND. La présence d'au moins un dispositif par circonscription académique, pour l'enseignement primaire, et par département, pour l'enseignement secondaire, n'est prévue que dans trois ans et demi.

En raison du manque d'ambition de ses objectifs, la stratégie nationale 2018-2022 pour l'autisme au sein des TND a permis de créer seulement 4 000 places supplémentaires en cinq ans. Le délégué interministériel à la stratégie nationale pour les TND avoue lui-même que le nombre d'unités d'enseignement maternelle autisme, d'unités d'enseignement élémentaire autisme et de dispositifs d'autorégulation est largement insuffisant. On en dénombrait 516 à la rentrée 2023, soit un pour quatre cantons, offrant une capacité d'accueil de 4 200 places alors même que 7 000 enfants autistes naissent chaque année.

La proposition de loi, comme la stratégie nationale 2023-2027 pour les TND dans laquelle elle s'inscrit, n'est pas à la hauteur des besoins d'accompagnement. Même là où elle voit juste, par exemple sur la question de la scolarisation, elle n'est pas assez ambitieuse. Le nombre de places n'est pas tout, il faut prévoir des moyens humains adéquats – en la matière, le déficit par rapport aux besoins est invraisemblable. Les AESH, pour lesquels le texte prévoit des dérogations que nous jugeons inacceptables, n'ont pas de statut et sont très insuffisamment rémunérés et formés, alors même qu'ils accompagnent parfois plusieurs enfants souffrant de pathologies distinctes.

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Avant-hier, nous adoptions une proposition de loi sur les AESH. Aujourd'hui, nous débattons de la scolarisation des enfants présentant des TND. La promesse de l'école inclusive est encore loin d'être tenue. La capacité d'accueil des structures est largement inférieure aux besoins.

La proposition de loi que nous examinons prévoit de doter chaque circonscription académique ou chaque département, d'ici à 2027, d'un dispositif d'accueil des élèves présentant des TND. Nous y souscrivons. Toutefois, si le Gouvernement ne garantit pas les moyens financiers et humains nécessaires, l'article 1er du texte restera un vœu pieux.

S'agissant des formations offertes aux équipes pédagogiques, toutes ne durent pas vingt-cinq heures, et certaines suivent une maquette datée et incomplète. Quant aux AESH, ils ne bénéficient pas toujours de leurs soixante heures de formation.

La disposition sur l'allongement de la périodicité des décisions des MDPH, qui serait calée sur le cycle scolaire, est une simple possibilité. De façon générale, il faut alléger la charge administrative des familles suivies par les MDPH, dont les délais d'instruction sont très longs, allant parfois jusqu'à une année scolaire, ce qui entraîne des pertes de chance et une exclusion scolaire.

La priorité demeure le repérage précoce. La création de deux examens spécifiques de repérage est une bonne mesure. Elle complétera le service prévu par la dernière LFSS. Toutefois, nous craignons qu'elle se heurte à la démographie médicale et à l'insuffisance de formation des professionnels de santé.

Nous souscrivons enfin à la pérennisation des dispositifs de répit et de relayage, qui permettent de soulager les aidants. Toutefois, elle ne doit pas être réalisée au détriment des professionnels. Nous aurions souhaité disposer d'une évaluation complète des expérimentations.

En dépit de ces réserves, notre groupe votera le texte.

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Le nombre d'élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire a quadruplé depuis 2006. Le rapport de la commission des affaires sociales du Sénat sur le texte que nous examinons fait état de difficultés importantes s'agissant des dispositifs dédiés à la scolarisation en milieu ordinaire. L'insuffisance des capacités d'accueil entraîne une exclusion de fait des élèves aux troubles les plus sévères.

Dans ce contexte de défaillances dans l'inclusion scolaire des élèves atteints de TND, la présente proposition de loi prévoit plusieurs avancées bienvenues, notamment celle qui consiste à généraliser à toutes les circonscriptions académiques les dispositifs d'accompagnement des élèves concernés, celle qui vise à renforcer la formation du personnel de l'éducation nationale sur ces questions, ou encore les dispositifs de diagnostic et ceux permettant un répit aux proches aidants.

Toutefois, nous pouvons d'ores et déjà prévoir des difficultés manifestes d'application de ces mesures sur le terrain, en raison du manque flagrant d'AESH et des dégradations de leurs conditions de travail. Avec une rémunération qui n'atteint même pas 800 euros par mois et des contrats à durée déterminée de vingt-quatre heures par semaine, les AESH, qui sont à 90 % des femmes, sont en proie à une précarisation importante et à une désertion croissante.

Le groupe Écologiste - NUPES rappelle que les missions remplies par les AESH relèvent de l'intérêt général et répondent aux fondements mêmes de l'égalité républicaine et de l'accès à une éducation sans considération du niveau de vie ou d'une situation de handicap. Si cette proposition de loi permet des avancées dans l'implantation des dispositifs d'accompagnement des élèves atteints de TND, son application sera sérieusement mise en défaut en l'absence d'un plan d'urgence visant à provoquer un choc d'attractivité du métier d'AESH et à faire de l'école inclusive une réalité pour les enfants en situation de handicap.

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Vous avez signalé les limites de ce texte, qui sont inhérentes à toute proposition de loi. L'exercice est frustrant, mais chacun sait que nous sommes contraints à rester dans un champ plus resserré qu'un projet de loi. C'est ce qui explique que bon nombre d'amendements ont été déclarés irrecevables au titre des articles 40 ou 45 de la Constitution. Je partage l'intention de progresser en matière de capacité et de qualité d'accueil, ainsi que de formation et de statut des personnels, mais nous ne pouvons guère, dans le cadre d'une proposition de loi, aller au-delà.

S'agissant de l'article 7, les auditions nous ont particulièrement éclairés sur l'évaluation de l'expérimentation menée en matière de relayage. Certes, celui-ci n'est qu'une solution de répit parmi d'autres et il faut aborder la question dans son ensemble. Toutefois, je puis vous assurer que l'expérimentation a démontré son utilité. Nous disposerons par ailleurs du rapport prévu au titre de la loi pour un État au service d'une société de confiance, dite « loi Essoc », avant l'examen du texte en séance publique, le 2 mai prochain.

Article 1er : Ouvrir sur l'ensemble du territoire national des dispositifs consacrés à l'accueil d'élèves qui présentent un trouble du neuro-développement et requièrent un accompagnement médico-social

Amendement AS67 de M. Paul Christophe

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L'amendement vise à opérer une clarification rédactionnelle à l'alinéa 2, pour en améliorer la lisibilité. Il tend à préciser la liste des ESMS dont les personnels sont susceptibles d'intervenir dans les dispositifs adaptés à la scolarisation en milieu ordinaire d'élèves présentant un TND, en excluant de cette liste les centres d'action médico-sociale précoce (Camsp). Ces structures ont vocation à assurer le repérage, le diagnostic et le suivi médical des enfants avant leur scolarisation. Leur personnel n'intervient dans aucun dispositif de scolarisation. La mention est donc superflue, quel que soit le niveau d'enseignement considéré.

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Nous ne comprenons pas la réécriture de l'alinéa 2. Les Camsp accueillent des enfants âgés de 0 à 6 ans ; la scolarisation commence à 3 ans. L'amendement exclut des personnels essentiels du suivi des enfants atteints de TND. Ils doivent au contraire être plus étroitement associés, afin d'améliorer la coordination et la qualité de leur prise en charge.

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Le personnel des Camsp n'intervient pas dans la scolarisation de l'enfant.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'amendement AS11 de Mme Mathilde Paris tombe.

La commission adopte l'article 1er modifié.

Après l'article 1er

Amendement AS14 de Mme Mathilde Paris

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Cet amendement vise à demander un rapport pour évaluer les moyens financiers et humains nécessaires à la mise en place, sur l'ensemble du territoire national, des dispositifs dédiés à l'accueil des élèves présentant des TND. En effet, les 516 dispositifs existants ne peuvent accueillir que 4 200 élèves, de la maternelle au lycée, ce qui est largement insuffisant compte tenu des 7 000 enfants autistes naissant chaque année. Un accroissement massif est donc un besoin impérieux.

Pour pallier ce manque, l'article 1er tendait à garantir l'existence d'au moins une classe dédiée par canton pour l'enseignement élémentaire, et une par département pour le secondaire. Au regard des coûts induits, et dans le souci de permettre la mise en œuvre effective de la loi, la commission des affaires sociales du Sénat a réduit le nombre de dispositifs prévus, ce qui va dans le mauvais sens.

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Je serai plutôt défavorable à l'ensemble des demandes de rapport – c'est une constante, vous ne pouvez pas me le reprocher, et nous savons tous quel sort leur réserve le Sénat.

Je rappelle que, sur les 680 millions d'euros prévus par la stratégie nationale 2023-2027, 130 millions sont consacrés à l'adaptation de la scolarité aux besoins des élèves présentant des TND, comprenant l'ouverture de 380 dispositifs spécifiques. Cette proposition de loi vise à aller encore plus loin.

La maille territoriale que vous retenez devrait aussi être corrigée, le canton n'étant pas une circonscription du service public de l'éducation. Enfin, les dispositifs prévus par l'article 1er n'ont pas vocation à accueillir l'ensemble des élèves porteurs de TND, mais seulement ceux qui ont besoin d'un accompagnement médico-social.

J'émets donc un avis défavorable, en vous invitant à solliciter l'avis de la ministre en séance.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS30 de M. Pierre Dharréville

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Nous souhaitons que le Gouvernement remette dans les six mois un rapport dressant le bilan des créations de dispositifs dédiés à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves présentant un TND, sur l'ensemble du territoire, et formulant des recommandations en vue de créer autant de places qu'il y a d'enfants concernés.

Nous voulons attirer l'attention sur le manque d'informations, sur leur faible accessibilité, et sur l'absence de bilan des précédentes mesures. Alors que beaucoup d'acteurs se disent extrêmement déçus, les effets d'annonce sans conséquence sur le terrain ne sont pas une option ; ce serait même le coup de trop. Il faut documenter l'état des lieux pour avancer de la bonne façon.

Nous refusons cette situation dans laquelle les parents qui ont les moyens parviennent à scolariser leurs enfants, quand ceux qui ne les ont pas, laissés pour compte, doivent garder leurs enfants chez eux. Nous recevons toutes et tous des témoignages de cette déscolarisation massive, de la détresse intenable des parents, d'enfants privés de leur droit à l'éducation. C'est inacceptable. Nous devons saisir l'occasion qu'offre ce texte pour exprimer les revendications de ces familles.

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Notre rôle est bien de porter des revendications. Il me semble que ce que vous souhaitez relève davantage du travail parlementaire que d'une demande de rapport – nos collègues du Sénat Jocelyne Guidez, Laurent Burgoa et Corinne Féret ont déjà remis un rapport récemment sur cette question. Il nous revient à nous de nous atteler à ce suivi en continu, car nous nous inscrivons dans une stratégie de moyen et long terme. Ingrid Dordain travaillant également sur cette question, nous aurons l'occasion de l'évoquer à nouveau.

Avis défavorable.

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Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas esquiver constamment vos responsabilités. Vous nous dites que, dans le cadre d'une proposition de loi, nous manquons de moyens ; mais, quand nous demandons un rapport, que vous préférez le suivi parlementaire. Un rapport permettrait peut-être de documenter suffisamment la question pour que vous ayez envie d'y consacrer des moyens réels, par le biais d'un projet de loi. Sans élément, on reste dans le flou et on ne peut rien construire – ce qui permet peut-être de justifier l'inaction gouvernementale.

Ne sous-estimons pas l'intérêt des rapports : ils nous permettent d'affiner notre connaissance des sujets et d'identifier certains manques. Comment faire un projet de loi sans avoir quantifié les besoins ? Si vous voulez avancer, et avec des moyens supplémentaires, vous devriez accepter notre demande.

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Si nous voulons que la loi s'applique effectivement, sur un champ étendu et de façon pérenne, il faut savoir combien cela coûtera aux finances publiques et quels moyens doivent être déployés. Sans rapport d'évaluation, nous restons dans une forme d'intention. On ne nous permet pas, à nous parlementaires, de faire en sorte que la loi soit réellement mise en œuvre sur l'ensemble du territoire. Ce n'est pas un rapport de circonstance mais d'applicabilité de la loi. Aussi devrions-nous toutes et tous voter cet amendement.

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Je soutiens également cet amendement, car il importe de connaître exactement l'état des lieux – vous voyez, nous ne sommes pas dogmatiques. J'étais dans une agence régionale de santé la semaine dernière, où le préfet et le président du département se targuaient que 1,5 million d'euros aient financé 50 000 solutions, notamment pour la scolarisation d'enfants handicapés. On ne peut pas se satisfaire qu'un enfant handicapé sur quatre ne soit pas scolarisé, et cela fait longtemps que les parents ont fait le deuil des 50 000 solutions promises : eux, ils n'en trouvent pas. Un rapport circonstancié serait donc une bonne chose.

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Le rapport de nos collègues du Sénat date de mai 2023, et les travaux que nous menons dans le cadre des semaines de contrôle permettent aussi de nous éclairer. N'exagérons pas : ce n'est pas ce rapport qui conditionne la bonne application du texte.

Yannick Monnet évoque notre mission ; elle consiste justement à contrôler. Je suis un fervent défenseur des missions parlementaires qui permettent d'organiser le contrôle. Et, puisque vous m'accusez de ne pas faire mon travail, permettez-moi une correction sémantique : nous ne déposons pas des projets, mais des propositions de loi.

La commission rejette l'amendement.

Article 2 : Former les personnels du service public de l'éducation à l'accueil des élèves présentant un trouble du neuro-développement

Amendement AS13 de Mme Mathilde Paris

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C'est un amendement de repli, l'original ayant hélas été déclaré irrecevable. Il s'agit d'élargir le champ des professionnels pouvant réaliser les examens de détection des TND aux 9 mois et aux 3 ans de l'enfant.

En effet, les services sont déjà saturés : dans les territoires, il y a un an d'attente pour obtenir un rendez-vous et un diagnostic dans un centre de ressources autisme, et il faut ensuite beaucoup de temps pour installer la prise en charge. Si nous étendons le dispositif à l'ensemble de la population infantile sans habiliter davantage de personnels à réaliser ces diagnostics, nous accentuerons l'embouteillage, avec un résultat contraire à celui recherché : les enfants présentant réellement un TND ne seront diagnostiqués et pris en charge qu'avec retard. Votre intention est bonne mais elle peut avoir des effets dévastateurs.

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J'entends votre inquiétude, mais je dois répondre au corps de votre amendement, qui est différent. Votre rédaction suggère implicitement que les TND ne sont pas constitutifs d'un handicap, au sens de l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles, alors qu'ils sont bien une cause de « limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société ».

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 2 non modifié.

Après l'article 2

Amendement AS43 de Mme Laure Lavalette

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L'article 2 visant la formation initiale et continue des enseignants en matière d'accueil et de prise en charge des élèves atteints de TND est salutaire. Vous oubliez néanmoins les enseignants contractuels, recrutés de plus en plus souvent à la hâte pour pallier le manque de candidats aux concours – nous savons bien que le métier connaît un problème d'attractivité.

Les enseignants sont en première ligne pour détecter d'éventuels TND chez leurs élèves. Leur formation nous paraît donc essentielle, à plusieurs fins : réduire l'errance diagnostique des familles ; sensibiliser les enseignants à une approche humaine ; et éviter le harcèlement scolaire, les TND pouvant susciter l'acharnement des autres enfants en raison de leur impact sur les habiletés sociales – le harcèlement scolaire fait l'objet d'une forte médiatisation à la suite de l'engagement de Gabriel Attal. Ne pas intégrer les enseignants contractuels dans ces modules constituerait donc une injustice, par rapport aux titulaires.

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Le renforcement de la formation des personnels que prévoit l'article 2 s'applique également aux enseignants contractuels. Nous devrons bien sûr être attentifs à sa mise en œuvre. Par ailleurs, la formulation de votre demande de rapport, visant à mettre « en exergue les lacunes en la matière », me semble un peu partiale.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Article 3 (supprimé) : Améliorer la formation continue des professionnels de santé quant aux situations de handicap et aux troubles du neuro-développement

Amendement AS29 de M. Yannick Monnet.

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Monsieur le rapporteur, je n'ignore pas que c'est le Gouvernement qui dépose les projets de loi, mais je sais également que vous faites partie d'une majorité parlementaire. Vu votre appétence pour le sujet, le Gouvernement serait bien inspiré de vous consulter et, si un rapport vous donnait des éléments, vous pourriez peser sur la majorité.

Par cet amendement, nous souhaitons rétablir l'article 3, supprimé par le Sénat. Il vise à sécuriser, en l'inscrivant dans la loi, la formation continue des professionnels de santé au repérage, au diagnostic et à l'accompagnement des TND. Le Sénat a dit préférer la souplesse des orientations actuelles, mais nous ne voyons pas en quoi le dispositif proposé serait rigide : il prévoit simplement d'inclure des orientations relatives à ce sujet, poursuivant l'objectif primordial d'amélioration de la formation sur les TND.

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Merci, cher collègue, de me soutenir et de m'encourager, je savais pouvoir compter sur vous. Par-delà les questions de majorité ou d'opposition, c'est la coconstruction qui nous importe.

Le Sénat a supprimé cet article car l'objectif poursuivi est entièrement satisfait en droit. En effet, parmi les orientations mises en œuvre pour les années 2023 à 2025, la n° 7 concerne la « prise en compte des spécificités de prise en charge des patients en situation de handicap » et la n° 21 « le repérage, le diagnostic et les grands principes d'accompagnement du syndrome de l'autisme (TSA) et des troubles du neuro développement (TND) chez les adultes et chez l'enfant ». L'enjeu est donc plutôt d'inciter les professionnels de santé à s'inscrire aux formations correspondantes.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

La suppression de l'article 3 est maintenue.

Article 4 : Prévoir que les mesures nécessaires à la scolarisation des élèves en situation de handicap peuvent être prises pour la durée d'un cycle pédagogique et améliorer l'information des professionnels de santé

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS63 et AS64 de M. Paul Christophe.

Puis elle adopte l'article 4 modifié.

Après l'article 4

Amendement AS36 de Mme Caroline Fiat

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C'est encore une demande de rapport, qui porterait sur le nerf de la guerre : les conditions de scolarisation. Alors que nous voulons inclure l'ensemble des enfants, quelles que soient leur situation ou leurs difficultés scolaires, les classes spécialisées sont avant tout centrées sur ceux qui sont atteints de troubles du spectre autistique (TSA). Nous manquons d'informations, de moyens et de propositions concernant les enfants qui présentent des troubles spécifiques du langage et de l'apprentissage (TSLA) ou un trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité. Un accompagnement en milieu scolaire ordinaire pourrait pourtant leur être utile.

S'ajoutent à cela une série de politiques publiques qui dégradent les conditions de scolarisation de ces enfants, comme la fermeture des petites écoles en milieu rural, qui permettaient un meilleur accompagnement en raison du plus petit nombre d'élèves par classe. Les conséquences de ces politiques publiques ne sont pas anticipées – une mission d'information sur ce sujet serait bienvenue. La mission d'information sénatoriale intitulée « Prise en charge des troubles du neuro-développement : le compte n'y est pas », faisait elle aussi état d'un « angle mort ».

Compte tenu de tout cela, ce rapport permettrait au Gouvernement de disposer des informations utiles pour élaborer un projet de loi, que vous serez personnellement bien placé pour conduire. Il y a donc là un intérêt transpartisan.

La commission rejette l'amendement.

Article 5 : Intégrer les facteurs de risque de troubles du neuro-développement aux éléments sur lequel s'appuie le service de repérage, de diagnostic et d'intervention précoce

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS61 et AS62 de M. Paul Christophe.

Puis elle adopte l'article 5 modifié.

Article 6 : Créer des examens de repérage des troubles du neuro-développement obligatoires pour tous les enfants de 18 mois et 6 ans

Amendement AS37 de M. René Pilato

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L'introduction de deux consultations de dépistage obligatoires et gratuites, à 18 mois et 6 ans, pour repérer les TND serait un grand progrès, afin de garantir un accompagnement adapté dès le plus jeune âge. Les médecins spécialistes et la Haute Autorité de santé (HAS) préconisent cependant que ce diagnostic intervienne encore plus tôt dans l'enfance. Nous proposons donc que la première consultation ait lieu aux 9 mois de l'enfant plutôt qu'à ses 18 mois.

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Les recommandations de la HAS auxquelles vous vous référez concernent les enfants présentant un risque élevé de TND. C'est l'objet de l'article 5, que nous venons d'adopter.

L'article 6 prévoit quant à lui la mise en place d'un repérage global et standardisé pour l'ensemble des enfants, y compris ceux qui ne présentent a priori aucun facteur de risque. Avancer la date du premier examen à 9 mois peut faire passer à côté de certains signaux qui se manifestent au cours de la deuxième année de vie de l'enfant, en particulier ceux qui relèvent des TSLA ou des TSA. Votre amendement pourrait avoir un effet inverse de celui recherché.

Je vous demande donc de le retirer; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS18 de Mme Mathilde Paris

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Cet amendement d'appel vise à remplacer « sont obligatoirement » par « peuvent être » afin de rendre le dispositif de dépistage plus souple. À défaut d'étendre la faculté de réaliser ces examens à d'autres catégories de professionnels de santé, comme je l'avais proposé – notamment aux pédiatres, neuropédiatres, pédopsychiatres, ergothérapeutes, psychomotriciens, neuropsychologues, orthophonistes et médecins généralistes – nous risquons en effet de créer un embouteillage inquiétant. Je vous demande donc de reconsidérer la rédaction de cet article, qui produirait des effets de bord désastreux.

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Votre amendement soulève le problème de la désertification médicale – un sujet sérieux, sur lequel notre commission travaille régulièrement. Il contredit cependant l'objet même de l'article 6, qui tend à rendre obligatoire le repérage des TND chez tous les enfants.

S'agissant des enfants à risque, nous avons déjà apporté des solutions. Nous avons mis en place, en 2019, des plateformes de coordination et d'orientation (PCO) et un parcours de bilan et d'intervention précoce pour les TND. Comme l'a rappelé la ministre la semaine dernière lors des questions au Gouvernement, plus de 70 000 enfants ont pu être repérés et bénéficient d'un accompagnement grâce à ces PCO, contre seulement 150 en 2019.

Le service public de repérage, de diagnostic et d'intervention précoce, prévu par la LFSS 2024, est en cours de déploiement et permettra d'accentuer notre effort en la matière. L'article 5 de la présente proposition de loi renforcera la prise en compte des TND dans ce dispositif.

Par conséquent, avis défavorable.

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Les PCO améliorent peut-être les diagnostics dans certains cas, mais cela ne fonctionne pas chez moi. L'objet du dispositif est d'orienter les parents vers des professions libérales pour réaliser le repérage et le diagnostic ; mais quand il n'y a pas de professions libérales ? Les parents sont envoyés vers les Camsp, qui sont déjà saturés, ou vers les centres médico-psychologiques (CMP).

J'ai l'exemple d'un enfant de moins de 6 ans qui avait été orienté d'abord vers le Camsp. Le délai d'attente étant de deux ans, il aurait dépassé l'âge requis pour y être pris en charge : il a donc été renvoyé au CMP – sauf que ce dernier a également refusé de l'accompagner, au motif qu'il était trop jeune ! Telle est la réalité de la désertification médicale. Votre dispositif sera inopérant, prenez-le vraiment en compte.

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En retirant le caractère obligatoire de l'examen de repérage, votre amendement n'améliorera pas foncièrement la situation.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle commission adopte l'amendement rédactionnel AS65 de M. Paul Christophe.

Amendement AS44 de Mme Laure Lavalette

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Cet amendement vise à rendre automatique l'entrée de l'enfant dans un parcours de bilan et d'intervention précoce, pris en charge par l'assurance maladie, lorsque l'un des deux examens prévus aux 18 mois et 6 ans de l'enfant a conduit à la pose d'un diagnostic. Dès lors que la volonté de repérer est actée, celle d'accompagner doit l'être également. Or, l'alinéa 5 de l'article ne nous paraît pas assurer cette automaticité.

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L'orientation des enfants vers le parcours de bilan et d'intervention précoce se fait sur prescription médicale. Prévoir dans la loi son automaticité me semble donc contraire à la liberté de prescription dont bénéficient les médecins.

Cela pourrait même s'avérer contreproductif, en incitant les médecins à orienter par précaution des enfants qui n'en auraient pas besoin vers des parcours qui souffrent déjà d'un certain engorgement – je rejoins Mme Paris sur ce point. À l'inverse, je n'ai aucun doute sur le fait qu'un médecin orientera naturellement un enfant vers le parcours de bilan et d'intervention précoce lorsque cela se justifie.

Je préfère mon amendement, qui me semble clarifier la responsabilité du médecin dans l'orientation de l'enfant, sans toutefois restreindre sa liberté de prescription.

Par conséquent, avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS71 de M. Paul Christophe.

Amendements identiques AS72 de M. Paul Christophe et AS9 de Mme Anna Pic

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Cet amendement quasi rédactionnel substitue le terme « contenu » au terme « qualité ». Il est en effet difficile d'appréhender juridiquement la qualité. C'est le contenu de l'examen de repérage qui doit être formalisé.

La commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS73 de M. Paul Christophe.

Amendement AS47 de M. René Pilato

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Nous souhaitons inclure le repérage du trouble neurovisuel dans les rendez-vous préventifs mensuels obligatoires au cours des six premiers mois de l'enfant. Ces troubles, qui correspondent à des altérations du champ de vision ou du traitement visuel des informations, concerneraient 5 % des enfants, soit un enfant par classe en moyenne. Ils sont cependant sous-diagnostiqués, et souvent confondus avec d'autres TND, tels que les TSA ou les TSLA. Un mauvais diagnostic rend plus difficile l'accompagnement de l'enfant, pourtant essentiel pour limiter les conséquences irréversibles des troubles neurovisuels.

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Sur le plan légistique, votre amendement ne vise pas le bon article de loi. En outre, vous ajoutez un autre type de diagnostic, alors que le texte porte avant tout sur les TND. Il serait intéressant d'obtenir l'avis de la ministre en séance. Je vous invite donc à retirer votre amendement pour le réécrire avec toute la précision nécessaire.

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Nous le retirerons pour le réécrire, mais je n'ai pas compris l'avis sur le fond du rapporteur. Notre amendement sera-t-il accueilli avec enthousiasme par un avis favorable dans l'hémicycle ?

L'amendement est retiré.

La commission adopte l'amendement rédactionnel AS74 de M. Paul Christophe.

Puis elle adopte l'article 6 modifié.

Après l'article 6

Amendement AS21 de Mme Mathilde Paris

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Il s'agit d'insérer, à l'article L. 121-4-1 du code de l'éducation, un nouvel alinéa ainsi rédigé : « L'élaboration et la mise en œuvre d'évaluations standardisées, permettant de repérer les signes caractéristiques des troubles du neuro-développement, à différents niveaux de scolarité (CP, CE1, CM1, sixième, quatrième, seconde et première année de certificat d'aptitude professionnelle). »

L'objectif est d'ajouter, dans les évaluations des acquis des élèves réalisées par les enseignants tout au long de la scolarité, des grilles de détection des TND – c'est le cas dans d'autres pays, tels que le Canada. Les enseignants sont en effet des observateurs privilégiés. Ce filtre supplémentaire, qui s'ajouterait au repérage systématique avant 6 ans, bénéficierait aux élèves plus âgés passés entre les mailles du filet.

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Votre amendement, qui relève plutôt du niveau réglementaire, me semble satisfait : le quatrième alinéa de l'article L. 121-4-1 prévoit que la promotion de la santé à l'école comprend la réalisation des examens nécessaires à la définition des conditions de scolarisation des élèves ayant des besoins particuliers, d'une part, et des examens médicaux et des bilans de santé définis dans le cadre de la politique de la santé en faveur des enfants et des adolescents, d'autre part. Les livrets et guides de repérage des TND élaborés sous le contrôle de la délégation interministérielle comportent de telles grilles d'évaluation et sont d'ores et déjà accessibles aux professionnels de la santé scolaire.

Enfin, l'article 2, que nous avons voté tout à l'heure, vient déjà renforcer la prise en compte des TND à l'école dans le cadre de la formation délivrée aux personnels qui interviennent en milieu scolaire.

Demande de retrait, ou avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Article 7 : Pérenniser les dispositifs expérimentaux de répit pour les proches aidants issus de l'article 53 de la loi du 10 août 2018

Amendements de suppression AS26 de M. Pierre Dharréville et AS38 de Mme Caroline Fiat

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Vous nous avez expliqué tout à l'heure qu'il était possible de supprimer un article entier de la proposition de loi sénatoriale. Sur votre exemple, je propose donc la suppression de l'article 7.

En 2018, lors de l'examen de la loi Essoc, nous nous étions opposés frontalement à la pérennisation des dérogations au droit du travail pour les personnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux dans le cadre des prestations de suppléance à domicile du proche aidant et de séjours de répit aidants-aidés. Il est tout à fait possible d'organiser le relayage autrement.

Vous proposez de pérenniser ces dérogations d'un trait de plume, par une proposition de loi, donc sans étude d'impact. Cela ne peut cependant pas être une réponse satisfaisante au manque d'établissements et de personnels. Elle n'est pas humainement tenable et porte un préjudice important à celles et ceux qui ont la charge de cette mission. La direction générale du travail a elle-même relevé l'important état de fatigue des intervenants à la suite des prestations – charge mentale et psychologique, manque de sommeil, hypervigilance – alors que ces métiers connaissent déjà des conditions de travail alarmantes.

Vous reconnaissez vous-même, monsieur le rapporteur, que ces dérogations ont une « incidence non négligeable » ; et pourtant, vous proposez de les pérenniser sans attendre. Il faut au contraire en tirer les leçons et ne pas avancer plus loin dans cette direction. Les salariés concernés se sont vu accorder une pause de vingt minutes après six heures de travail ; mais cette garantie peut être supprimée ou réduite, comme le temps de repos...

Nous ne pensons pas qu'il faille déroger au droit du travail. La réponse aux besoins se situe plutôt dans la formation et le respect des métiers concernés.

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La nécessaire prise en compte de la situation des aidants ne doit pas aller à l'encontre du droit du travail. Les dispositions de l'article 7 présentent, à terme, des risques majeurs pour la santé des salariés et pour la qualité de la prise en charge des personnes en difficulté. Elles constituent une atteinte très grave au droit du travail. Opposés à ce type d'expérimentations permises par la loi Essoc, nous considérons l'introduction de ces dérogations dans le droit commun comme une dérive majeure, qui risque d'être étendue – car nous connaissons vos méthodes – à d'autres dispositifs et secteurs d'activité.

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Je préfère la constance de M. Dharréville aux propos accusateurs de M. Nilor. Je rappelle que cette proposition de loi a été adoptée par le Sénat à l'unanimité, donc avec les voix des oppositions : je doute que nos collègues sénateurs seraient heureux d'entendre ces accusations, que je regrette.

Même si le rapport d'évaluation de l'expérimentation ne nous a pas encore été remis – il le sera avant la séance publique –, les résultats sont connus dans les grandes lignes. Par ailleurs, les acteurs de terrain et les représentants de services de l'État que nous avons auditionnés, notamment avec Ingrid Dordain, nous ont apporté des éléments d'analyse très précis.

Il s'avère que les dispositifs issus de l'article 53 de la loi Essoc s'inscrivent bien dans le paysage de l'offre des solutions d'accompagnement conçues pour les personnes en situation de perte d'autonomie et leurs proches aidants. Ils apportent une réponse complémentaire et adaptée aux besoins des personnes pour lesquelles les autres solutions, comme l'hébergement temporaire et l'accueil de jour, présentent des limites. Ils donnent des résultats positifs, tant pour le bien-être des aidants, qui profitent d'un répit salutaire, que pour la santé des aidés, pris en charge dans un environnement familier sans discontinuité.

Ces dispositifs présentent par ailleurs un intérêt pour les intervenants eux-mêmes, dont l'organisation du travail se trouve améliorée, l'autonomie accrue, les déplacements limités et la reconnaissance professionnelle renforcée. Il est vrai que ces prestations de suppléance à domicile ont une incidence sur l'état de fatigue et la vie sociale des salariés mobilisés. On nous dit qu'il est important, mais sans pouvoir faire la comparaison avec la fatigue qui résulterait d'une semaine ordinaire : c'est donc un argument assez fragile, mais nous ne devons pas l'occulter. Il n'en reste pas moins que la grande majorité des intervenants portent un jugement positif sur l'expérimentation : 98 % se sont déclarés « plutôt » ou « tout à fait » satisfaits.

À l'instar des sénateurs, je considère que les résultats sont suffisamment positifs pour que soit envisagée dès maintenant la pérennisation du dispositif, qu'attendent les acteurs du secteur.

Je précise que le cadre juridique posé par l'article 53 de la loi Essoc, qui est repris, pour l'essentiel, au nouvel article L. 313-23-5 du code de l'action sociale et des familles, est conforme aux exigences européennes. Si les dérogations aux règles du droit du travail sont importantes, elles ne sont pas pour autant illimitées, d'autant que la loi instaure un certain nombre de garde-fous. La suppression pure et simple de ces dispositifs porterait préjudice au couple aidant-aidé.

Je défendrai un amendement visant à reporter au 1er janvier 2025, c'est-à-dire à la fin de l'expérimentation, la date d'entrée en vigueur du dispositif.

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J'ai la chance de voir ce dispositif expérimenté non loin de ma circonscription, depuis 2020, et d'avoir pu rencontrer à la fois les responsables du projet et des binômes accompagnant-accompagné.

Si ce dispositif déroge au droit du travail, son objectif est bien d'apporter un répit de longue durée et donc un réel soulagement aux proches aidants. J'ai ainsi rencontré une personne qui habitait près de Rouen et qui ne pouvait pas sortir de chez elle en raison de l'état de son époux. Grâce à ce relayage de longue durée, elle a pu s'absenter six jours pour rendre visite à sa fille, à Montpellier, et faire la connaissance de ses petits-enfants, qu'elle n'avait pas vus depuis leur naissance et qu'elle ne pouvait pas non plus recevoir chez elle.

Par ailleurs, l'intervention d'une tierce personne dans une situation difficile peut permettre à la personne accompagnée de sortir de la relation entre époux dans laquelle elle s'est peut-être enfermée et de trouver un nouveau moyen d'expression.

Les personnes qui assurent ce relayage de longue durée ne sont que des volontaires qui font, en six jours, les heures qu'elles feraient normalement en un mois. Celles que j'ai entendues y trouvent donc aussi un avantage pour l'organisation de leur vie privée.

En somme, ce dispositif présente donc de nombreux avantages pour les trois parties concernées.

Lorsque cette expérimentation a été mise en place, en 2020, elle a été très largement soutenue, hormis quelques voix discordantes. Elle a aujourd'hui montré tous ses bénéfices. Nous disposons du rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de celui de Baluchon France, et nous aurons très bientôt le rapport d'évaluation de l'expérimentation évoqué par M. le rapporteur. La suppression de l'article 7 serait délétère, car elle priverait les aidants, les aidés et les professionnels d'une nouvelle modalité de prise en charge des personnes fragiles.

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Ne vous inquiétez pas, monsieur le rapporteur, nous pouvons être accusateurs avec constance !

L'article 7 permet de supprimer des temps de pause, de passer outre le repos quotidien de onze heures, de prolonger au-delà de dix heures le temps de travail quotidien, d'étendre au-delà de huit heures le temps de travail de nuit et de porter à plus de quarante-huit heures le temps de travail par semaine. Il ne prévoit pas d'avis du comité social et économique sur les demandes d'autorisation de dépassement des heures maximales. Je peux entendre qu'un salarié sollicite, ponctuellement, une dérogation bien précise, mais le cumul de ces dérogations pose problème dans la mesure où l'exception deviendra très vite la norme. Une fois que certains auront accepté deux, trois ou quatre dérogations, tout le monde devra s'aligner sur le moins-disant.

Les effets de toutes ces dérogations se feront sentir à long terme. Les salariés trouveront peut-être que quatre, cinq, sept semaines travaillées selon des modalités dérogatoires ne leur auront pas posé de problème, mais l'impact sur leur santé ne pourra être mesuré qu'au bout de plusieurs années d'un tel régime. À mon sens, l'article 7 menace donc les conditions de travail et la santé des personnels de relayage à domicile ou en séjour de répit.

Comment voulez-vous accompagner correctement les enfants concernés ? Certains salariés seront fourbus et donc moins vigilants – sauf qu'on ne s'en rend compte qu'au moment de la rupture, de l'accident, de la blessure. Comment imaginer que des personnes vivant mal leur travail et ayant atteint, au bout de quelques années, un tel niveau de fatigue pourront s'occuper d'enfants de manière satisfaisante et en faisant preuve du maximum de vigilance ? Ce n'est pas jeter la pierre aux salariés que de dire qu'ils ont besoin, comme n'importe qui dans cette salle et dans ce pays, de repos et d'un rythme de vie régulier qui leur permette d'exercer leur métier de manière convenable.

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Vous nous expliquez, monsieur le rapporteur, que le dispositif proposé est le seul qui permette d'organiser le relayage. Je ne le crois pas. Sans doute faudrait-il tendre vers un relayage assuré par plusieurs personnes : les salariés eux-mêmes doivent pouvoir se relayer, pour permettre le répit des aidants.

Tous les députés ici présents souhaitent la reconnaissance d'un droit au répit. J'ai moi-même déposé une proposition de loi à ce sujet : on ne peut pas me reprocher de ne pas me battre pour améliorer la situation des aidants – ce qui passera d'ailleurs par une amélioration de la situation des aidés et un renforcement de leurs droits, qui ne sont absolument pas au rendez-vous.

Si nous voulons organiser correctement le droit au répit, nous devons garantir aux salariés des conditions de travail raisonnables et respectueuses. Eux aussi ont droit à un rythme de travail convenable, qui leur permette d'organiser leur vie. Or le dispositif proposé est une sorte de pis-aller, fondé sur l'idée qu'il ne peut y avoir qu'une seule personne relayante, et aussi que ce remplacement doit être assuré à moindre coût. Il convient de tirer d'autres conclusions de l'expérimentation réalisée et d'organiser la filière de manière beaucoup plus structurée et cohérente.

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Je soutiens ces amendements de suppression. L'institutionnalisation de ces dérogations au droit du travail revient à faire reposer ces emplois sur une forme de militantisme, d'engagement personnel, de « fibre », de compétence innée. Or nous parlons d'emplois mal payés, souvent organisés en horaires décalés et intrinsèquement pénibles, puisque leurs titulaires se trouvent confrontés aux difficultés d'autrui et à des situations psychiques, sociales ou familiales parfois très compliquées. Sortir ces métiers du cadre offert par le droit du travail, c'est mettre les personnes qui s'y engagent dans des situations personnelles elles aussi difficiles. On ne peut pas faire reposer l'action médico-sociale sur des engagements personnels : nous devons la fonder sur le droit du travail, sur le respect des conditions de travail. La dérive dans laquelle vous vous engagez progressivement ne fera que fragiliser le secteur médico-social. Pour respecter les personnes qui travaillent dans ces structures, nous devons réaffirmer que l'exercice de leur métier est soumis au droit du travail, qui s'applique à n'importe quel autre emploi.

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Je l'ai dit tout à l'heure, monsieur Dharréville, ce dispositif ne se substitue pas à ceux qui existent déjà, tels que l'hébergement de jour ou les plateformes de répit. Par ailleurs, dans certaines pathologies, la pluralité des intervenants n'est pas souhaitable car elle dégrade la santé des patients. C'est aussi à ce genre de situations, bien réelles, que notre dispositif vient apporter une réponse.

La commission rejette les amendements.

Amendement AS39 de M. René Pilato

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À la suite d'un appel à candidatures national lancé en janvier 2019, cinquante-et-une structures ont été autorisées à mener une expérimentation dans le secteur privé à compter du 10 mai de la même année. Cette expérimentation, qui devait prendre fin le 30 décembre 2021, a été prolongée de deux ans par la LFSS 2021, puis à nouveau jusqu'au 31 décembre 2024 par celle de 2024.

Alors que le législateur ne dispose même pas du rapport d'évaluation de cette expérimentation qui dure depuis près de cinq ans, vous proposez de pérenniser et d'inscrire dans le droit commun des dérogations significatives aux droits fondamentaux garantis par le code du travail. Nous sommes évidemment opposés à de telles dérogations, et nous contestons la méthode employée. Sans évaluation définitive des impacts de l'expérimentation sur les professionnels concernés par les dérogations au droit du travail, aucune pérennisation du dispositif ne devrait être envisagée.

À défaut d'une suppression de l'article 7, nous demandons que le rapport d'évaluation de cette expérimentation nous soit remis.

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Votre amendement revient en réalité à supprimer les dispositions de l'article 7. Le rapport que vous sollicitez nous sera remis d'ici à la séance publique. Du reste, votre demande est déjà satisfaite par l'article 53 de la loi Essoc.

Avis défavorable.

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Vous avez dit, monsieur le rapporteur, que le changement d'intervenant pouvait constituer une souffrance pour la personne prise en charge. Beaucoup de choses peuvent être à l'origine d'une souffrance – le manque de moyens par exemple. En revanche, le bien-être des salariés est déterminant. Or, dans le secteur social ou médico-social, la souffrance d'un salarié a un impact sur sa capacité à prendre en charge la personne qui lui est confiée. L'article 7 ignore cet aspect.

Vous dites que le dispositif sera mis en œuvre sur la base du volontariat, mais on sait bien comment les choses se passent : quand on prend quelqu'un en charge, on se sent obligé d'aller le plus loin possible, et parfois on va trop loin, compte tenu de la fatigue et de la charge mentale qu'implique ce type d'activité. Au-delà de la question de principe touchant au respect du code de travail, vous ne pouvez pas ignorer que les dérogations proposées font peser un risque important sur la qualité de la prise en charge, au corps défendant des salariés qui, au bout d'un moment, n'ont plus conscience qu'ils doivent s'arrêter et passer le relais. Le danger est d'autant plus important que nous parlons de secteurs d'activité en tension, où l'on peine à recruter et où la charge de travail repose donc sur un petit nombre de salariés.

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Les dérogations au code du travail que vous rendez possibles – suppression des temps de pause, durée quotidienne de travail supérieure à dix heures, durée hebdomadaire du travail supérieure à quarante-huit heures, suppression du repos de onze heures entre deux interventions – sont en contradiction avec un certain nombre d'éléments évoqués lors de précédentes auditions. Mon rapport sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles montrait que la situation s'était améliorée dans certains secteurs, comme celui du bâtiment et des travaux publics, mais que c'était le grand craquage ailleurs, en particulier dans celui du médico-social et de la prise en charge des personnes âgées ou en situation de handicap, à domicile comme en établissement. Mathieu Klein, l'un des rédacteurs du Livre blanc du travail social, nous a dit que jamais dans l'histoire ce secteur n'avait connu une crise aussi intense.

Alors que les vocations s'amenuisent et que les personnes qui exercent ces métiers sont en train de craquer, au lieu de leur donner un cadre stable, un statut, un temps de travail et un revenu, vous proposez de les déstabiliser davantage ? Vous parlez de volontariat, mais c'est la technique du pied dans la porte : on sait très bien qu'il finit bien souvent par devenir la norme. Vos intentions sont bonnes – il faut effectivement que les aidants familiaux puissent souffler un peu – mais vos propositions contribueront davantage à déstabiliser le secteur qu'autre chose.

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L'opposition présente ces dérogations au droit du travail comme autant de coups portés aux salariés. En réalité, elles permettent simplement de consolider le système du répit de longue durée. Les salariés concernés pourront passer au maximum six jours et six nuits au domicile d'une personne fragile.

M. le rapporteur et ses homologues du Sénat n'ont pas décidé un beau matin de créer ce système de leur propre initiative : il est issu des réflexions menées dans le cadre de la première stratégie Agir pour les aidants, d'ailleurs prolongée, dont un des objectifs était de diversifier l'offre de répit et de l'adapter aux besoins.

Cela dit, le répit de longue durée ne représente qu'une toute petite part du répit et des interventions de salariés relais. Il est apporté dans des conditions très particulières et, oui, sur la base du volontariat. On ne peut pas parler d'usure professionnelle, puisque les six jours de travail valent un mois : ils sont donc suivis de trois semaines de repos permettant au salarié de compenser la fatigue accumulée. Il ne s'agit pas non plus d'un travail de six jours et six nuits, vingt-quatre heures sur vingt-quatre : si l'on déplace les temps de pause, ce n'est pas pour les supprimer, mais parce que les moments où ils peuvent être pris dépendent des besoins de la personne aidée.

Ce système, très adapté aux besoins, a fait l'objet de nombreuses réflexions de la part des professionnels et des aidants – moins des personnes aidées bien sûr, qui ont plus de mal à s'exprimer.

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Je comprends votre intention, mais vous ne faites là que gérer la pénurie. L'enjeu principal est d'améliorer les conditions de travail du secteur afin d'accroître les recrutements. À l'hôpital, sous couvert de volontariat, de nombreux soignants viennent travailler pendant leurs jours de repos ou annulent leurs vacances, et l'on en voit aujourd'hui les conséquences.

On sait que l'on manque de professionnels, et on s'appuie toujours sur les mêmes, qui sont souvent des femmes, poussées par des motivations qui dépassent le cadre professionnel. On tire sur la corde plutôt que de changer profondément le système, qui pourtant met des gens en difficulté et ne règle rien à moyen et long terme.

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Même le relayage à domicile peut s'organiser autrement qu'en comptant sur une seule personne. Je sais qu'un certain nombre de personnes aidées et de familles expriment le désir de n'avoir qu'un seul intervenant, mais ce droit-créance mérite peut-être d'être discuté, dès lors que le coût supporté par les salariés concernés semble exorbitant. Il est tout à fait possible de faire en sorte d'assurer une prise en charge de bonne qualité avec des professionnels qui se relaient, justement parce que ce sont des professionnels, qui savent gérer les transmissions, comme cela se fait dans un certain nombre d'endroits. C'est vrai, certaines personnes aidées sont perturbées par le changement et expriment le souhait de ne plus voir tel ou tel intervenant, mais les professionnels formés savent gérer ces situations, établir le contact et prendre le relais. C'est là-dessus que nous devons travailler pour apporter une réponse cohérente au problème.

Les dérogations au droit du travail posent problème, car on demande au salarié de mettre sa vie entre parenthèses pendant un certain nombre de jours. Il n'est pas sérieux de considérer cela comme une véritable solution à l'échelle que vous proposez. Encore une fois, il me semble tout à fait possible de répondre autrement à la demande de droit au répit.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS51 de Mme Annie Vidal

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Je propose de limiter les dérogations au droit du travail au mode « prestataire ». En effet, une seule des 596 prestations réalisées dans le cadre de l'expérimentation a été accomplie en mode « mandataire », ce qui laisse à penser que ce dernier n'est pas adapté aux besoins spécifiques du répit de longue durée. Ce faisant, nous assurerons une meilleure adéquation entre le cadre légal et la pratique effective.

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Avis favorable.

Le mode « mandataire » semble offrir moins de garanties que le mode « prestataire » quant à la qualité et à la sécurité des prestations. Qui plus est, il n'a pas recueilli l'adhésion, puisqu'une seule expérience a été réalisée selon cette modalité.

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D'abord, que plusieurs référents suivent la même personne n'est pas un problème : c'est ce qui se passe en institution. Arrêtons de croire que cela peut justifier de déroger à la durée légale du travail.

Par ailleurs, madame Vidal, je me suis peut-être mal exprimé tout à l'heure à propos du volontariat. Je pense qu'il faut aussi protéger les professionnels de leur engagement. Ayant dirigé plusieurs structures sociales, j'ai pu voir que l'engagement des professionnels est parfois tel qu'ils n'y mettent aucune limite. De ce fait, à leur corps défendant, ils accompagnent moins bien les usagers. Au vu de la charge mentale que cela représente, un accompagnement de plus de douze heures par jour pendant six jours ne peut que dégrader les conditions de prise en charge de la personne aidée. Les professionnels seront bien sûr volontaires, mais leur engagement ne sera pas le gage de leur capacité. Aussi les dérogations prévues vont-elles contrevenir au bon accompagnement des personnes.

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Ces dispositifs reposent beaucoup sur l'idée que certaines personnes – souvent des femmes – auraient des compétences naturelles, innées, pour le care. Comme ce ne sont pas des compétences acquises, on autorise des rémunérations faibles, des conditions de travail difficiles et des horaires extrêmement longs. La dérogation au droit du travail permettant de travailler jusqu'à quarante-huit heures par semaine correspond d'ailleurs à la limite autorisée par l'Union européenne en la matière.

On compte sur la vocation et l'engagement pour ainsi dire personnel des salariés, qui seront confrontés aux difficultés humaines et à la souffrance. Je comprends qu'ils veuillent travailler plus, parce qu'ils perçoivent la nécessité, l'utilité sociale immédiate de leur travail. C'est justement pour cela qu'en tant que législateur, nous devons limiter leur présence, faute de quoi nous les conduirons à l'épuisement professionnel – ce qui ne servirait personne, ni le secteur médico-social, ni les personnes accompagnées, ni évidemment les salariés eux-mêmes. Limitons donc le nombre d'heures de travail autorisées pour les protéger, eux et les personnes en situation de handicap ou en difficulté qu'ils accompagnent.

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Je vous rejoins sur certains points, madame Rousseau. Pour avoir rencontré des travailleurs sociaux qui œuvrent auprès des aidés et des aidants, je conviens qu'il faut fixer des limites afin qu'ils ne dépassent pas leurs capacités et qu'ils ne tombent pas dans l'épuisement professionnel. C'est cependant le rôle des structures médico-sociales qui les encadrent que de fixer ces limites et de leur apporter le soutien nécessaire. Il conviendra de veiller à ce que des réunions de cadrage, de soutien et d'analyse des pratiques soient effectivement organisées à cet effet.

Une prestation de six jours et six nuits, ou de trente-six heures, paraît énorme, et c'est effectivement beaucoup. Il faut cependant voir l'intérêt de ce travail de soutien. C'est précisément ce que nous disent les personnes qui se relaient : la poursuite d'un accompagnement adapté a du sens. Et, pour certains publics spécifiques, il est nécessaire de maintenir une seule et même personne afin de garantir la continuité du parcours.

Enfin, l'objectif n'est pas que les aidants bénéficient à chaque fois d'un répit de longue durée. Nous voulons simplement diminuer leur charge, leur permettre de souffler et améliorer leur quotidien.

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Dire qu'il faut fixer des limites pour empêcher les salariés d'aller jusqu'à l'épuisement est très juste. Cependant, je ne pense pas que l'on puisse compter sur les structures pour fixer ces limites. On sait qu'elles ont la tête sous l'eau, qu'elles ont du mal à trouver des salariés et que les cadres eux-mêmes sont parfois amenés à effectuer le travail de terrain, par exemple si un collaborateur est absent le week-end. On est dans une course, on remplit une sorte de tonneau des Danaïdes : on cherche du personnel pour remplacer celui qui s'en va, épuisé. Dans ce contexte, même si le directeur et les cadres de la structure veulent fixer des limites, le risque est grand qu'ils laissent quand même leurs salariés aller jusqu'à l'épuisement, afin d'éviter qu'une personne âgée ou en situation de handicap se retrouve seule.

Je comprends que l'on puisse vouloir permettre ce genre de dérogations à court terme. Le problème, c'est que vous ne nous proposez pas de vision du travail social à long terme. Quel encadrement prévoyez-vous ? Comme vous l'avez dit, il est évident que les salariés perçoivent tout le sens de leur métier et l'utilité immédiate de leur travail, mais comment cette conscience ne viendra-t-elle pas se briser sur l'usure du temps et des corps ? Vous nous proposez du raccommodage, du bricolage, du bidouillage, du colmatage, mais pas d'horizon. Nous savons tous que notre société va vieillir, nous voulons tous que le handicap soit mieux pris en charge, mais vous ne nous dites pas comment nous organiser pour répondre à ces besoins.

Enfin, monsieur le rapporteur, connaît-on les résultats des expérimentations menées en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles ?

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Cet amendement part d'une bonne intention, mais il traduit aussi, de manière insidieuse, un rapport culturel au travail qui n'est pas le nôtre.

Le secteur médico-social sera affecté par le vieillissement de la population et restera confronté à des difficultés de recrutement qui seront loin d'être résolues. Comme l'a très bien dit Mme Dordain, il existe aussi un problème de suivi. Le changement permanent des intervenants suscite de l'anxiété, non seulement chez les plus jeunes, mais aussi parfois chez les publics adultes ou plus âgés. Il faut en tenir compte.

Vous essayez d'ajouter de la sécurité à la sécurité sans tenir compte des effets contreproductifs de vos mesures. Mais le code du travail n'est pas si mal fait, les dérogations qu'il prévoit non plus. Le sens du service, l'engagement et la vocation ont aussi une valeur et je ne pense pas que des personnes puissent faire des heures sans être payées ou bénéficier d'une récupération. Mais je sais que, sur cette question, nous divergerons.

La commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS69, AS70 et AS75 de M. Paul Christophe.

Amendement AS52 de Mme Annie Vidal

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Cet amendement fixe une durée maximale de 144 heures consécutives et une durée minimale de 36 heures consécutives pour les prestations de suppléance à domicile et de séjours de répit, afin qu'elles respectent des critères de durée adaptés. Cela contribuera à établir un cadre clair et prévisible facilitant l'organisation des interventions.

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Cette précision, qui figurait déjà dans le cahier des charges de l'expérimentation, relève du domaine réglementaire. En outre, son introduction dans la loi aurait pour effet de rigidifier le dispositif, s'agissant notamment de la durée minimale des séjours de répit aidants-aidés.

Demande de retrait, ou avis défavorable.

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Cette précision me semblait d'intérêt mais mon objectif n'est surtout pas de bloquer le dispositif.

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Cet amendement, finalement, c'est dire qu'il ne faut pas abuser des abus ! Les horaires proposés par le texte sont en dessous de ce qu'autorise le droit du travail. Je viens d'un pays dans lequel le droit du travail a été fondamentalement maltraité, et l'argument du volontariat ne prémunit de rien : même dans les périodes les plus sombres de l'histoire, on trouvait des victimes pour se porter volontaires pour le travail forcé, et les maîtres s'appuyaient sur ces « bons nègres » pour généraliser leurs pratiques ! Cet argument ne suffit pas à justifier ce que vous êtes en train de faire.

L'amendement est retiré.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS76, AS77, AS78, AS79 et AS80 de M. Paul Christophe.

Amendement AS20 de Mme Mathilde Paris

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Cet amendement d'appel vise à réduire la part des contractuels dans la masse salariale des établissements. Ils sont en effet de plus en plus nombreux, alors que les personnes souffrant de troubles du neuro-développement ont besoin d'un cadre stable et sécurisant. Une réflexion doit être engagée sur ce point.

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Il s'agit effectivement d'un amendement d'appel, puisque la mesure conduirait à traiter différemment les ESMS inclus dans le champ d'application du relayage et les autres. La question que vous soulevez est toutefois légitime.

J'émets un avis défavorable, tout en invitant à ce que le travail se poursuive sur le sujet.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS53 de Mme Annie Vidal

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Cet amendement vise à supprimer la disposition qui permettrait au conjoint survivant de poursuivre le contrat de travail avec le salarié en cas de décès du conjoint employeur. Cette disposition pourrait en effet soulever des difficultés pratiques et juridiques.

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Dans la mesure où nous avons supprimé le mode « mandataire », il est logique de supprimer cette disposition. Avis favorable.

La commission adopte l'amendement.

Amendements AS49 et AS56 de Mme Annie Vidal (discussion commune)

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Ces deux amendements ont pour objet de préciser le contenu du décret d'application du texte.

Le premier vise à ce que le décret précise les modalités d'information et les droits des proches aidants, détermine les publics ciblés, prévoie une évaluation de la situation de la personne en cas de perte d'autonomie, spécifie les compétences et formations requises pour exercer les fonctions de relayeur à domicile, et précise enfin l'organisation de la coordination avec les autres professionnels intervenant au domicile.

Quant à l'amendement de repli, il se contente de prévoir que le décret cible les publics concernés par les prestations de relayage à domicile. J'ai bien sûr une préférence pour le premier.

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C'est dommage, j'ai pour ma part une préférence pour le second ! Le premier rigidifierait à l'excès la loi, tout en renvoyant vers le réglementaire. J'y suis donc défavorable. Le second en revanche me semble intéressant dans la mesure où il conduirait le Gouvernement à préciser ses intentions quant au champ des publics bénéficiaires. Je vous invite toutefois à le retirer afin que nous puissions régler ensemble un petit souci de rédaction d'ici à la séance.

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Je retire les deux, tout en soulignant que tous les points que j'ai énumérés méritent d'être précisés par décret et qu'il est essentiel de cibler les publics devant bénéficier de la prestation de suppléance : il n'est pas question de l'étendre à toute les personnes aidées à domicile.

Les amendements sont retirés.

Amendement AS81 de M. Paul Christophe

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Le 1° du II de l'article 7 de la proposition de loi abroge l'article 53 de la loi Essoc, dont les dispositions sont reprises, pour l'essentiel, au nouvel article L. 313-23-5 du code de l'action sociale et des familles. Pour en tirer les conséquences, le présent amendement propose que soit abrogé l'article 2 de la loi du 22 mai 2019, qui fait référence à cet article 53.

La commission adopte l'amendement.

Amendements identiques AS82 de M. Paul Christophe et AS55 de Mme Annie Vidal

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Cet amendement diffère au 1er janvier 2025 l'entrée en vigueur du dispositif, pour tenir compte de la prolongation de l'expérimentation.

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L'expérimentation ayant été prolongée jusqu'au 31 décembre 2024, l'application du dispositif dès le 1er janvier 2025 est importante pour éviter toute rupture dans la prise en charge. Le système est loué tant par les aidés que par les aidants et les professionnels, qui trouvent ainsi une nouvelle modalité d'exercice.

La commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l'article 7 modifié.

Après l'article 7

Amendement AS6 de Mme Christine Loir

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Je donne un avis défavorable à l'ensemble des amendements portant article additionnel après l'article 7, en dépit de l'intérêt des rapports demandés.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS60 de Mme Laure Lavalette

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Je demande un rapport sur les besoins de répit des aidants, en fonction notamment de la pathologie de la personne aidée. La France a longtemps misé sur les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) pour le répit des aidants, et continue de le faire. Mais ces séjours, qui sont souvent de longue durée, ne répondent plus aux attentes des aidants ni aux besoins des personnes accueillies, sans compter la paperasse qu'ils nécessitent.

Cette vision du tout Ehpad, née d'une bonne volonté mais désormais obsolète, nous a conduits à prendre un retard important en matière de création de structures de répit de courte durée. Nous craignons que la solution du relayage soit mise en avant pour masquer le manque de place dans les établissements de répit spécialisés dans des pathologies ciblées.

Dans son rapport de 2022 sur les freins au répit des aidants, l'Igas souligne le manque de données accessibles, s'agissant du relayage, pour identifier le type de dépendance et de handicap et la lourdeur de la prise en charge. Elle ajoute que cette lacune n'a pas permis d'évaluer l'impact sur la fatigue des intervenants ni la plus-value de leurs interventions en fonction du type de public aidé.

De plus, le transfert de salariés du secteur médico-social risque de démunir encore davantage les structures existantes, qui peinent déjà à accueillir ceux qui en font la demande. Je rappelle que 100 000 professionnels du secteur médico-social et social issus du privé non lucratif demeurent exclus – et non pas simplement oubliés – du Ségur.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.

Amendement AS45 de Mme Laure Lavalette

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Si le relayage ou baluchonnage apparaît comme l'une des solutions pour concrétiser le droit au répit des aidants, il paraît scandaleux de voir la pérennisation d'une expérimentation se faire en catimini, à la volée d'une proposition de loi, sans qu'aucun rapport ne soit remis au Parlement.

Il ne s'agit pas d'une expérimentation anecdotique mais bien d'un nouveau dispositif dérogatoire au droit du travail pour de nombreux professionnels salariés du secteur médico-social. Cela fait pratiquement cinq ans que cette expérimentation a été lancée.

La structuration de l'offre de relayage à domicile est l'un des axes majeurs de la stratégie de mobilisation et de soutien aux aidants 2023-2027 du Gouvernement. Il est d'ailleurs indiqué dans ce document qu'il conviendra « d'échanger avec les partenaires sociaux sur le cas du relayage à domicile de longue durée par un seul relayeur, sur la base de l'expérimentation prévue par la loi Essoc ». C'est fort de café ! Alors que les concertations n'ont pas été menées que le Parlement est une fois de plus contourné, qui peut croire que les partenaires sociaux seront entendus ?

Au-delà du fait que le rapport promis par décret n'a pas été remis, c'est le mépris pour la concertation qui nous choque. Il est en effet demandé au législateur de pérenniser une expérimentation sans qu'il ait pu avoir les discussions nécessaires avec les syndicats. Les conditions propices à un débat éclairé ne nous paraissent pas réunies pour le moment.

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Je ne peux pas vous laisser dire que le principe du relayage serait adopté en catimini, alors qu'il fait l'objet d'une initiative parlementaire et que tous nos débats sont publics. Ne dénigrez pas l'exercice normal de la démocratie.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.

Amendement AS48 de Mme Laure Lavalette

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La réussite du relayage repose largement sur la qualité et l'efficacité de la formation dispensée au personnel médico-social. Or plusieurs syndicats ont fait part de leur préoccupation à ce sujet. Les programmes de formation dédiés manquent. Or le personnel de relayage doit être capable de prendre en charge une variété de besoins spécifiques, parfois complexes. Sans formation adéquate, il pourrait involontairement commettre des actes relevant de la négligence ou de la maltraitance. Le manque de reconnaissance, de formation et de qualification peut mener à une précarisation, voire à une ubérisation des prestations de relayage – très cohérente, cela dit, avec l'ubérisation de la société que nous subissons depuis qu'Emmanuel Macron est au pouvoir.

D'une manière générale, les dérogations au droit du travail risquent de donner le sentiment que ces salariés n'ont pas un vrai métier. En l'état, la pérennisation de l'expérimentation ressemble à un far west dans lequel l'aidant tirerait au sort un salarié en espérant que celui-ci soit capable d'effectuer les gestes attendus.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.

Amendement AS42 de Mme Laure Lavalette

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La confusion entre troubles du neuro-développement et signes de maltraitance a fait l'objet de propositions dans le cadre de la stratégie nationale 2023-2027. Cela faisait suite à l'alerte de 127 associations qui, dès 2015, dénonçaient des placements abusifs d'enfants autistes à l'aide sociale à l'enfance (ASE). Cette dernière accusait selon elles les parents d'être responsables des troubles de leur enfant. La délégation interministérielle à la stratégie pour les TND a mis en ligne un annuaire de médecins experts à l'usage des cellules départementales de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes ainsi que des magistrats. Lorsque ces experts sont saisis de la situation d'un enfant susceptible de présenter un TND, ils doivent établir un diagnostic sous cinq jours, de façon à éviter toute confusion entre le trouble et l'hypothèse d'une situation de maltraitance.

Alors que l'ASE connaît de graves dysfonctionnements et que la santé physique et psychique des enfants y est bien souvent mise à mal, celle des enfants handicapés l'est encore davantage. La présente demande de rapport vise à s'assurer que les départements recourent effectivement à cet outil qui permet d'éviter des placements non justifiés.

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Au-delà de l'avis défavorable que j'ai déjà émis, je voudrais souligner que ce sujet très important trouvera toute sa place dans la commission d'enquête créée à l'initiative d'Isabelle Santiago, à laquelle je vous invite à postuler.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS31 de M. Yannick Monnet

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Au vu des enjeux de l'article 7, il me semble que le Gouvernement ne peut pas faire l'économie d'une évaluation des dérogations, ne serait-ce que pour assurer la qualité de la prise en charge des personnes accompagnées.

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Vous avez raison, cher collègue, comme souvent, mais votre amendement sera satisfait par le rapport que nous recevrons avant l'examen du texte en séance, le 2 mai.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.

La commission procède ensuite à l'examen du rapport d'application de la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants (Mme Michèle Peyron et M. Serge Muller, rapporteurs).

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Trois décrets d'application de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, dite « loi Taquet », ont été publiés au Journal officiel du 19 février 2024, plus de deux ans après la promulgation du texte.

Les deux premiers décrets, n° 2024-117 et n° 2024-118 du 16 février 2024, précisent les modalités de mise en œuvre du mentorat ainsi que le dispositif de parrainage au profit des mineurs et des majeurs de moins de 21 ans, pris en charge par l'aide sociale à l'enfance (ASE).

Le troisième texte, le décret n° 2024-119 du 16 février 2024, précise les dérogations à l'interdiction d'hébergement à l'hôtel des personnes mineures ou âgées de moins de 21 ans, prises en charge au titre de l'ASE, créée par l'article 7 de la loi.

La publication tardive et relativement récente de ces décrets démontre bien l'intérêt de réaliser un rapport d'application des lois votées par le Parlement. L'importance des sujets que recouvre cette loi rend incontournable l'examen de sa mise en application.

Conformément à l'article 145-7 du Règlement de l'Assemblée nationale, ce travail est d'autant plus important que cette loi s'est inscrite dans la lignée de plusieurs missions parlementaires : le rapport de la mission d'information sur l'ASE, publié le 3 juillet 2019, et celui de ma collègue Peyron Pour sauver la PMI, agissons maintenant de mars 2019, qui a été remis au Gouvernement en juin 2019.

Ces travaux ont permis d'enrichir significativement le texte lors de son examen à l'Assemblée nationale et au Sénat. Fort heureusement, la majorité des quarante-deux articles que compte la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, est entrée en vigueur, notamment parce que la plupart des mesures étaient d'application directe.

Pour autant, nous sommes contraints de déplorer, à l'occasion de ce rapport d'application de la loi, que la publication des décrets d'application nécessaires à l'entrée en vigueur de certains articles pourtant importants a beaucoup tardé. Ainsi, les mesures relatives à la petite enfance ne sont, pour l'essentiel, toujours pas en vigueur.

Nous résumerons donc ici, en premier lieu, les avancées permises par la loi et qui sont entrées en vigueur, avant d'évoquer celles entrées en vigueur tardivement. Nous détaillerons enfin les mesures qui ne sont pas entrées en vigueur, au sujet desquelles nous devons collectivement rester attentifs dans la perspective d'un prochain rapport d'évaluation de la loi, que nous appelons de nos vœux.

Plusieurs dispositions ne nécessitant pas de mesures réglementaires d'application ont été rapidement effectives. Il s'agit, notamment, des dispositions relatives à l'organisation de la justice ou à l'office du juge en matière d'assistance éducative, définies à l'article 26. Ce texte prévoit l'audition systématique du mineur capable de discernement par le juge, et la désignation d'office ou à la demande de l'ASE, d'un avocat pour l'enfant capable de discernement, lorsque son intérêt l'exige.

Les mesures relatives à la rémunération des assistants familiaux, prévues à l'article 28, ont été mises en œuvre rapidement. Le décret n° 2022-1209 du 31 août 2022 a détaillé les nouvelles modalités de détermination de la rémunération, qui se sont appliquées dès le 1er septembre 2022.

La procédure de traitement des informations préoccupantes prévue à l'article 24, a également été effective fin 2022, avec le décret n° 2022-1697 du 29 décembre 2022 et le décret n° 2022-1698 du 30 décembre 2022, portant respectivement sur l'information des personnes ayant signalé une information préoccupante, et approuvant le référentiel national d'évaluation des situations de danger ou de risque de danger pour l'enfant.

S'agissant des dispositions relatives à la gouvernance, la refonte des instances existantes au sein d'un groupement d'intérêt public (GIP) prévue à l'article 36, est pleinement effective depuis le 1er janvier 2023. La convention constitutive du GIP France enfance protégée a été approuvée par l'arrêté du 10 décembre 2022.

Le décret n° 2022-1729 du 30 décembre 2022, a par ailleurs redéfini les missions du Conseil national de la protection de l'enfance (CNPE), ainsi que la composition de ses cinq collèges.

En ce qui concerne l'échelon départemental, l'article 37 avait prévu la mise en place, à titre expérimental et dans les départements volontaires, d'un comité départemental pour la protection de l'enfance (CDPE). Le décret n° 2022-1730 du 30 décembre 2022 est venu préciser la composition du CDPE et déterminer ses modalités de réunion et d'organisation ainsi que son articulation avec l'observatoire départemental de la protection de l'enfance. La liste des dix départements volontaires, que nous saluons, a également été précisée par un décret du 29 mars 2023. Ces départements sont les Bouches-du-Rhône, le Cher, la Drôme, l'Eure-et-Loir, le Loiret, le Maine-et-Loire, le Nord, les Pyrénées-Atlantiques, le Pas-de-Calais et la Somme.

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En préambule de mon intervention, je souhaiterais également souligner l'importance des rapports d'application. Il revient au législateur de contrôler l'action du Gouvernement et l'application de l'ensemble des mesures que nous avons votées.

Au-delà de ces avancées pour la protection des enfants, dont nous pouvons nous féliciter, il convient également d'évoquer la publication tardive de certains décrets, ayant retardé l'entrée en vigueur de plusieurs de ces mesures.

Il s'agit notamment de l'article 1er, qui prévoit, en cas d'accueil d'un enfant protégé chez un membre de la famille ou un tiers digne de confiance, dont le décret d'application a été publié le 28 août 2023.

Nous pouvons également évoquer l'article 14, prévoyant la possibilité pour le juge de proposer aux parents une mesure d'assistance éducative, dont le décret d'application n'a été publié que le 2 octobre 2023.

De même, l'article 17, permettant aux mineurs accueillis par l'ASE de désigner une personne majeure de confiance afin de l'accompagner dans ses démarches, n'a été suivi de la publication de son décret d'application que le 28 août 2023. Le décret d'application de l'article 25, créant la possibilité pour le juge des enfants de renvoyer un cas complexe à une formation collégiale en assistance éducative, a été publié le 2 octobre 2023.

Deux mesures phares du texte ont fait l'objet d'une application particulièrement tardive. Il s'agit des décrets publiés le 19 février dernier, évoqués en préambule de cette intervention. Ainsi l'article 7, qui a posé le principe de l'interdiction de l'hébergement en hôtel des enfants pris en charge au titre de l'ASE, sauf exception, et l'article 9, portant sur le mentorat et le parrainage des enfants faisant l'objet d'une mesure de protection, sont entrés en vigueur il y a un peu plus d'un mois seulement.

Si l'entrée en vigueur très attendue de l'article 7 de la loi, qui interdit l'hébergement à l'hôtel des mineurs relevant de l'ASE, est à saluer, nous déplorons néanmoins la tardiveté de la publication du décret, ce qui n'a pas permis aux départements de trouver des solutions alternatives adaptées pour ces jeunes, et nous regrettons la portée des dérogations introduites au principe d'interdiction.

En effet, dans certaines situations d'urgence, les jeunes majeurs de moins de 21 ans et les mineurs de plus de 16 ans pourront être hébergés dans des structures telles que des centres de vacances ou autres structures autorisées sous la surveillance, de jour comme de nuit, d'un professionnel formé et sans excéder deux mois d'hébergement. Le décret ne mentionne pas de ratio d'encadrement par jeune accueilli et ne précise pas la nature de la formation suivie par ces professionnels accompagnants, dont le rôle semble relever de la simple surveillance.

Nous resterons vigilants quant à la mise en œuvre de ce décret, afin que le nombre et la qualification des professionnels chargés de l'accueil des enfants en pareille situation soient compatibles avec l'intention du législateur, qui est de renforcer la protection de ces enfants et d'améliorer leurs conditions de vie et de développement.

Enfin, les mesures relatives à la petite enfance prévues dans la loi ne sont, pour l'essentiel, pas entrées en vigueur, faute de publication des décrets, ce dont on ne peut se satisfaire.

La réforme de la protection maternelle et infantile (PMI), prévue par l'article 32 de la loi, est largement privée de sa portée en l'absence de publication des décrets, déterminant d'une part les objectifs nationaux de santé publique devant être respectés pour garantir un niveau minimal de réponse aux besoins sanitaires et sociaux de la population, et d'autre part, les normes minimales d'effectifs à respecter au sein des services et activités intervenant dans le champ de la petite enfance.

Alors que l'article 32 de la loi précise que la fixation de ces objectifs nationaux et des normes minimales d'effectifs relève d'un décret en Conseil d'État pour une entrée en vigueur au 31 décembre 2022 au plus tard, le décret n'a pas encore été publié.

L'arrêté prévu par l'article 34, relatif aux dispositifs médicaux de soutien à l'allaitement que l'infirmier est habilité à prescrire, n'a pas non plus été publié.

Le rapport sur la prise en charge par l'assurance maladie des actes et des examens effectués par les infirmiers est également en attente.

Nous déplorons que l'ensemble des mesures qui concrétisent la réforme de la petite enfance dans la loi du 7 février 2022 subissent un tel retard de mise en œuvre.

Le cabinet de la ministre déléguée chargée de l'enfance et de la jeunesse, rencontré dans le cadre de nos travaux, a pu nous exposer les difficultés de concertation tout autant que techniques rencontrées pour la mise en œuvre de certaines mesures.

Ainsi, l'instauration de la base de données nationale des agréments, prévue par l'article 36, nécessite une importante conduite de projets sous l'égide de l'Agence française de l'adoption, coordonnant des groupes de travail composés chacun d'une quinzaine de départements, en vue de la conception de la base de données au second semestre 2024 et d'un déploiement complet en 2025.

Parallèlement, les travaux réglementaires nécessitant l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et du Conseil d'État sont prévus simultanément à cette conduite de projets, afin de publier le décret d'application fin 2024.

Sans minimiser les obstacles techniques et le temps de concertation nécessaire de l'ensemble des acteurs nationaux et locaux, nous regrettons l'absence de mise en œuvre de ces dispositions, plus de deux ans après la promulgation de la loi. Nous invitons le Gouvernement à veiller à ce que leur application intervienne dans les meilleurs délais.

Pour conclure, nous serons attentifs à l'évaluation qui devra être faite de l'application de cette loi et à son application sur le terrain, notamment en ce qui concerne la situation des mineurs non accompagnés dans les territoires ruraux. En particulier, les dérogations à l'interdiction d'hébergement à l'hôtel des mineurs de l'ASE, devront faire l'objet d'une attention très particulière dans le cadre de la future évaluation.

Il conviendra également, dans ce cadre comme dans le rapport d'application de la loi, de veiller à la conformité des pratiques avec l'intention claire du législateur, pouvant ainsi être synthétisée : toujours protéger l'intérêt supérieur de l'enfant, quels que soient son histoire, son parcours, son état de santé physique ou psychique, ou sa nationalité.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Merci pour la qualité de ce rapport d'application, qui nous permet d'analyser l'efficacité de la loi et d'évaluer les besoins qu'elle nécessite désormais.

Au nom de mon groupe parlementaire, j'aimerais mettre en lumière les mesures clefs adoptées dans cette loi, dite « loi Taquet », qui revêtent une importance majeure pour le bien-être des enfants sous protection.

En particulier, l'article 28 a permis une révision de la rémunération des assistants familiaux et l'accès à certaines indemnités, assurant ainsi une reconnaissance pleine et continue de leur rôle crucial dans l'accompagnement éducatif, psychologique et médical des enfants.

De même, l'article 10 a instauré un accompagnement éducatif et professionnel pour les jeunes majeurs pris en charge par l'ASE, les préparant ainsi à une future autonomie.

Tandis que certaines de ces dispositions étaient directement effectives dès la promulgation de la loi, d'autres articles, vous l'avez souligné, ont exigé des actes d'application ultérieurs pour être mis en œuvre. C'est notamment le cas de l'article 7, qui prévoyait le principe d'interdire l'accueil en chambre d'hôtel des enfants de l'ASE. Un décret d'application de cette interdiction a été publié le 16 février, en réponse notamment au tragique suicide d'une jeune fille de l'ASE dans l'un de ses hôtels sociaux à Clermont-Ferrand.

En réalité, ce décret contient un nombre trop élevé de dérogations à l'interdiction, telles que la possibilité d'accueillir des jeunes de 16 à 21 ans dans les conditions prévues par ce texte. Je rejoins donc mes collègues dans leur appel au Gouvernement pour que les dernières dispositions évoquées par les rapporteurs soient mises en application, près de deux ans après la promulgation de la loi.

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Je souscris aux propos de ma collègue Caroline Janvier, mais n'aborderai pas ce sujet tragique en deux minutes.

Merci, madame et monsieur les rapporteurs, pour la présentation de ce rapport d'application sur l'une des lois les moins bien appliquées. Malheureusement, ce rapport permet d'avoir une vue d'ensemble sur les dispositions dont l'application était dite « directe » ou nécessitait un décret. Je mets le terme « directe » entre grands guillemets, car la loi Taquet, ambitieuse, s'est heurtée à de nombreuses réalités structurelles ne permettant qu'une application très partielle.

Lors de son audition devant la commission des affaires sociales le 24 mai 2023, la secrétaire d'État Charlotte Caubel, expliquait que les études d'impact sur plusieurs dispositions de la loi Taquet, avaient été « un peu rapides » et qu'il était nécessaire de poursuivre les discussions avec les départements avant la publication de ses décrets.

La non-séparation des fratries, qui est une mesure salutaire, est l'un des exemples de la difficile application de la loi par les départements. En effet, ce principe oblige les services de l'ASE à conserver suffisamment de places disponibles dans un même établissement pour accueillir conjointement plusieurs enfants. Si les structures, telles que les villages d'enfants, parviennent à répondre en partie à cette obligation, force est de constater que cela ne suffit pas malgré une réelle volonté.

En 2021, selon la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, soixante-douze départements n'accueillaient aucun enfant en village d'enfants et la pénurie d'assistants familiaux ne permet pas de répondre entièrement à cette impossibilité pour les départements.

De plus, la mission de l'ASE consistant à veiller au maintien des liens familiaux entre l'enfant accueilli et ses frères et sœurs n'est pas suffisamment assurée, notamment du fait de placements souvent trop éloignés du lieu de vie familial ou du reste de la fratrie. Cette mission est même complexifiée par un changement incessant des lieux de placement. Si d'aventure un lieu d'accueil commun est introuvable, ce qu'on peut imaginer, il convient de faire en sorte que la fratrie puisse continuer à passer des moments ensemble.

Lorsque les enfants sont placés dans des lieux séparés au titre de mesures d'assistance éducative, les juges doivent veiller à l'organisation de moments de réunion entre eux, afin d'entretenir le lien familial. Or, à cet égard, de nombreux témoignages montrent l'inapplicabilité du travail du législateur en la matière.

La semaine dernière, nous avons auditionné Lyes Louffok, qui déplorait précisément le trop grand nombre de fratries encore séparées. Cet aspect nous paraît évidemment un point non négociable de cette loi et de son application.

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Comme vous l'avez souligné, alors que la loi du 7 février 2022 a été promulguée il y a plus de deux ans, le fait qu'il manque encore des décrets à ce jour est grave. De surcroît, si l'application de cette loi a pris du retard, même l'évaluation de son application connaît un retard puisque le présent rapport intervient deux ans après. Or en principe, l'application d'une loi a lieu dans les six mois suivant la promulgation de celle-ci.

Certains de mes collègues ont souligné la qualité de votre rapport. Je suis désolée, mais l'échéancier qui nous a été communiqué, correspond globalement à ce que l'on trouve déjà sur le site public Légifrance. Par conséquent, j'aurais apprécié de connaître, à la lecture de ce rapport, les raisons expliquant les manques et les retards dans la parution des décrets d'application, ainsi que les dates de parution des prochains décrets.

En d'autres termes s'agissant des décrets, il m'apparaît indispensable d'avoir des explications sur les causes du blocage. Selon moi, il s'agit précisément du contenu de l'évaluation à effectuer aujourd'hui. Quelles sont les raisons justifiant que nous ayons tant retardé l'entrée en vigueur totale de la loi du 7 février 2022 ?

Je rappelle qu'en mai 2023, Charlotte Caubel nous faisait part de l'imminence du décret sur l'interdiction des placements hôteliers. Malheureusement, il a fallu attendre le suicide de Lily dans mon département et la pression de tous les acteurs – les anciens enfants placés, les travailleurs sociaux mais aussi les parlementaires – pour qu'enfin, un décret soit pris. Pour autant, le décret dont il s'agit, est presque cynique au regard de la gravité de la situation de ces enfants, qui sont encore logés dans des hôtels aujourd'hui. En effet, ce décret vise simplement à déroger à la loi, c'est-à-dire à permettre de maintenir des enfants dans les hôtels. Or il est indéniable qu'à 16 ans, ce sont encore des enfants, tant au regard de la loi que de leur développement.

Il nous a été indiqué que les départements avaient éprouvé des difficultés dans l'application de la loi, alors qu'en réalité, les départements n'ont consenti aucun effort pour préparer cette application. Aucun dispositif n'a été mis en place.

En définitive, au vu de la gravité de la situation, dans laquelle des vies d'enfants sont en jeu, je réitère ma demande aux rapporteurs de préciser dans leur rapport les causes des blocages. A l'heure actuelle, les enfants sont pris dans un conflit entre les départements et l'État, qui chacun, « se renvoient la balle ».

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Le groupe Démocrate se félicite que l'essentiel des décrets d'application de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, portée à la fin du quinquennat précédent par le secrétaire d'État Adrien Taquet, ait été publié.

Je pense notamment aux différents décrets du 16 février dernier, qui ont rendu possible l'application de l'une des mesures phares de la loi : l'interdiction de faire dormir à l'hôtel des jeunes accueillis au titre de la protection de l'enfance. Enfin ! Mais pourquoi aussi tardivement ? Il en va en effet de la dignité de notre République de prendre en soin dignement ces jeunes, parfois des enfants, qui subissent déjà une situation familiale et un début dans la vie particulièrement difficiles.

Bien entendu, la bonne application du décret devra elle-même être respectée sur le terrain. C'est là un enjeu réel, ne nous voilons pas la face. Cette disposition pose néanmoins une exigence forte pour l'ASE, celle de ne plus se résoudre à ce que des jeunes soient exposés au risque d'une nuit seuls à l'hôtel. Il s'agissait d'une solution qui ne pouvait être que provisoire, à laquelle les services de l'aide sociale ne recouraient évidemment pas de gaieté de cœur.

À cet égard, le groupe Démocrate tient à saluer le dévouement et l'abnégation de des personnels de l'ASE face à l'urgence de situations sociales dramatiques, face à la violence et face parfois à un sentiment d'impuissance.

Il est essentiel que la volonté du législateur pour mieux protéger les enfants soit respectée. C'est ce que ce rapport nous permet de vérifier aujourd'hui.

Notre groupe prend acte des décrets restant à édicter pour réformer la PMI, comme le prévoit la loi Taquet. Comme les autres parlementaires engagés sur le sujet, les députés du groupe Démocrate seront vigilants envers le pouvoir réglementaire, à qui il appartient de rendre cette loi applicable. Nous avons néanmoins confiance en la volonté du Gouvernement de faire de cette loi, dont il est à l'origine, une réalité pour améliorer la protection des enfants.

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Permettez-moi de remercier Mme la rapporteure Peyron, notamment pour son propos introductif qui permettait de replacer le débat et aussi de souligner – venant de la part d'une députée de la majorité, je pense que cela mérite d'être salué – les manques dans la mise en application de cette loi.

Il est vrai qu'il apparaît assez singulier de débattre d'un rapport d'application pour lequel nous n'avons reçu qu'un tableau. Ce tableau correspond peu ou prou à ce qu'on peut déjà trouver sur les sites de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui listent les mesures d'application de nature législative et réglementaire.

Nous pouvons être légitimement frustrés, notamment parce qu'un certain nombre de décrets ont été pris très tardivement et que d'autres sont encore absents, notamment en ce qui concerne la PMI. Par ailleurs, alors même que la loi Taquet était une loi timide mais attendue par le secteur, son application est encore plus timide, voire parfois muette.

La place et le rôle de l'État dans la protection des enfants doivent être renforcés. Les drames humains qui ont été évoqués, comme celui cité par ma collègue Maximi dans le Puy-de-Dôme, doivent nous alerter sur les carences de l'action publique et la nécessité de renforcer cette action.

Je rappelle par ailleurs que le groupe Socialistes et apparentés a choisi d'utiliser son « droit de tirage » pour lancer une commission d'enquête sur les manquements de la politique de protection de l'enfance. Il faut continuer, notamment en ce qui concerne l'interdiction du placement des enfants. Il a fallu attendre le 16 février, mais vous l'avez dit, c'est incomplet.

Il manque encore des précisions sur le taux d'encadrement et les compétences requises pour être encadrant. Enfin, je dirais qu'il manque aussi quelque chose pour moi dans les propos que vous avez eus.

Enfin, quid des mineurs non accompagnés (MNA) et des traitements dégradants dans les lieux de mise à l'abri ? Je pense, par exemple, à la protection des enfants à la frontière à Menton. Ces sujets font partie des angles morts de cette loi, et mériteraient aussi d'être traités.

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Madame et monsieur les rapporteurs, votre travail sur l'application de la loi du 7 février 2022 relative à la protection de l'enfance fait état de l'engagement du Gouvernement et de sa majorité en faveur de la protection de l'enfance, dans la lignée de la Stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance 2020-2022 qui, avec cette loi, est venue apporter plusieurs réponses concrètes aux défaillances alors identifiées.

Je pense notamment à l'interdiction des placements à l'hôtel des mineurs et jeunes majeurs confiés à l'ASE, au droit de retour à l'ASE avant 21 ans ou encore au renforcement massif des contrôles, notamment en faveur de la politique de lutte contre la maltraitance.

Je tiens également à souligner qu'en novembre 2023, la Première ministre Élisabeth Borne a lancé le troisième plan contre la violence faite aux enfants lors du comité interministériel à l'enfance, qui vise à aller plus loin pour mettre fin aux insuffisances persistantes sur ce sujet. En ce sens, on peut citer notamment la création d'un pack « jeunes majeurs » destiné à accompagner vers l'autonomie chaque jeune accédant à la majorité, ou encore le doublement du budget consacré aux enfants protégés en situation de handicap.

Cependant, nous relevons également que trois dispositions de la loi n'ont à ce jour pas encore fait l'objet d'une mise en œuvre réglementaire. Il s'agit des dispositions relatives à la réforme de la PMI, prévue aux articles 32 et 34, et à la mise en œuvre en application de l'article 36 d'une base nationale recensant les demandes, retraits et refus d'agrément en vue d'une adoption.

Rappelons que si la loi dite « Taquet » portait des avancées concrètes et attendues, il nous reste encore du chemin à parcourir pour assurer le soin efficace que nécessitent et méritent ces enfants.

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J'ai pris connaissance du rapport présentant les mesures ayant fait ou non l'objet d'une mise en application. Selon ce tableau, il semblerait donc que seulement trois mesures de la loi du 7 février 2022 nécessitent encore la publication d'un décret.

Mieux vaut tard que jamais puisque le Sénat en mars 2023, dans sa mission d'information sur l'application des lois relatives à la protection de l'enfance, attirait l'attention sur le fait qu'un an après sa promulgation, seules 37 % des mesures réglementaires attendues avaient été prises.

Le Sénat soulignait aussi que ce texte apportait des ajustements et des améliorations aux dispositifs existants, et forme désormais un bloc normatif cohérent avec les lois de 2007 et 2016.

Il était donc regrettable que certaines de ces mesures ne produisent pas des effets juridiques. Pour autant, je souhaite tout de même vous alerter sur certains obstacles qui persistent.

En effet, malgré l'augmentation significative du nombre de jeunes bénéficiant de mesures de protection et d'accompagnement vers l'autonomie sociale et professionnelle, leur intégration sociale reste un véritable parcours du combattant.

Un questionnaire mené par le collectif Cause Majeur ! auprès de 3 000 jeunes, révèle que seuls 7 % d'entre eux ont passé l'entretien prévu six mois après leur sortie de la protection sociale, notamment du fait du refus de la part des départements.

Enfin, l'accompagnement, qui est une obligation légale, reste soumis à de fortes inégalités territoriales, puisque sa durée et le montant de l'allocation varient beaucoup actuellement d'un département à l'autre.

Ce sont des pistes de travail pour continuer à améliorer les dispositifs actuels.

La cause des mineurs ne peut pas être prise en otage entre les départements et l'État.

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La loi Taquet était une loi attendue puisqu'elle venait rattraper une situation extrêmement dégradée dans la protection de l'enfance. Cette loi posait quelques protections élémentaires, notamment l'interdiction des sorties « sèches » à 18 ans et de l'hébergement d'un mineur à l'hôtel ainsi que la nécessité d'un agrément pour les assistants familiaux. Il s'agissait même du minimum attendu de l'ASE.

Pourtant, le temps pris pour publier les décrets, l'absence de certains d'entre eux et le fait que même le rapport sur la loi soit présenté sous forme de tableau sans un approfondissement de l'effet des mesures me semblent dire en filigrane à quel point la volonté politique indispensable à la protection de nos enfants n'est pas tout à fait présente. Or, il s'agit d'enfants qui sont confiés à l'État, précisément parce que leurs familles sont défaillantes.

En réalité, alors que nous sommes les parents de substitution des enfants concernés, même le rapport d'application de cette loi ne dit pas combien nous traitons avec importance et considération la situation de ces enfants.

Le premier élément sur lequel je souhaite mettre l'accent, est l'absence de base de données nationale des agréments des familles d'assistants familiaux. J'entends qu'il y ait des problèmes informatiques. Je rappelle cependant qu'il s'agit de la sécurité des enfants placés. Par conséquent, il ne saurait être question d'accepter, parce que la famille s'est déplacée d'un département à l'autre, une absence de suivi ou de considération de l'agrément de ces familles.

En deuxième lieu, je déplore le nombre de dérogations pour les mineurs qui sont encore hébergés aujourd'hui à l'hôtel. Nous avons évoqué le cas de Lily qui s'est suicidée, après avoir passé cinq mois à l'hôtel. Quel État social permet ainsi qu'une enfant de 15 ans soit logée seule, pendant plusieurs mois à l'hôtel ?

J'insiste sur ce point parce que dans la mission d'information sur les urgences psychiatriques que nous menons avec Nicole Dubré-Chirat, les problématiques de l'ASE et de la PMI pèsent de manière conséquente sur la santé psychique de ces enfants, qui manquent de soins, de suivi et d'accompagnement.

Enfin, en France, 40 % des personnes sans domicile fixe de moins de 25 ans sont issues de l'ASE, car les sorties sèches à 18 ans sont encore trop nombreuses. Nous devons absolument avoir une volonté politique bien plus affirmée sur ces questions.

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Je souhaite interroger les corapporteurs sur l'absence de publication du rapport sur la prise en charge par l'assurance maladie des actes et examens effectués par les infirmières puéricultrices dans les services de PMI, qui était pourtant prévu à l'article 35 de la loi Taquet. Si ces services départementaux remplissent depuis toujours une mission essentielle en matière de protection sanitaire de la mère et de l'enfant, ils sont pourtant confrontés à de nombreuses difficultés mises en évidence antérieurement au vote de la loi dans le rapport de Mme Peyron. Parmi ces difficultés, figurent la pénurie de moyens et les difficultés de recrutement causées en raison, notamment, du départ à la retraite de deux tiers des médecins de PMI en 2020.

Cette demande de rapport traduit donc dans son contenu une piste de réflexion judicieuse pour améliorer sur le plan économique la situation de la PMI.

Le rapport d'application de la loi Taquet indique toutefois que ce rapport n'a toujours pas été rendu à ce jour. Aussi, les corapporteurs ont-ils obtenu des informations du Gouvernement sur son état d'avancement ?

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Nous souhaiterions connaître la liste des personnes auditionnées pour préparer le rapport d'application de la loi du 7 février 2022.

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En premier lieu, j'apporterai une réponse sur la forme. Le rapport d'application n'est pas un rapport d'évaluation, étant observé que je m'attellerai à ce dernier le plus rapidement possible. Madame Maximi, tout comme vous je suis dans les starting blocks et un peu amère sur les manques constatés, de même que sur la manière dont le travail a été fait. Pour autant, il faut avoir conscience de la différence entre un rapport d'évaluation et un rapport d'application.

En second lieu, je traiterai des questions de fond et des explications des retards pris, dans l'ordre des articles.

L'article 7 a trait à l'interdiction de l'accueil hôtelier pour les enfants et les jeunes majeurs accueillis au titre de la protection de l'enfance. Pour cet article, un groupe de travail a été constitué, réunissant les conseils départementaux les plus concernés par l'accueil des mineurs et de jeunes de moins de 21 ans dans des structures autres que celles autorisées par le code, à savoir la Seine-Saint-Denis et les Hauts-de-Seine, ainsi que l'Association nationale des directeurs de l'action sociale et de la santé, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse, le Groupe national des établissements publics sociaux et médico-sociaux et la Convention nationale des associations de protection de l'enfant. Plusieurs partenaires, représentant notamment les conseils départementaux et les usagers, bien qu'invités, ne se sont pas présentés.

À l'issue d'une réunion de concertation organisée début juillet 2023, une version finalisée du texte a été établie. La rédaction issue de cette concertation constitue un équilibre entre les différents acteurs présents, portant des positions opposées quant aux normes à définir. Le projet de décret a recueilli par la suite l'assentiment du cabinet de la secrétaire d'État chargé de l'enfance de l'époque. Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a rendu un avis négatif définitif lors de la séance du 7 décembre 2023. Le CNPE, saisi le 3 novembre 2023, a rendu un avis défavorable le 30 janvier 2024. Par conséquent, le décret a été mis dans le circuit de publication à la suite de la réception de l'avis du CNPE, puisque c'était le dernier à s'exprimer.

Le décret est le résultat d'une concertation au cours de laquelle des positions divergentes ont été exprimées quant aux normes d'encadrement à fixer, notamment en ce qui concerne la surveillance de nuit. Sa rédaction constitue donc un équilibre fin entre les diverses revendications et positions exprimées.

Cependant, le texte comporte des lignes fortes et des garde-fous, tels que l'interdiction de placer des mineurs de moins de 16 ans dans des structures relevant du régime dérogatoire. Le décret prévoit en outre l'obligation de s'assurer, préalablement au recours à ce type d'hébergement et tout au long de la prise en charge, que ce mode d'hébergement soit adapté à l'âge et aux besoins fondamentaux du jeune concerné.

De plus, le décret fixe l'obligation, pour le président du conseil départemental, de s'assurer par des visites régulières sur site, des conditions matérielles de la prise en charge. Il prévoit également une surveillance, de nuit comme de jour, au sein de la structure, par la présence physique sur site d'au moins un professionnel formé à cet effet, aux fins de garantir la protection des personnes qui y sont accueillies.

Comme annoncé dans mon avant-propos, je serai très vigilante quant à la formation de ces personnels, qui ne sont pour le moment que de surveillance, afin de déterminer s'ils sont en mesure d'accompagner les jeunes dont ils ont la responsabilité, aussi bien sur le plan de leur sécurité qu'au niveau de leur évolution personnelle et sociale.

En tout état de cause, il n'est pas inutile de rappeler le contexte général du vote de février 2022, qui s'est déroulé à la veille de deux élections majeures en France : l'élection présidentielle et les élections législatives.

Le premier décret d'application de la loi a été publié début août 2022, avant qu'une grande latence ne s'installe. Par la suite, nous avons subi des changements de secrétaire d'État ou de ministres délégué. De surcroît, certains partenaires intéressés par cette loi ne se sont pas présentés aux réunions, notamment les représentants des hôtels, de sorte que le Gouvernement a mené la concertation avec les personnes présentes.

L'article 9 prévoit la proposition systématique d'un parrainage et d'un mentorat aux enfants pris en charge par l'ASE. Des travaux ont été engagés avec les acteurs du parrainage et du mentorat à l'automne 2022. Dans le cadre de ces travaux, différents points juridiques ont été soulevés, portant sur les modalités de déclinaison de la disposition législative sur le plan réglementaire, notamment en ce qui concerne le contrôle des antécédents judiciaires et l'habilitation de l'association chargée de coordonner l'action de parrainage, au regard de la nécessité de maintenir une certaine souplesse du dispositif pour ne pas entraver le recours au parrainage et au mentorat.

Ces travaux ont permis d'aboutir à des projets de décret à la fin du premier semestre 2023, soumis à l'avis du CNPE et du CNEN en juillet 2023. Le CNEN a rendu un avis négatif lors de sa réunion du 7 septembre, confirmé lors de la séance du 5 octobre 2023. Le CNPE a rendu un avis sous réserve le 13 octobre 2023. Le processus de signature n'a cependant pu aboutir qu'après le changement gouvernemental, avec une publication en février 2024.

Pour rappel, l'article 32 rénove la politique de la PMI. Un projet de décret a été élaboré sur la base de travaux d'un groupe de travail technique piloté par la direction générale de la santé, qui a associé notamment des experts de la santé de l'enfant, des représentants des professions concernées et un représentant des départements de France désigné par Départements de France.

Cependant, la concertation avec Départements de France sur le projet de décret ainsi que les consultations obligatoires du CNEN et du Conseil d'État, et donc la publication de ce décret, ont été décalées en raison du lancement des travaux des Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant. À cet égard, je vous annonce que le rapport des Assises de la pédiatrie, que j'attends depuis juin 2022, sera publié fin avril 2023.

En tout état de cause, l'absence de publication du décret à ce jour ne pose pas de difficulté, dès lors que les normes d'effectifs régissant l'activité des PMI et des centres de santé sexuelle existent déjà dans le code de la santé publique. De ce fait, il n'existe aucun vide juridique.

La publication du décret pourrait intervenir d'ici la fin de cette année, dès lors que les concertations en amont avec les départements de France, qui sont indispensables, auront pu être menées pour permettre le lancement des consultations obligatoires.

Le II de l'article 32 concerne la date d'entrée en vigueur des dispositions, qui seront intégrées dans le décret en Conseil d'État susmentionné. Il y aura un seul texte pour ces deux mesures.

Concernant les dispositifs médicaux de soutien à l'allaitement, l'arrêté fixant leur liste n'a toujours pas été publié. Les travaux sont encore en cours pour une publication dans les meilleurs délais, ainsi qu'il me l'a été indiqué.

Au titre de l'article 30, le GIP France enfance protégée est chargé, en application de l'article L. 421-7-1 du code de l'action sociale et des familles, de la base nationale de données des agréments des assistants familiaux et des assistants maternels. La création du GIP a donc été un préalable au lancement des travaux d'ingénierie des systèmes d'information prévus par la loi du 7 février 2022.

S'agissant de la base précitée, des concertations ont été engagées à l'automne 2023 pour réaliser un premier état des lieux. Parallèlement, le GIP a procédé au recrutement d'un chef de projet Systèmes d'information, chargé de la création et du déploiement de deux bases de données prévues par la loi du 7 février 2022.

Les travaux relatifs à la base nationale de données des agréments en vue d'adoption pouvant prendre appui sur un cadre déjà existant et ceux relatifs aux assistants familiaux et maternels nécessitant une expertise avec le système d'information de Pajemploi, la priorité a été donnée à la création de la base nationale de données des agréments en vue d'adoption.

L'article 35 prévoit la production d'un rapport sur la prise en charge par l'assurance maladie des actes et examens effectués par les infirmières puéricultrices dans les services de PMI. À ce jour, ce rapport n'a pas été rédigé, car il était prévu de l'articuler avec les travaux relatifs aux Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant, à paraître à la fin du mois. Je ferai donc en sorte d'insister pour que l'ensemble avance enfin.

Enfin, concernant l'article 36 et le regroupement des instances nationales de protection de l'enfance, le décret prévu a pour objet de répartir, entre les départements, leurs contributions annuelles respectives pour le fonctionnement du GIP France enfance protégée. Ainsi, le décret du 25 septembre 2023 a fixé le montant de la contribution financière des départements au fonctionnement du GIP au titre de l'année 2023. Un décret similaire est en cours de préparation pour l'exercice 2024.

S'agissant de la création du système d'information du GIP et parallèlement, des travaux réglementaires le nécessitant, la date est fixée à fin 2024.

Telles sont les explications que j'ai recueillies concernant les retards, mais je reconnais la nécessité d'accélérer encore le processus.

Je ne m'exprimerai pas sur les MNA car je mène depuis janvier 2024, avec Elsa Faucillon, une mission pour le compte de la délégation aux droits des enfants. Notre rapport sera rendu fin juin. Après nous être rendues à Calais il y a une quinzaine de jours, nous serons demain à Menton et à Nice. À cette occasion, nous rencontrerons évidemment les représentants du département et de la préfecture.

Pour conclure, je reconnais que vous ne disposez que d'un tableau, mais pas encore d'avant-propos. La raison tient au fait que mon corapporteur et moi-même sommes encore en désaccord sur certains éléments. Par conséquent, dès que nous serons parvenus à un accord, ce que j'espère, l'avant-propos sera disponible.

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Mme Peyron a été claire sur l'état de nos conclusions. Sachez que nous sommes comme vous. Nous avons sous les yeux des décrets appliqués et des décrets encore en attente. Notre rôle est d'avoir toujours à l'esprit l'intérêt supérieur de l'enfant. Nous serons donc attentifs, dans les mois à venir, à la publication de ces décrets.

En application de l'article 145-7 du Règlement, la commission autorise la publication du rapport d'application.

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Pour conclure, il convient de rappeler que nous démarrons aujourd'hui les travaux de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie, qui vont évidemment beaucoup mobiliser une partie des commissaires aux affaires sociales et des services. Par conséquent, les travaux de la commission en seront quelque peu ralentis. Cependant, je souhaitais vous informer de l'audition du ministre délégué chargé de la santé, qui se tiendra le mardi 30 avril à 17 heures.

La réunion s'achève à douze heures trente-cinq.

Présences en réunion

Présents. – M. Éric Alauzet, M. Thibault Bazin, M. Christophe Bentz, Mme Sylvie Bonnet, Mme Chantal Bouloux, M. Victor Catteau, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, M. Paul-André Colombani, Mme Josiane Corneloup, Mme Laurence Cristol, M. Arthur Delaporte, M. Pierre Dharréville, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Ingrid Dordain, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Karen Erodi, M. Philippe Frei, M. François Gernigon, Mme Monique Iborra, Mme Caroline Janvier, Mme Rachel Keke, Mme Laure Lavalette, Mme Christine Le Nabour, Mme Brigitte Liso, Mme Jacqueline Maquet, M. Didier Martin, Mme Joëlle Mélin, M. Yannick Monnet, M. Serge Muller, M. Yannick Neuder, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Astrid Panosyan-Bouvet, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, Mme Maud Petit, Mme Michèle Peyron, M. Sébastien Peytavie, Mme Anna Pic, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Stéphanie Rist, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, M. François Ruffin, M. Emmanuel Taché de la Pagerie, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, M. Alexandre Vincendet, M. Stéphane Viry

Excusés. – Mme Farida Amrani, Mme Anne-Laure Babault, Mme Fanta Berete, M. Louis Boyard, Mme Caroline Fiat, M. Thierry Frappé, M. Jérôme Guedj, Mme Sandrine Josso, Mme Angélique Ranc, M. Olivier Serva, Mme Isabelle Valentin

Assistaient également à la réunion. – M. Fabien Di Filippo, M. Didier Le Gac, Mme Marianne Maximi, M. Laurent Panifous, Mme Mathilde Paris, M. Vincent Rolland